La Maison Blanche a estimé jeudi qu'une "ligne rouge" avait été franchie en Syrie et accusé le président Bachar el-Assad d'avoir utilisé des armes chimiques, dont du gaz sarin, annonçant un soutien militaire, sans autres précisions, aux rebelles syriens.
"Après un examen approfondi, la communauté du renseignement (américaine) estime que le régime Assad a utilisé maintes fois des armes chimiques, dont le gaz sarin, à échelle réduite contre l'opposition dans l'année écoulée", a dit jeudi le conseiller adjoint de sécurité nationale du président Barack Obama. "100 à 150 personnes ont péri" dans ces attaques.
Selon Ben Rhodes, M. Obama "a affirmé que le recours à des armes chimiques changerait son équation, et c'est le cas". "Le président a augmenté l'étendue de l'aide non-létale à l'opposition civile, et autorisé l'augmentation de notre aide" à la direction des opérations militaires rebelles alors que Washington s'est jusqu'ici refusé à franchir l'étape de la livraison d'armes.
Il a ajouté que la Maison Blanche n'était pas encore parvenue à une décision sur l'imposition ou pas d'une zone d'exclusion aérienne, une demande de l'opposition syrienne pour contrer la puissance de force aérienne du régime.
(Repère : Armes chimiques en Syrie : un état des lieux)
Mais selon des médias américains, les responsables militaires américains ont proposé au gouvernement de mettre en place pour la Syrie une petite zone d'exclusion aérienne qui couvrirait les camps d'entraînements des combattants de l'opposition. La zone d'exclusion proposée s'avancerait d'environ 40 km à l'intérieur de la Syrie et serait en fait opérée par des avions volant en Jordanie et armés de missiles air-air, selon le Wall Street Journal qui cite sans les nommer des responsables américains. Les militaires estiment qu'une réelle zone d'exclusion au-dessus de la Syrie est extrêmement difficile à mettre en place car il faudrait tout d'abord détruire l'important système de défense anti-aérienne syrien. En revanche, cette petite zone évitant tout survol de la Syrie pourrait être mise en place d'ici un mois, et peut l'être sans résolution du Conseil de Sécurité des Nations unies puisqu'il n'y aura pas de violation de l'espace aérien syrien.
Un responsable américain de la défense a d'ailleurs indiqué à l'AFP que les Etats-Unis vont laisser en Jordanie des chasseurs F-16 et des missiles Patriot, ainsi qu'une unité de Marines sur des navires amphibies, à la fin d'exercices militaires communs.
Une autre mesure proposée pour aider la rébellion prévoit la livraison de petites armes dont des armes anti-chars, écrit le New York Times.
Moscou et Damas dénoncent
La Russie, allié indéfectible du régime de Bachar el-Assad, a immédiatement volé au secours de son protégé vendredi. "Nous le dirons clairement, ce qui a été présenté par les Américains ne nous semble pas convaincant", a déclaré le conseiller diplomatique du Kremlin Iouri Ouchakov. Il a ajouté qu'une décision américaine d'accroître l'aide aux rebelles "compliquera" les efforts de paix, alors que Washington et Moscou tente, avec beaucoup de difficultés, depuis plusieurs semaines de réunir une conférence internationale sur la Syrie.
"La Maison Blanche a fait publier un communiqué truffé de mensonges sur le recours aux armes chimiques en Syrie, en se basant sur des informations fabriquées à travers lesquelles elle a tenté de faire assumer au gouvernement syrien la responsabilité d'un tel usage", a réagi, un peu plus tard, un responsable syrien des Affaires étrangères, cité par Sana. D'après lui, ces accusations interviennent "après des rapports affirmant que les groupes terroristes armés actifs en Syrie (rebelles, ndlr) sont en possession d'armes chimiques mortelles et de la technologie nécessaire pour leur fabrication".
