Rechercher
Rechercher

À La Une - Éclairage

Les retombées libanaises de la bataille de Qousseir

Entre Saïda, le Nord et la Békaa, la déstabilisation ambulante se déplace, faisant à chaque fois de nouvelles victimes, qui meurent inutilement à cause à la fois du laxisme de l’État et de la détermination de certaines parties à transposer le conflit syrien au Liban. Il est pourtant clair que ce n’est pas ce genre d’incidents qui poussera le Hezbollah à retirer ses effectifs de Syrie. Le secrétaire général du parti l’a dit et répété, la participation aux combats en Syrie est une sorte de guerre préventive pour empêcher les takfiristes d’avoir des bases au Liban à partir desquelles, selon le Hezbollah, ils se retourneraient contre tout le monde. Dans ce cas, à quoi servent ces incidents ?


Selon une source sécuritaire, chaque région a une fonction particulière. À Saïda, il s’agit de fermer la route du Sud aux partisans du Hezbollah et aux chiites en général pour lancer une fitna qui serait de nature à discréditer définitivement la résistance en la renvoyant à la dimension d’une simple milice chiite. Par contre, au Nord et dans la Békaa, les affrontements ont un autre aspect. Ils seraient en quelque sorte liés à la bataille de Qousseir. En effet, depuis que cette ville a été reprise par l’armée syrienne, les combattants de l’opposition se seraient réfugiés dans le jurd de Ersal, et autour des localités de Yabroud et de Zabadani au sud-ouest de Damas. D’ailleurs, les combats s’intensifient dans cette zone, les forces du régime estimant que pour compléter la victoire de Qousseir et pacifier réellement la capitale et ses environs, il faut contrôler les localités qui l’entourent jusqu’à la frontière libanaise, en passant par le jurd de Ersal. En d’autres termes, la route de Ersal est encore la seule ouverte pour les combattants qui ont fui Qousseir. D’où l’importance pour l’opposition syrienne et ses alliés libanais de maintenir cette route ouverte.

 

La localité de Ersal serait donc en train d’être en quelque sorte prise en otage par l’opposition syrienne et ses alliés, alors qu’une bonne partie de la population est favorable à l’armée. Les incidents qui se multiplient dans cette zone s’inscriraient donc dans ce cadre : pour les uns, il faut à tout prix maintenir la route ouverte pour l’opposition syrienne vers Ersal, et pour d’autres, il faut absolument la fermer. L’embuscade tendue en début de semaine à six jeunes gens venus de Laboué vers Ersal avait donc pour objectif concret de donner une leçon à tous les chiites de la région pour qu’ils ne se risquent plus à emprunter ce chemin, en plus d’amplifier le fossé entre les deux communautés, sunnite et chiite. L’embuscade a abouti à la mort de quatre des jeunes gens, deux de la famille Jaafar, un de la famille Amhaz et un Libanais d’origine turque. Mais il y avait en fait six jeunes gens dont deux ont réussi à s’enfuir, et ils ont pu identifier les assaillants, qui seraient pratiquement les mêmes que ceux qui avaient tué l’officier Bechaalany et le soldat Zahramane il y a quelques mois.


Les commandements du Hezbollah et d’Amal ont très vite réagi pour empêcher que ce grave incident ne prenne de l’ampleur et s’étende à toute la région. Ils se sont rendus auprès des clans Jaafar et Amhaz pour les calmer, et en même temps, les habitants de Ersal ont publié un communiqué pour condamner l’embuscade. Effectivement, dès le lendemain, une délégation de Ersal a assisté aux obsèques des victimes dans une volonté d’apaisement. Mais ceux qui ne veulent pas que le Hezbollah et ses partisans fourrent leur nez à Ersal et cherchent à bloquer la route pour les opposants syriens ne se sont pas calmés pour autant. Hier, ils ont tiré en direction de Laboué, dans une tentative de créer une nouvelle ligne de démarcation entre ce village et Ersal dans le genre de celle qui sépare Jabal Mohsen de Bab el-Tebbaneh à Tripoli. Dans cette optique, les incidents sont donc appelés à se poursuivre dans ce secteur, pour continuer à assurer les arrières des combattants de l’opposition. En même temps, l’armée syrienne (aidée par le Hezbollah) affirme sa volonté de vouloir pacifier cette région du côté syrien, et elle pourrait bien y lancer une offensive, les deux fusées lancées par un hélicoptère syrien sur Ersal pouvant être perçues comme un avertissement...

 

L’armée syrienne a d’ailleurs adressé un avertissement du même genre lorsque ses unités ont pénétré dans le village de Massoudiyé dans la plaine côtière du Akkar pendant quelques heures avant de s’en retirer sans la moindre explication. En même temps, le soudain réveil de la localité côtière de Banias et de ses environs, de l’autre côté du Akkar, pourrait expliquer les incidents qui se multiplient au Akkar et à Tripoli, certains quartiers de la capitale du Nord constituant en quelque sorte « un environnement favorable » pour les combattants de l’opposition syrienne, alors que le Akkar est limitrophe de la Syrie. Des affrontements ont ainsi éclaté il y a quelques jours dans le village de Bebnine (village natal de Khaled Daher) entre la famille Hazzouri et les partisans de Daher. Ces derniers n’ayant pas réussi à chasser de la localité les Hazzouni, considérés proches du PSNS, ils ont dû accepter une réconciliation... sous la houlette de l’ancien député Wajih Baarini, lui-même originaire de Fnaydek. Même chose dans le quartier d’Abou Samra à Tripoli où des affrontements ont éclaté entre la famille Hassoun et les combattants islamistes relevant de cheikh Salem Raféi, de Kanaan Naji et de cheikh Daï el-Islam Chahhal, délimitant ainsi une nouvelle ligne de démarcation occulte. Autre incident, à Halba, où l’armée avait arrêté un élément armé qui avait agressé un de ses barrages, mais les partisans de Khaled Daher se sont aussitôt déployés dans toute la localité, contraignant l’armée à relâcher le contrevenant... Bref, les incidents se multiplient, entre le Nord et la Békaa, toujours sur fond de crise syrienne, mais l’élément nouveau, c’est que, même dans le Nord à grande majorité sunnite, les parties favorables à l’opposition syrienne ne parviennent pas à contrôler la situation. Elles se heurtent de plus en plus à une opposition parfois passive et parfois active, influencée par les résultats de la bataille de Qousseir...

 

 

Lire aussi

Après l’ONU, Sleiman transmet à la Ligue arabe son mémorandum sur les violations syriennes


On reparle d’une nouvelle « aventure » du Hezbollah au Liban-Sud, l'éclairage de Phlippe Abi Akl

 

Ersal presque complètement assiégée ; la rue sunnite en ébullition

 

Entre Saïda, le Nord et la Békaa, la déstabilisation ambulante se déplace, faisant à chaque fois de nouvelles victimes, qui meurent inutilement à cause à la fois du laxisme de l’État et de la détermination de certaines parties à transposer le conflit syrien au Liban. Il est pourtant clair que ce n’est pas ce genre d’incidents qui poussera le Hezbollah à retirer ses effectifs de...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut