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Couverture spéciale de la révolte en Libye - Reportage

Les Libyennes font leur révolution à coups de balai

« Si j’avais pu prendre une arme, je l’aurais fait, mais le balai a pour moi le même poids »...

Des femmes de ménage, des fonctionnaires ou des femmes d’affaires se donnent rendez-vous tous les jours à Tripoli pour balayer les rues ou peindre des fresques sur les murs de la capitale libyenne.

Elles se retrouvent place al-Qadissiah armées de balais ou de pots de peinture avant de se répandre dans la ville.

« On a commencé notre campagne samedi et on va la mener pendant une semaine », indique Nemaa Aribi, 52 ans, en ramassant les ordures rue du Chatt. « Je viens avec ma famille participer à la révolution. Si j’avais pu prendre une arme, je l’aurais fait, mais le balai a pour moi le même poids », dit cette enseignante en ajustant son voile.

Tripoli s’est couverte d’ordures après l’entrée des combattants luttant contre Mouammar Kadhafi le 20 août dans la ville et la chute de sa forteresse de Bab al-Aziziya, trois jours plus tard.

Après la fête du Fitr marquant la fin du mois de jeûne musulman du ramadan il y a deux semaines, une partie des éboueurs ont repris le travail. Mais comme il s’agit pour la plupart d’immigrés dont une partie a fui le conflit, la ville n’a pas été débarrassée totalement de ses déchets.

« C’est un nouveau départ car nous sentons maintenant que ce pays est le nôtre », dit Mme Aribi à propos de l’initiative de son groupe de femmes. Elle montre de ses mains gantées un hôtel proche habité par les journalistes étrangers en déclarant : « Nous voulons montrer au monde que nous sommes un peuple civilisé qui aime la propreté et qui est fier de son pays. »

L’une de ses poches, Marwa Aribi, 19 ans, s’échine contre les bouteilles en plastique en se faisant féliciter par les automobilistes qui passent. « Nous devons donner quelque chose à ce pays. Avant la révolution, on n’avait aucun patriotisme mais on ressent maintenant une responsabilité envers notre cité », souligne cette étudiante dans une école d’ingénieurs, qui insiste pour que les journalistes « voient un beau visage de Tripoli – et nous aussi ». Selon elle, « les Tripolitaines n’auront plus peur de rien à l’avenir et vont crier fort pour défendre leurs droits et leur pays ».

Un autre membre de la famille, Tahar Aribi, 55 ans, dirige des jeunes en leur expliquant comment ramasser les ordures et les entasser dans des bennes. Ce pilote de la compagnie nationale Libyan Airlines explique que les habitants de Tripoli sont devenus « plus amicaux depuis la libération », assurant que « l’avenir de la Libye se lit dans le regard des jeunes ».

Il poursuit que la participation de sa femme, de ses filles et de ses proches à la campagne symbolise « la liberté retrouvée de la femme qui lève désormais haut la tête dans un pays qui n’est plus celui d’un seul homme », dans une référence claire au régime déchu dans lequel Mouammar Kadhafi, aujourd’hui en fuite, réglait à lui seul le sort de tous les Libyens.

D’autres femmes ont choisi d’embellir les murs de la capitale qui n’ont porté pendant quatre décennies que les slogans de propagande du régime Kadhafi.

Rana Tikli, 18 ans, peint pas loin de Bab al-Aziziya. Hissée avec d’autres sur un échafaudage, elle trace les couleurs de la révolution, noir, vert, rouge et blanc, et dessine des caricatures du leader déchu en fuite.

« Je vais peindre le drapeau libyen traversant une tête de Kadhafi », lance-t-elle.

« Nous voulons dire qu’on a tué Kadhafi, du moins psychologiquement », ajoute-t-elle, en regardant une fresque montrant l’ancien dirigeant jeté par une femme dans une « poubelle de l’histoire » pleine de dirigeants nazis, de rats et de copies de son Livre vert.

« Nous respirons maintenant un air de liberté », dit sa petite sœur Camilla.

 

(Source : AFP)

Des femmes de ménage, des fonctionnaires ou des femmes d’affaires se donnent rendez-vous tous les jours à Tripoli pour balayer les rues ou peindre des fresques sur les murs de la capitale libyenne.
Elles se retrouvent place al-Qadissiah armées de balais ou de pots de peinture avant de se répandre dans la ville.
« On a commencé notre campagne samedi et on va la mener pendant...