Rechercher
Rechercher

Couverture spéciale de la révolte en Libye - Reportage

L’arsenal de Kadhafi menacé de dispersion

Les risques sont « évidents » que les armes abandonnées puissent tomber entre les mains d’el-Qaëda au Maghreb islamique.
Dans la débâcle qui a suivi la prise de Tripoli, il y a deux semaines, les troupes fidèles à Mouammar Kadhafi qui campaient dans un champ aux abords de Tripoli y ont abandonné leurs uniformes, un flacon de déodorant... et un missile Scud. Plusieurs jours après, l’engin de fabrication soviétique et sa rampe de lancement montée sur un camion se trouvaient toujours au même endroit, sans protection, sous l’eucalyptus où les militaires les ont laissés. Le Conseil national de transition (CNT) assure faire le nécessaire pour éviter que ce type d’armes ne tombe entre des mains malveillantes, comme celles d’el-Qaëda au Maghreb islamique. Dans ce champ situé à 25 km de la capitale, le missile semble toutefois avoir été laissé à la merci des pillards.
« Je patrouille là-bas (...) et une autre équipe fait de même », assure Abdelhamid Omar Derbek, colonel des forces du CNT dont la tenue – polo jaune, jean et sandales – tranche avec le grade. L’officier, kalachnikov en bandoulière, a accompagné des journalistes sur le site en question, situé à 15 km de son quartier général, et personne, hormis quelques curieux, ne se trouvait sur les lieux pour assurer la garde du missile. « J’en ai entendu parler hier soir et je voulais venir pour prendre une photo », a expliqué l’un des badauds.
Un missile Scud, engin de 11 mètres dont la portée peut atteindre 300 km, serait une prise de choix pour la guérilla islamiste. Sans même parler d’un démantèlement en bonne et due forme, son ogive recèle jusqu’à une tonne d’explosifs, ce qui permettrait la fabrication de nombreuses bombes artisanales. « Le risque existe sans doute », reconnaît Shashank Joshi, un expert britannique du Royal United Services Institute. « L’Algérie a été terrifiée tout au long de ce conflit par la perspective de voir des stocks d’engins explosifs quitter la Libye et tomber entre les mains d’el-Qaëda au Maghreb islamique », rappelle-t-il. Un tir de missile suppose des connaissances techniques que les activistes islamistes pourraient acquérir, mais les propergols liquides très corrosifs qui propulsent ce genre d’engin sont stockés à part et rien ne signalait leur présence dans ce champ des abords de Tripoli. Après le départ de l’Armée rouge en 1989, des moujahidine afghans, dont certains ont rejoint les rangs d’el-Qaëda, s’étaient emparés de missiles Scud qu’ils avaient appris à lancer. « Il est clair que des insurgés peuvent parfois utiliser des missiles Scud », confirme Shashank Joshi.
Agostino Miozzo, qui représente l’Union européenne à Tripoli, s’est également inquiété des risques de dispersion des armements abandonnés par les hommes de Kadhafi, parlant d’un « risque évident ». Le CNT a fait de la sécurité de cet arsenal l’une de ses priorités. Accaparé par la recherche du « guide la révolution » et la prise de ses derniers fiefs, ses capacités en la matière sont toutefois limitées pour le moment. « Bien sûr, nous sommes dans un État en guerre et Kadhafi a évidemment laissé des armes et des mines », a reconnu la semaine dernière le général Omar Hariri, membre de l’état-major du CNT. « Nous avons un groupe d’ingénieurs militaires spécialisés dans la recherche de telles armes et de telles mines, et leur collecte n’est qu’une question de jours. Nous sommes toujours en guerre, c’est donc tout à fait normal », a-t-il ajouté.
©Reuters
Dans la débâcle qui a suivi la prise de Tripoli, il y a deux semaines, les troupes fidèles à Mouammar Kadhafi qui campaient dans un champ aux abords de Tripoli y ont abandonné leurs uniformes, un flacon de déodorant... et un missile Scud. Plusieurs jours après, l’engin de fabrication soviétique et sa rampe de lancement montée sur un camion se trouvaient toujours au même endroit, sans...