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À La Une - Conflit

Destruction des armes chimiques syriennes : les inspecteurs sur le terrain

Moscou n'exclut pas des négociations entre Damas et des éléments "modérés" de l'opposition armée.

Les inspecteurs de l'ONU ont traversé mardi la frontière libanaise pour la Syrie. STR/AFP

Les inspecteurs chargés de détruire l'arsenal chimique de la Syrie sont arrivés mardi dans le pays pour entamer une opération historique, consistant à se débarrasser en plein conflit d'un stock interdit estimé à un millier de tonnes.

 

Les 20 inspecteurs de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), arrivés lundi à Beyrouth, ont franchi le poste-frontière de Masnaa en milieu d'après-midi. L'équipe chargée de faire appliquer la résolution de l'ONU encadrant la destruction de l'arsenal chimique circulait à bord d'une vingtaine de véhicules tout-terrain blancs, a constaté un photographe de l'AFP.

 

Leur mission est l'une des opérations de désarmement les plus ambitieuses et les plus dangereuses jamais tentées.

La destruction d'un arsenal chimique a déjà été entreprise en Irak et en Libye mais jamais en pleine guerre, or la Syrie s'enfonce chaque jour un peu plus dans un conflit complexe qui a fait plus de 110.000 morts en deux ans et demi.

 

Selon des experts en désarmement, la Syrie possède plus de 1.000 tonnes d'armes chimiques, dont 300 tonnes de gaz moutarde et du sarin, répartis sur environ 45 sites.

 

Le président syrien Bachar el-Assad a affirmé à une chaîne italienne qu'il se conformerait à la résolution de l'ONU, adoptée vendredi de haute lutte et qui constitue une percée diplomatique majeure depuis le début du conflit en mars 2011.

 

"Honte pour l'ONU"

A Paris, des opposants civil et militaire syriens ont une nouvelle fois dénoncé cet accord sur le démantèlement de l'arsenal chimique syrien le qualifiant de "honte pour l'ONU" et "de scandale". "Bachar el-Assad est redevenu quelqu'un de respectable, de légitime", a noté dénoncé Yahia Nanah, chef du conseil provincial d'Alep (nord), structure élue en mars dernier pour tenter d'organiser la vie civile dans cette province du nord ravagée par la guerre.

 

Les inspecteurs de l'OIAC arrivent au lendemain du départ des experts de l'ONU, qui ont enquêté sur sept cas où le régime ou l'opposition ont dénoncé des attaques chimiques, près de Damas et dans le nord de la Syrie. Ils doivent remettre leur rapport fin octobre. Ces experts ont déjà établi que du gaz sarin avait été utilisé à une grande échelle lors de l'attaque du 21 août près de Damas qui a provoqué l'indignation à travers le monde et poussé plusieurs pays, Etats-Unis en tête, à envisager une action militaire punitive.

 

Dans le cadre d'un accord russo-américain évitant ces frappes en imposant le désarmement chimique du pays d'ici mi-2014, les autorités syriennes ont fourni le 19 septembre une liste des sites de production et de stockage des armes chimiques, qui doivent être inspectés dans les 30 jours.

"Pour le moment, nous n'avons aucune raison de douter des informations fournies par le régime syrien", a déclaré un responsable de l'OIAC.

 

Un délai court

Le délai semble toutefois extrêmement court : dix ans après que Tripoli a annoncé sa volonté de se débarrasser de son arsenal chimique, la Libye n'a toujours pas fini le processus. Interrogé par la chaîne italienne Rai News 24 sur la résolution de l'ONU, M. Assad a pourtant assuré : "Bien sûr, nous allons la respecter".

 

Cette résolution appelle aussi à la tenue "le plus tôt possible" d'une conférence internationale à Genève pour amorcer une solution politique, mais son format reste encore à définir.

M. Assad a d'ores et déjà dénié tout rôle à l'Europe : "La plupart des pays européens n'ont pas la capacité de jouer un rôle dans Genève 2, car ils ne possèdent pas les atouts pour réussir dans ce rôle".

Offusqué, le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a assuré avoir obtenu que la Chine, la France et le Royaume-Uni soient associés à l'initiative russo-américaine.

 

La liste des participants syriens pose aussi question. Le chef de l'opposition Ahmad Jarba a dit samedi que la Coalition nationale syrienne était disposée à envoyer une délégation. Mais pour M. Assad, "on ne peut pas parler avec des organisations liées à el-Qaëda (ni) négocier avec des gens qui demandent une intervention militaire en Syrie", en allusion à la Coalition.

 

La Russie a toutefois indiqué mardi que le régime syrien pourrait entamer des négociations de paix avec les éléments modérés de l'opposition armée à la conférence de Genève. "Je n'exclus pas que l'opposition armée, si elle ne se prononce pas pour les extrémistes et n'a pas de visions terroristes, puisse être très bien représentée" à cette conférence dite "Genève-2", a déclaré le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov.

 

Rebelles et opposition réclament en outre le départ du président syrien en condition à la tenue de la conférence.

"Le peuple tout entier demande que Bachar el-Assad soit président, quoi qu'en disent l'opposition, les Américains et les traîtres", a rétorqué mardi devant des journalistes le ministre syrien de l'Information, Omrane al-Zohbi.

Pour le ministre, c'est à M. Assad de décider s'il souhaite se représenter à l'expiration de son mandat en 2014.

 

Sur le terrain, au moins 20 combattants rebelles, dont des jihadistes du Front al-Nosra, ont été tués mardi dans un bombardement des forces du régime visant à ouvrir un axe de ravitaillement militaire entre le centre du pays et la ville d'Alep (nord), a rapporté l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

 

Bombe à effet de souffle contre écoliers

Human Rights Watch a par ailleurs dénoncé mardi le recours par l'armée syrienne aux bombes à effet de souffle contre les civils, dont des écoliers.

Dimanche, au moins 16 personnes, en majorité des lycéens et des enseignants, ont été tuées dans un raid de l'aviation du régime syrien contre un établissement scolaire à Raqa, ville rebelle du nord du pays, selon l'OSDH. L'OSDH a mis en ligne une vidéo particulièrement atroce montrant des corps déchiquetés, l'un d'eux se trouvant sous des livres et des cahiers de classe.

 

Selon HRW, basée à New York, dans l'attaque contre l'école de Raqa, l'armée a eu recours aux bombes à surpression thermobarique ou à effet de souffle. Ces armes "ne doivent jamais être utilisées dans des zones habitées car elles frappent de manière aveugle", a-t-elle souligné. "La nature des blessures dues aux éclats et la chair brûlée visibles sur les victimes, témoignent de l'utilisation de bombes à surpression thermobarique", dit l'ONG internationale.

L'armée syrienne utilise ce type d'armes conventionnelles depuis 2012, selon elle.


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commentaires (3)

Donnons la bienvenue aux inspecteurs en Syrie... Et alleeez, tourner manège!

Ali Farhat

21 h 18, le 01 octobre 2013

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Commentaires (3)

  • Donnons la bienvenue aux inspecteurs en Syrie... Et alleeez, tourner manège!

    Ali Farhat

    21 h 18, le 01 octobre 2013

  • Les inspecteurs ne verront que ce que le boucher de Damas voudra leur montrer. Et ils le savent très bien.

    Robert Malek

    18 h 27, le 01 octobre 2013

  • Et le suspense continue pour une Syrie au sort inconnu . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    12 h 16, le 01 octobre 2013

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