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Moyen Orient et Monde - Crise

« Ce n’est pas une menace, c’est en fait une déclaration de guerre à l’Ukraine »

L'intervention russe en Crimée indigne les Occidentaux et Washington menace la Russie d'une exclusion du G8 ; l'OTAN demande le déploiement d' « observateurs internationaux » pour résoudre le conflit pacifiquement.

« Ce n’est pas une menace, c’est en fait une déclaration de guerre à l’Ukraine. » Le SOS du Premier ministre ukrainien dit (presque) tout de l’inquiétude de Kiev face aux velléités plus que belliqueuses de Moscou. Et c’est le branle-bas de combat diplomatique et politique en Occident, où l’indignation, les manifestations (photo Yuriy Dyachyshyn / AFP), la menace (une exclusion de la Russie du G8, brandie par John Kerry) et les volontés d’apaisement, notamment de la part de l’OTAN, ont rythmé ce dimanche. Reste la question ultime : Moscou envahira-t-il l’Ukraine comme il l’a fait en Géorgie en 2008 ?

L'Ukraine s'est considérée hier « au bord de la catastrophe » à la suite de la « déclaration de guerre » de la Russie, alors que l'Occident cherchait une issue à l'un des plus graves conflits avec Moscou depuis la guerre froide. « Si le président (russe Vladimir) Poutine veut être le président qui a commencé une guerre entre deux pays voisins et amis, il est tout près d'atteindre son objectif », a ainsi lancé le Premier ministre, Arseni Iatseniouk, à la suite de la menace choc de la Russie d'intervenir militairement sur le territoire de cette ancienne république soviétique. « Ce n'est pas une menace, c'est en fait une déclaration de guerre à mon pays », a-t-il ajouté, s'exprimant en anglais, comme pour mieux se faire entendre de la communauté internationale.


Le ministre canadien des Affaires étrangères, John Baird, a qualifié pour sa part cette intervention militaire d' « agression à la soviétique ». Son homologue tchèque Lubomir Zaoralek a annoncé hier avoir convoqué l'ambassadeur de Russie à Prague. La Lituanie a rappelé son ambassadeur en Russie pour consultations. Quant au ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, et son homologue grec, Evangelos Venizelos, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE, ils sont arrivés hier à Kiev, où atterrira demain John Kerry.

 

(Commentaire : La terre de Crimée de la Russie ?)

 

Jouer la prudence
C'est ainsi que l'OTAN a demandé hier le déploiement, sous les auspices du Conseil de sécurité des Nations unies ou de l'OSCE (Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe), d' « observateurs internationaux » en Ukraine pour résoudre la crise pacifiquement. Son secrétaire général Anders Fogh Rasmussen s'exprimait à l'issue de près de huit heures d'une réunion d'urgence des 28 ambassadeurs de l'Alliance atlantique, dont une partie s'est tenue en présence du représentant de l'Ukraine, pays avec lequel l'OTAN a signé un partenariat. « Nous condamnons l'escalade militaire russe en Crimée », a aussi dit M. Rasmussen, avant d'appeler la Russie « à respecter ses engagements internationaux, à replier ses forces dans ses bases et à ne pas interférer ailleurs en Ukraine », une ancienne république soviétique.


L'OTAN a donc joué la prudence et est restée sur le terrain politique, souhaitant même maintenir le dialogue avec Moscou à travers leur outil de coopération, le Conseil OTAN-Russie, dont plusieurs pays membres ont demandé une réunion prochaine. Le représentant de l'Ukraine, Igor Dolgov, a noté que les appels à la Russie n'avaient « pas beaucoup aidé jusqu'à présent ». « Je pense qu'il s'agit du début » de mesures qui « pourraient aider à la désescalade et à un processus politique », a-t-il espéré.


Pour un diplomate européen, il faut tenter de sortir du « tête-à-tête » entre l'UE et la Russie, qui a des relents de guerre froide, et élargir le cercle par le biais d'une organisation multilatérale, voire d'un pays tiers comme la Chine. « Nous devons parler à Poutine, qui a ses raisons pour ses mauvaises actions », a-t-il estimé.
Parallèlement, l'Allemagne a annoncé que le président russe, Vladimir Poutine, avait accepté lors d'un appel téléphonique une proposition de la chancelière Angela Merkel de création d'une « mission d'enquête » et d'un « groupe de contact » pour entamer « un dialogue politique » sur l'Ukraine.

 

(Commentaire : Qui aura le dernier mot en Ukraine ?)

 

1968
Les experts estiment que la crise ukrainienne représente la plus grave crise entre l'Occident et la Russie depuis la chute de l'URSS en 1991. « Les répercussions sur les relations entre la Russie et l'Occident seront profondes et durables, bien pires qu'après la guerre russo-géorgienne » de 2008, ont estimé les analystes Eugene Rumer et Andrew Weiss de la fondation Carnegie. « Cela rappelle 1968, pas 2008 », soulignent-ils en allusion à la répression du printemps de Prague par l'URSS.


L'annonce de Moscou samedi, après avoir initialement semblé prendre de court les Occidentaux, a provoqué un tollé dans le monde. Principale menace concrète jusqu'à présent, les États-Unis ont averti la Russie qu'elle risquait d'être exclue du G8, dont le prochain sommet doit avoir lieu en juin à Sotchi, la ville des récents JO d'hiver qui ont servi de vitrine à Vladimir Poutine. Le secrétaire d'État, John Kerry, est revenu à la charge hier. « Au XXIe siècle, vous ne vous comportez tout simplement pas comme au XIXe siècle en envahissant un autre pays », s'est-il insurgé. M. Kerry, qui cherche d'habitude des terrains de compromis avec Moscou, s'est montré hier très dur : « Le G8 et quelques autres sont prêts à aller jusqu'au bout pour isoler la Russie en raison de cette invasion. Ils sont prêts à mettre en place des sanctions, ils sont prêts à isoler la Russie économiquement. » D'ailleurs, Washington s'est empressé d'annuler des réunions économiques avec la Russie.

 

(Reportage : « Poutine veut étouffer notre jeune révolution, mais nous sommes prêts »)

 

« Bruit de bottes »
La France et le Royaume-Uni ont suspendu leur participation aux préparatifs de ce G8. « Nous souhaitons d'un ami traditionnel autre chose qu'un bruit de bottes », a lancé le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius. Mais l'UE est divisée. « Le format du G8 est le seul format où nous, les Occidentaux, nous parlons directement avec la Russie et devrions-nous vraiment sacrifier ce seul format ? » a demandé le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier.


La réunion de l'OTAN entrait dans le cadre d'une intense activité diplomatique pour tenter de dissuader la Russie d'intervenir en Ukraine, alors qu'elle a déjà déployé des forces en Crimée. Aujourd'hui, ce sera au tour des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne de se retrouver à Bruxelles, pour leur deuxième réunion d'urgence sur l'Ukraine en dix jours. Un sommet européen des chefs d'État et de gouvernement est même envisagé mercredi, a-t-on appris de sources européennes.

 

(Repère : L'armée ukrainienne, combien de divisions ?)


Pour Jan Techau, de Carnegie Europe, il est peu probable que la réunion d'aujourd'hui débouche sur des décisions dures. Selon lui, il n'y a « pas d'unité » au sein des Européens, qui disposent en outre de « peu d'outils ».
Pourtant, dans les grandes capitales, les Européens font entendre leur voix. Plusieurs centaines de personnes se sont ainsi rassemblées hier devant les ambassades de Russie à Varsovie, à Berlin et à Londres pour protester contre l'intervention russe en Crimée. À Varsovie, les manifestants, agitant des drapeaux polonais, ukrainiens, européens et bélarusses, ont brandi des pancartes comparant le chef de l'État russe Vladimir Poutine à Hitler ou Staline. Ils ont crié : « Touchez pas à l'Ukraine », « Touchez pas à la Crimée », « l'Ukraine libre ».

 

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commentaires (4)

Surtout que ça ne vire pas en une "Guerre de Crimée" bis repetita, SVP !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

13 h 26, le 03 mars 2014

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Surtout que ça ne vire pas en une "Guerre de Crimée" bis repetita, SVP !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    13 h 26, le 03 mars 2014

  • Il est tombé dans le piège ! Pour espérer parvenir à pouvoir "défendre" les russophones de Crimée, il devra alors se débarrasser de ce bääSSyrien Boulet !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 37, le 03 mars 2014

  • IL EST PRIS DANS LES FILETS QU'IL POUVAIT ÉVITER ! ON LUI DIT : TU VEUX CHANTER ? CHANTONS ! TU VEUX TIRER ? TIRONS ! TU VEUX TE DÉCULOTTER AILLEURS ? NOUS NOUS DÉCULOTTERONS ICI ! ET LA DANSE DU DÉCULOTTAGE RESPECTIF VA COMMENCER...

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 17, le 03 mars 2014

  • Quel prétentieux le Fabius ....il a déjà reçu un début de claque diplomatique de la part de Poutine ,qui a choisi Angela Merkel comme interlocutrice en UE , qui seront les perdants...? si d'autre part Poutine se retire du G8...?

    M.V.

    10 h 04, le 03 mars 2014

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