Rechercher
Rechercher

Culture - Événement

Le 32e Salon du livre de Paris sous le signe du Japon

C’est sous le signe du Japon, pays invité d’honneur, que s’est déroulée la 32e édition du Salon du livre de Paris, avec plus de 50 éditeurs et 20 auteurs japonais venus faire découvrir au public français la richesse d’une littérature associant modernité et tradition.

Kenzaburô Ôé.

Dès le premier jour, l’immense hall des expositions de la Porte de Versailles a été pris d’assaut par une foule dense et motivée, malgré une entrée fixée à 9,50 euros cette année. Une telle affluence traduit bien la fascination qu’exercent les lettres japonaises sur l’esprit français, du roman au manga et du haïku à l’essai. Elle atteste aussi de la solidarité de la France avec un pays dévasté, il y a un an, par le tsunami qui a ravagé la province de Miyagi et dont le deuil a été partagé par la planète entière. Jean-François Colosimo, président du Centre national du livre, explique qu’«il y allait de l’honneur de notre amitié séculaire que Paris accueillit, un printemps plus tard, la littérature japonaise, pour dire l’irréductible vitalité d’une culture gémellaire. C’était aussi justice». Et de rappeler que sur les 300 titres japonais traduits par les éditeurs français en 2010, une grande partie l’a été grâce à l’aide du CNL.
L’ « île de Cipango » révélée par Marco Polo revendique 1 500 ans d’écritures, en poésie, prose ou au théâtre. Depuis la naissance du «manga» («croquis» ou «images distrayantes») au XIXe siècle avec le peintre Hokusai parcourant le Japon et l’essor du genre au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l’influence du Japon sur la littérature mondiale ne s’est pas démentie. Avec un champ éditorial dense, il y aurait aujourd’hui au Japon plus d’écrivains vivant de leur plume qu’en France, selon Le Magazine Littéraire, avec des œuvres publiées en «feuilletons» dans les mensuels et quotidiens et un réseau de librairies (15000) et de bibliothèques impressionnant. Aujourd’hui, après deux prix Nobel (Kawabata en 1968 et Ôé en 1994), l’île du Soleil-Levant se prend à rêver à un 3e prix allant à Haruki Murakami, l’auteur du best-seller mondial en trois tomes 1Q84. Cette vitalité des lettres japonaises s’est exprimée pendant trois jours à Paris, avec ses représentants de toutes générations, aux premiers rangs desquels Kenzaburô Ôé, figure phare de la littérature mondiale. De nombreuses rencontres avec les auteurs invités ont permis de décortiquer l’écriture japonaise et son rapport au monde et à l’Occident, ses combats, face notamment aux catastrophes naturelles et aux questions existentielles suscitées par celles-ci, et ses perspectives d’avenir avec «l’invasion» du numérique et les mutations d’une société de plus en plus hédoniste.
Aux côtés du Japon, Moscou était aussi la ville invitée du Salon. Après Buenos Aires en 2011, le choix de Moscou s’inscrit dans la continuité de l’Année France-Russie et célèbre la littérature «croisée». 17 auteurs russes (comme Boris Akounine, Mikhaïl Chichkine, Zakhar Prilepine), romanciers, poètes, essayistes, chroniqueurs, ont présenté leurs œuvres, ayant pour principal sujet d’inspiration la ville de Moscou. Des illustrateurs et dessinateurs argentins (José Munoz, Napo, Liniers, Guillermo Mordillo) ont, de leur côté, montré combien Buenos Aires était une terre d’expression graphique d’une grande richesse, à travers les bandes dessinées, dessins satiriques ou romans graphiques qui étaient présentés sur les différents stands d’éditeurs.
La particularité de ce Salon est d’avoir organisé, en parallèle, des dialogues sur le thème «l’Europe philosophe», avec des intellectuels venus de divers pays européens (tels Alain-Gérard Slama, Toni Negri, Heinz Wismann, Raffaele Simone) afin de débattre avec leurs homologues français (notamment Pascal Bruckner, Rémi Brague, Alain-Gérard Slama) des questions relatives à l’identité européenne, à l’État social, à la transparence en démocratie, au capitalisme, à la crise, aux nationalismes et aux valeurs religieuses. Autant de sujets qui interpellent les sociétés occidentales, mais aussi l’homme contemporain, ce qui explique qu’ils aient fait salle comble pour l’occasion.
Bien entendu, les grosses pointures de la littérature française étaient également au rendez-vous, pour des rencontres et des signatures, parmi lesquels Jean d’Ormesson, Katherine Pancol, Maylis de Kerangal, Delphine de Vigan, Emmanuel Carrère, Dominique Fernandez, Claude Hagège, pour ne citer que ceux-là, auteurs de romans ou érudits distingués.
Cette grand-messe de la littérature française et francophone a été l’occasion, pour le ministère des Affaires étrangères, de rappeler les missions et les programmes mis en œuvre pour promouvoir le livre français à l’étranger et les littératures étrangères en France. Il s’agit principalement de soutenir «une forte présence à l’étranger avec 60 bureaux du livre à travers le réseau culturel de la France dans le monde», de mener «une politique en faveur de l’édition et de la traduction», avec un budget global de 5,8 millions d’euros, d’apporter «un soutien aux auteurs dans leur démarche de création: plus de 50 auteurs français ont pu porter leur projet d’écriture et obtenir des succès internationaux, et près de 500 auteurs français sont invités chaque année à participer à des rencontres littéraires dans le monde», d’assurer «la promotion des littératures du Sud et le soutien aux structures éditoriales des pays francophones» et, enfin, de recourir à «l’usage du numérique pour mieux diffuser les ouvrages français traduits et publiés dans plusieurs langues étrangères». C’est ainsi que, lors du Salon, l’Institut français (relevant du ministère des AE) a présenté deux plateformes numériques: IF Verso et Culturethèque.
Ce 32e Salon du livre à Paris a donc, à bien des égards, témoigné d’un véritable dynamisme de la langue et de l’édition en français, et de son rayonnement continu dans le monde, à travers un échange culturel des plus fructueux entre les individus et les peuples. La langue française apparaît plus que jamais comme le creuset dans lequel se déploient les sensibilités, les croyances et le cheminement humain et culturel des peuples.
Dès le premier jour, l’immense hall des expositions de la Porte de Versailles a été pris d’assaut par une foule dense et motivée, malgré une entrée fixée à 9,50 euros cette année. Une telle affluence traduit bien la fascination qu’exercent les lettres japonaises sur l’esprit français, du roman au manga et du haïku à l’essai. Elle atteste aussi de la solidarité de la France...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut