Rechercher
Rechercher

Économie - Liban - Éclairage

Immobilier : face aux prix sur le marché, les jeunes n’arrivent plus à se loger

Avec un marché immobilier stagnant, des prix qui ne fléchissent pas et surtout un choix très restreint d’appartements dont la taille et le prix correspondent au budget recherché, acquérir un logement devient une épreuve de plus en plus pénible pour nombre de jeunes couples désirant s’installer.

Malgré une baisse des ventes, l’activité de construction se poursuit, témoignant d’un engouement des investisseurs face à des expectatives de demande soutenue à long terme.


Le marché mondial de l’immobilier peine à se remettre de la crise économique et les jeunes en sont aujourd’hui les premières victimes. À Tel-Aviv, par exemple, ils sont des milliers, depuis plusieurs jours, à avoir planté leurs tentes sur le boulevard principal de la ville pour protester contre la flambée des prix de l’immobilier. Sans manifestations de rue, la jeunesse libanaise connaît une situation tout aussi préoccupante, et acquérir un logement devient mission impossible pour beaucoup.
« Il nous a fallu plus d’un an de recherche quotidienne intensive entre le jour où mon fiancé et moi avons décidé d’acheter un appartement et la signature de la promesse de vente... et nous avons eu beaucoup de chance ! » racontent Ani, 26 ans, et Sebouh, 29 ans. Ces deux jeunes salariés gagnent à eux deux plus de 3 000 dollars. Leur budget pour un appartement est de 150 000 dollars. À ce prix, ils savaient qu’ils ne pourraient jamais vivre à Beyrouth, leur ville natale mais aussi de travail. « Pour un jeune couple comme nous, qui doit payer son appartement par ses propres moyens, limités, cette étape relève du parcours du combattant », poursuit Ani. Le premier obstacle auquel le couple va faire face est celui de la taille des appartements disponibles sur le marché. Le choix est très restreint pour les petites surfaces de moins de 200 m². Et une fois la perle rare trouvée, il faut pouvoir la payer, et c’est là que les choses se compliquent. Ani se rappelle : « Nous avons décidé d’emprunter auprès de l’Établissement public de l’habitat (EPH), qui est plus avantageux que les banques commerciales, mais dont les conditions sont très strictes : l’immeuble doit déjà être construit, le titre de propriété ne doit être soumis à aucun litige, le prêt ne peut dépasser un certain seuil, le salaire des acheteurs doit être supérieur à 2 000 dollars... Ajouté à cela, il faut que le propriétaire accepte d’attendre de longues semaines avant le paiement, le temps que tous les papiers soient en règle. Beaucoup se désistent dès qu’ils savent qu’ils ont affaire à un couple qui emprunte à l’EPH. »
« De plus en plus de jeunes couples pressés de se marier et incapables d’acheter à Beyrouth ou en banlieue cherchent des appartements dans des villages autrefois réservés à la saison estivale. Ils sont prêts à faire plus de deux heures de route pour aller travailler », souligne Salamé Salamé, membre du syndicat des experts immobiliers au Liban.