Le responsable syrien a également dénoncé la décision de fournir une aide militaires aux insurgés. "La décision américaine d'armer les groupes terroristes armés démontre (...) l'implication directe des Etats-Unis dans le bain de sang syrien", a-t-il dit. "Cela pose des questions sérieuses concernant leur bonne foi à contribuer à trouver une solution politique à la crise en Syrie", a ajouté le responsable, en référence aux efforts de Washington et de Moscou d'organiser une conférence de paix internationale entre régime et rebelles.
L'opposition syrienne a, elle, salué, dans un communiqué de son bureau aux Etats-Unis, "l'augmentation de l'aide américaine qui comprend un soutien militaire direct".
Le secrétaire général de l'Otan Anders Fogh Rasmussem a, pour sa part, jugé "urgent que le régime syrien laisse l'ONU enquêter sur l'usage d'armes chimiques", qualifiant un tel recours de "totalement inacceptable" et de "violation du droit international". UN porte-parole de l'Union européenne a souligné que l'annonce américaine rend "encore plus important" l'envoi d'une mission de vérification de l'ONU dans ce pays.
La France avait déjà dit être certaine de l'utilisation d'armes chimiques en Syrie et Londres a dit vendredi partager "l'analyse" américaine. Un porte-parole du Premier ministre David Cameron a néanmoins indiqué que la Grande-Bretagne n'a pas encore pris de décision sur la question de la livraison d'armes aux rebelles syriens.
Autant de déclarations qui illustrent les divisions internationales sur le conflit en Syrie pour lequel aucune solution n'est en vue malgré les violences et atrocités commises et qui ont fait plus de 93.000 morts depuis mars 2011 selon l'ONU.
Ces déclarations interviennent alors qu'en Turquie, des pays soutenant l'opposition doivent discuter vendredi avec le chef d'état-major de l'Armée syrienne libre (ASL), Sélim Idriss, d'une "mise en oeuvre concrète" de l'aide à la rébellion, une réunion qui était prévue avant les dernières accusations américaines.
Sur le terrain
Les rebelles ont par ailleurs pris le contrôle d'une position stratégique de l'armée à mi-chemin entre Damas et Alep (nord), tuant six soldats et s'emparant d'armes et munitions. Les médias pro-régime avaient affirmé dimanche que les troupes gouvernementales se préparaient justement à l'assaut d'Alep pour y écraser la rébellion.
Sur un autre front, l'armée et le Hezbollah libanais ont pris d'assaut le village de Husseiniyé, dans la province de Homs (centre), selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Husseiniyé se situe près de la région de Qousseir, tombée la semaine dernière aux mains de l'armée grâce notamment au Hezbollah, dont la participation au conflit qui a fait plus de 93.000 morts selon un nouveau bilan de l'ONU est dénoncée par les pays occidentaux et du Golfe. Elle exacerbe en outre les tensions confessionnelles en Syrie, pays à majorité sunnite, mais aussi au Liban.
En Egypte, d'influents oulémas sunnites venant de plusieurs pays arabes ont appelé à mener le jihad en Syrie contre le régime "confessionnel" de Bachar el-Assad, et dénoncé l'appui fourni par le Hezbollah.
(Lire aussi : L’agression de l’armée syrienne contre Ersal vivement condamnée par Sleiman et le 14 Mars)
Dans un nouveau rapport, la Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme Navi Pillay a dénoncé "les tueries incessantes" en Syrie. Hormis les morts, elle a fait état "d'enfants torturés et exécutés, mais aussi de familles entières (...) massacrées". "Ces cas et le bilan très élevé de morts sont un terrible rappel du tour particulièrement vicieux qu'a pris le conflit", a déploré Mme Pillay.
Enfin, l'ONU a annoncé avoir demandé au gouvernement autrichien d'étaler jusqu'à la fin juillet le retrait de ses Casques bleus du plateau du Golan --décidé à la suite de combats entre l'armée syrienne et les rebelles--, afin de faciliter leur remplacement.
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"Après un examen approfondi, la communauté du renseignement (américaine) estime que le régime Assad a utilisé maintes...
Enfin ! Qu'ils le dégagent à cet aSSadiot et qu'on en finisse ! !
15 h 13, le 14 juin 2013