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À La Une - Entretien

Tammam Salam à « L’OLJ » : Je ne serai complaisant avec personne

Le Premier ministre désigné ne veut visiblement jouer le jeu d’aucune partie.

Tammam Salam félicité le 4 avril 2013 chez lui à Beyrouth. AFP PHOTO / ANWAR AMRO

Tammam Salam sait bien que sa tâche ne sera pas des plus faciles. Devant ses visiteurs à Mousseitbé et devant les médias, il rappelle souvent la nécessité « d’aboutir à une vision commune du Liban ». Ayant obtenu l’appui de 124 députés sur un total de 128, il doit bien se demander comment faire pour être à la hauteur des attentes du grand public. En effet, le consensus rare dont il a bénéficié peut fort bien se révéler une arme à double tranchant, vu la besogne ardue de satisfaire toutes les factions libanaises, au risque même de ne plus gouverner. Les exemples des consensus qui ont paralysé la démocratie au Liban ne sont que trop nombreux.
Pourtant, M. Salam se veut optimiste et serein. Dans un entretien hier à L’Orient-Le Jour, il s’est estimé « fort de ce consensus réconfortant ». « Réussir ma mission n’est pas une responsabilité qui repose sur mes épaules, a-t-il dit, mais sur celles des gens qui m’ont mené jusque-là.» S’étant déclaré samedi comme étant un indépendant allié du 14 Mars, Tammam Salam s’attend pourtant à ce que ces forces soient compréhensives à l’égard de son rôle de rassembleur. « Je ne doute pas que le 14 Mars est prêt à collaborer pour aboutir à une véritable unité nationale, a-t-il ajouté. Mais cela ne veut pas dire pour autant que je serai complaisant avec le 8 Mars. Moi, je ne serai complaisant avec personne. »


Concernant l’élaboration d’une nouvelle loi électorale, M. Salam a estimé « difficile » la tenue des élections le 16 juin, comme l’espère le ministre démissionnaire Marwan Charbel, « puisqu’aucun substitut à la loi de 1960 n’a encore été trouvé ». Le Premier ministre désigné a indiqué par ailleurs qu’il ne mettra pas de veto sur le projet de loi dit orthodoxe, comme l’avait fait son prédécesseur Nagib Mikati, même s’il s’oppose « personnellement » à cette loi. « La question autour de la loi orthodoxe ne m’est pas posée actuellement, a-t-il dit. Elle repose entre les mains du Parlement où je suis moi-même député. Au sein du gouvernement, il est de mon devoir de prendre en considération toutes les propositions. À la Chambre, je suis l’allié d’une partie politique qui dénonce cette loi et la refuse, et c’est au Parlement que j’exprimerai mon opinion à l’égard de ce texte qui, à mon avis, ne sert pas le Liban et son unité nationale. »


Sur un autre plan, M. Salam a jugé « normal » que chaque partie politique présente sa vision du prochain gouvernement, indiquant finalement que « le genre, le nombre de ministres et la représentation féminine sont des caractéristiques du nouveau cabinet qui seront décidées uniquement à la lumière des concertations qu’il entreprendra ». Il a pourtant souhaité une meilleure représentation féminine au sein de la nouvelle équipe, notant finalement qu’« il ne faut pas oublier que le rôle de ce gouvernement est d’assurer la tenue des législatives, processus qui se concrétisera par une meilleure situation économique et touristique dans les mois à venir ».
En réponse à une question concernant les armes du Hezbollah, M. Salam a affirmé que « la résistance contre Israël est légitime, mais que la décision de guerre et de paix devrait être du ressort de l’État libanais uniquement ». « Tant que les armes ne sont pas dirigées vers l’intérieur, elles ne posent pas de problème, quitte à réglementer leur usage par le biais d’une stratégie de défense complète », a-t-il dit.


Le Premier ministre désigné avait reçu hier plusieurs délégations populaires ainsi que des personnalités politiques et diplomatiques, venues le féliciter pour sa récente désignation. Il avait rencontré dans ce contexte l’ambassadeur de l’Iran, Ghandanfar Rokon Abadi, qui a rapporté à son hôte l’appui de la République islamique au Liban, à sa sécurité et sa stabilité, l’appelant à « veiller sur la Résistance ». « Cela n’est pas nouveau, je prendrai son avis en considération », a déclaré en réponse M. Salam.

Le défilé des visiteurs
Parmi les visiteurs, aussi, le député Nohad Machnouk, le ministre démissionnaire Gaby Layoun, une délégation du Parti national libéral et l’ambassadeur de Russie, Alexander Zasypkin, qui a confirmé le soutien de son pays à sa désignation et déclaré : « Nous sommes en faveur de la neutralité du Liban face aux événements de Syrie, en ce qui concerne notamment la non-utilisation du territoire libanais pour le trafic des armes et le passage des combattants aux frontières. » Le Premier ministre désigné a de même reçu un message de félicitations du monarque saoudien Abdallah ben Abdel Aziz. Il a enfin reçu un appel téléphonique du patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, et du chef des Forces libanaises, Samir Geagea. Il convient de signaler que M. Salam n’a eu aucun contact avec l’ambassadeur de Syrie, Ali Abdel Karim Ali, et qu’il avait affirmé samedi « être en faveur de la liberté du peuple syrien » et de la politique de distanciation de son prédécesseur, « quitte à ce qu’elle soit réellement respectée ».

 

(Portrait : Tammam Salam, « le fils de deux pactes »...)

Un gouvernement « d’intérêt national »
Peu après avoir été chargé de former un gouvernement par le président de la République Michel Sleiman, Tammam Salam s’était engagé depuis Baabda samedi « à sortir le Liban des divisions politiques qui se sont répercutées sur le plan de la sécurité, à éloigner les dangers nés de la situation tragique dans le pays voisin et à former un gouvernement d’intérêt national pour le bien du Liban ». Il a aussi appelé à l’adoption d’une loi électorale qui garantirait une « représentation équitable de toutes les parties, le plus vite possible ».


« J’ai accepté la nomination, convaincu que mon devoir est d’œuvrer pour l’intérêt du pays, en coopération avec toutes les parties politiques », a-t-il dit. « Je suis conscient qu’il s’agit d’une période sensible, qu’il y a des échéances importantes et j’espère poursuivre les consultations avec les dirigeants politiques dans les prochains jours en vue de former un nouveau gouvernement », a-t-il ajouté. Plus tard dans la soirée, il a exprimé l’espoir de former un cabinet composé de ministres qui ne soient pas candidats aux prochaines élections. « J’espère que le consensus apparu autour de ma nomination ne faiblira pas lors de la composition du cabinet », a-t-il dit, refusant de se prononcer sur la nature du prochain gouvernement. « Personne ne peut m’imposer quoi que ce soit et je ne vais rien imposer à personne », a-t-il encore ajouté.


Hier, il a évoqué un consensus international et régional pour « aider le Liban à traverser cette période difficile ». Il a réitéré son refus de « recourir à tout esprit vindicatif politique lors de la formation du gouvernement ». « Nous sommes d’accord avec le député Michel Aoun sur ce plan », a-t-il précisé. Concernant le monopole exercé par certaines parties sur des ministères bien définis, le nouveau Premier ministre a assuré que « cette attitude constitue une hérésie sans fondement constitutionnel ni juridique ». Il a enfin établi une différence entre les « quotes-parts des courants politiques et celles des confessions », soulignant que tous les sujets restent à discuter.

 

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