Les prix résistent à la baisse
Pourquoi en est-on arrivé là et quelles sont les particularités du marché immobilier libanais ? Durant les trois dernières années, alors que l’immobilier s’effondrait outre-mer, au Liban les prix à la vente avaient atteint des sommets inégalés, soutenus par une très forte demande. « Depuis quelques mois, le marché immobilier stagne car les gros acheteurs étrangers (diaspora libanaise et investisseurs du Golfe) prennent leur temps avant de se décider à acheter », explique Joe Kanaan, le PDG de Sodeco Gestion. Aujourd’hui, les invendus se multiplient, surtout pour les grands appartements de plus de 800 000 dollars. Selon une étude réalisée par Ramco, 46 % des immeubles terminés en 2010 à Achrafieh ont encore des appartements à vendre.
Mais ces chiffres cachent une réalité complexe, car même si la demande effective (ventes réalisées) sur l’immobilier est en baisse (17 % de ventes en moins en 2011), le besoin et la volonté de se loger ne faiblissent pas. Cette situation découle en partie du fait que la demande, altérée par le niveau élevé des prix, s’est orientée davantage vers les petits espaces, encore minoritaires sur le marché. « Aujourd’hui, plus de 60 % de la demande proviennent des résidents libanais à la recherche d’appartements de petite taille à des prix ne dépassant pas les 500 000 dollars. Mais sur 400 immeubles en construction, à peine 20 % proposent de petits espaces. L’offre immobilière est en total décalage avec la demande », explique Guillaume Boudisseau, consultant immobilier à Ramco.
On arrive donc à une impasse : ceux qui disposent de moyens (acheteurs étrangers et diaspora libanaise) préfèrent attendre des jours meilleurs pour passer à l’acte, et ceux qui veulent acheter ne trouvent pas d’appartement adapté à leur budget. Comment expliquer alors que face à cette stagnation du marché, les prix ne fléchissent pas ? « En réalité, les prix baissent, surtout pour les grandes surfaces invendues, mais les promoteurs ne l’annoncent pas, ils préfèrent négocier avec l’acheteur au cas par cas, et la baisse varie entre 10 et 20 % généralement », confie Joe Kanaan, de Sodeco Gestion. Cela reste cependant très ponctuel et la résistance des prix à la baisse est en partie due à la hausse des prix des matières premières, à la pénurie de terrains constructibles dans le pays, mais aussi aux expectatives d’une demande soutenue à long terme d’une population qui augmente et d’une riche diaspora libanaise qui souhaite avoir un pied-à-terre dans son pays d’origine.
La solution miracle ? Mansour Mjaes, agent immobilier à Dhour Choueir, semble l’avoir trouvée. « Étant donné les prix extrêmement élevés des terrains constructibles, il serait intéressant que chaque communauté religieuse vende quelques-unes de ses propriétés (wakfs) pour y construire des logements adaptés aux jeunes à des prix largement inférieurs à ceux du marché ». Mais en attendant que cette proposition voie le jour, la situation n’est pas désespérée, estime l’économiste Nassib Ghobril. Dans plusieurs pays européens, l’État intervient sur le marché immobilier en construisant des logements sociaux et en distribuant des aides financières aux personnes n’ayant pas les ressources nécessaires pour se loger. « Au Liban, la situation est différente et toute intervention publique serait contreproductive car elle fausserait les prix du marché, et l’État n’a aujourd’hui ni les fonds ni l’expertise nécessaires à un tel projet, explique M. Ghobril. Il suffit que les promoteurs immobiliers prennent conscience de la nécessité d’adapter leur offre à la demande. » Cela se traduirait concrètement par la construction de logements qui répondent aux exigences de la population : de petite taille et à des prix raisonnables, « entre 100 et 200 m², à 3 000 dollars le m² en moyenne à Beyrouth et beaucoup moins cher en s’éloignant de la capitale », estime M. Kanaan, de Sodeco Gestion. En attendant que ces petites surfaces soient mises en vente, les jeunes couples devront rajouter la difficile recherche d’un appartement à la longue liste des préoccupations politiques, économiques et sociétales auxquelles ils font face déjà aujourd’hui.
Le marché mondial de l’immobilier peine à se remettre de la crise économique et les jeunes en sont aujourd’hui les premières victimes. À Tel-Aviv, par exemple, ils sont des milliers, depuis plusieurs jours, à avoir planté leurs tentes sur le boulevard principal de la ville pour protester contre la flambée des prix de l’immobilier. Sans manifestations de rue, la jeunesse libanaise...
commentaires (2)

L'utilisation de la terre laisse a desirer. Le gouvernement peut faire beacoup de choses et en meme temps renflouer les caisses de l'etat: Pour eviter que des logements ou terrains ne soient vides ou accapares a des fins speculatives: - Taxe sur la propriete fonciere (j'entends deja les pas touche) proportionnelle a la valeur des terrains - De meme Taxe sur les biens immobiliers excepte le logement principal d'une famille. Ca mettra la barre encore plus haut pour les expatries et etrangers qui veulent avoir un pied a terre et ca decouragera la pratique d'avoir plus qu'un logement. - Revoir la loi sur le droit des etrangers a acheter de l'immobilier au Liban Pour controler les constructions sauvages - zoning strict (sans wasta) pour appartements, zone commercante, zone agricole etc. - Quota sur les permis du luxe Je ne parlerais pas du developpement des campagnes pour que les habitants y restent ni du development au dehors de la capitale/Mont Liban. Les taxes ont le double avantage d'aneantir le statut des terrains au Liban comme stockage de la valeur et de freiner des valuations franchement illusoires. Beyrouth n'est pas New York, Londres ou Tokyo. De qui on se moque?

Paul Pierce

00 h 53, le 13 août 2011

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • L'utilisation de la terre laisse a desirer. Le gouvernement peut faire beacoup de choses et en meme temps renflouer les caisses de l'etat: Pour eviter que des logements ou terrains ne soient vides ou accapares a des fins speculatives: - Taxe sur la propriete fonciere (j'entends deja les pas touche) proportionnelle a la valeur des terrains - De meme Taxe sur les biens immobiliers excepte le logement principal d'une famille. Ca mettra la barre encore plus haut pour les expatries et etrangers qui veulent avoir un pied a terre et ca decouragera la pratique d'avoir plus qu'un logement. - Revoir la loi sur le droit des etrangers a acheter de l'immobilier au Liban Pour controler les constructions sauvages - zoning strict (sans wasta) pour appartements, zone commercante, zone agricole etc. - Quota sur les permis du luxe Je ne parlerais pas du developpement des campagnes pour que les habitants y restent ni du development au dehors de la capitale/Mont Liban. Les taxes ont le double avantage d'aneantir le statut des terrains au Liban comme stockage de la valeur et de freiner des valuations franchement illusoires. Beyrouth n'est pas New York, Londres ou Tokyo. De qui on se moque?

    Paul Pierce

    00 h 53, le 13 août 2011

  • Ce manque de politique de l’habitat couplée de l’avidité sans limite des spéculateurs est le signe distinctif d’un pays sous-développé où quelques fortunés locaux ou régionaux s’enrichissent au dépends d’une classe moyenne et autres travailleurs obligés de s’expatrier.

    Emile Antonios

    01 h 57, le 12 août 2011

Retour en haut