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À La Une - Initiative

Ressusciter le patrimoine architectural libanais... en miniatures

Anwar Hassan, jeune sculpteur, veut préserver la mémoire des maisons traditionnelles dans leurs moindres détails.

Le sculpteur libanais Anwar Hassan à l’œuvre.

Dans le fracas des marteaux piqueurs, la ronde des bulldozers et le ballet aérien des grues, Beyrouth se transforme : les petites maisons aux toits rouges, qui faisaient autrefois le charme de la capitale libanaise, sont rasées l’une après l’autre, cédant la place à des tours vertigineuses qui poussent comme des champignons. Face à ce « massacre » orchestré en toute légalité, en raison de l’absence d’une politique publique pour la sauvegarde de l’architecture patrimoniale, un jeune sculpteur libanais ose encore rêver.
Depuis son appartement à Dekouané, Anwar Hassan, 35 ans, tente, du bout de ses dix doigts, de ressusciter ces petits joyaux de maisons... par la miniature.
« Comme nous sommes incapables de sauver ces vieilles maisons traditionnelles de la destruction, nous pouvons au moins, avec ces miniatures, préserver leur mémoire, comme des pièces d’antiquités », explique Anwar. Ses modèles, réalisés à l’échelle 1/50e, respectent tout le raffinement des maisons ancestrales jusque dans les moindres détails : forme générale en cube, triple arcade, toit de tuiles rouges à quatre versants, balcon, jardin et arrière-cour.
Pour encore plus d’authenticité, Anwar utilise des matériaux naturels, à base de pierre, de sable, de terre et de bois, pour la réalisation de ses maquettes.

 


Photo Anwar Hassan

 

Des maisons mal entretenues ou abandonnées
« Pour moi, il ne s’agissait pas de copier des modèles déjà existants de maisons individuelles traditionnelles, explique Anwar. Je me suis évidemment inspiré de leur style architectural, mais leur conception est tout à fait originale. » « J’ai voulu aussi ajouter des éléments modernes, comme une voiture à l’entrée et des lampes électriques à l’intérieur, pour leur redonner vie et les adapter à notre époque contemporaine, ajoute-t-il. Malheureusement, le peu de ces maisons qui existent encore dans la montagne ou dans les villes sont soit abandonnées, soit mal entretenues, comme si elles ne pouvaient pas être compatibles avec la modernité... ».
La lutte pour la sauvegarde du patrimoine est passée à la vitesse supérieure après la guerre civile. En 1996, l’ancien ministre de la Culture Michel Eddé ordonne le gel de la démolition de 1 016 maisons beyrouthines répertoriées par l’Association pour la protection des sites et anciennes demeures au Liban (Apsad). Cette décision louable a pourtant des effets pervers. Effrayés par le volontarisme du ministre, plusieurs propriétaires, redoutant de voir leur maison classée, s’empressent de détruire les bâtisses pour vendre leur terrain à des promoteurs immobiliers.
Dix ans plus tard, le gouvernement propose au Parlement un nouveau projet de loi pour sauvegarder les bâtiments anciens, mais le projet reste lettre morte. Selon l’association Save Beirut Heritage, en 1986, 2 400 maisons beyrouthines étaient inscrites sur la liste nationale du patrimoine à préserver. En 2012, il ne reste plus que 240 maisons sur cette liste, des dizaines de bâtisses ayant été sorties de la liste ou détruites.

 


Photo Anwar Hassan

Le contact avec la nature sacrifié
Originaire de Aatrine, un petit village du Chouf, au sud-est de Beyrouth, Anwar dit avoir eu l’idée de créer ces miniatures à son retour de Dubaï où il a vécu pendant sept ans. « J’ai été très choqué par l’ampleur des démolitions à Beyrouth, confie le jeune homme. Le patrimoine architectural a été complètement sacrifié au profit d’immeubles de luxe hors de prix et les quelques espaces verts qui restaient ont complètement disparu. C’est comme si les Libanais avaient perdu le contact avec la nature qui fait toute la beauté de leur pays. »
Pour Anwar, le gouvernement n’est pas l’unique responsable de cette « tragédie ». « Il y a certes un problème d’aménagement urbain au Liban, mais tous les Libanais sont à blâmer pour la disparition de notre patrimoine, dit-il. Ils préfèrent payer plus d’un demi-million de dollars américains pour vivre dans de petits appartements, comme en prison, alors qu’ils peuvent aisément, avec 60 000 dollars, construire leur propre maison individuelle traditionnelle. »
Avec déjà près d’une dizaine de miniatures à son actif, le jeune sculpteur espère en faire une exposition « pour sensibiliser le public à l’importance de préserver notre richesse architecturale ».
Passionné par l’histoire et le patrimoine, Anwar compte aussi se pencher sur les « quartiers traditionnels » de Beyrouth, comme Gemmayzé, Monnot ou Mar Mikhaël. « Ce n’est plus une question d’une ou de deux vieilles maisons qui disparaissent de temps à autre, explique-t-il. C’est tout un quartier qui est défiguré, toute une mémoire effacée... ».

Pour plus d’informations sur les œuvres d’Anwar, visitez la page Facebook « Lebanese traditionnal houses » ou le groupe « Artotchka » .


 

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Regard sur l’héritage architectural à travers « Les balustrades de Beyrouth »

 

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