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Le Liban dans WikiLeaks : fuites et révélations

Aoun affirme que c’est le Hezbollah qui a besoin de lui, et non le contraire

Dans un document secret portant le numéro 06 Beirut1339, envoyé par l'ambassade des États-Unis à Beyrouth à l'issue d'une réunion qui avait regroupé, le 1er mai 2006, le général Aoun et l'ambassadeur Jeffrey Feltman, le chef du CPL s'est targué d'avoir réussi à « réhabiliter » les Libanais alliés à la Syrie qui, selon lui, ont transféré leur allégeance de Damas à Rabieh, à l'exception de « l'agent et criminel » Wi'am Wahhab, a-t-il dit. Lors de la réunion, M. Aoun a écarté la possibilité de se réconcilier avec les forces du 14 Mars, arguant du fait qu'elles refusent de partager le pouvoir et parce que Saad Hariri est « un dictateur wahhabite ».
De son côté, M. Feltman a soulevé devant son interlocuteur la crainte des États-Unis de trois problèmes majeurs au Liban : le premier est le renforcement de l'influence iranienne dans ce pays par le biais du Hezbollah, l'accroissement du financement iranien bénéficiant aux extrémistes parmi les Palestiniens ainsi que le soutien iranien aux extrémistes sunnites dans les régions déshéritées du Liban-Nord.
Le deuxième est la réédition de la politique d'ingérence syrienne au Liban qui avait disparu durant une année entière.
En troisième lieu, le refus du Hezbollah de désarmer et sa poursuite de l'édification d'un État dans l'État, ce qui contribue à affaiblir le Liban, a relevé le diplomate.
L'ambassadeur a fait part de son inquiétude profonde de la contribution de M. Aoun à ces problèmes par le biais de son entente avec le parti chiite. Pour M. Feltman, l'acceptation par le général Aoun du soutien de personnalités telles que Sleimane Frangié, Élie Ferzli, Issam Kanso, Wi'am Wahhab et d'autres alliés de la Syrie « ne constitue pas le meilleur moyen pour le chef du CPL de rejeter l'accusation de son allégeance à Damas ».
À cela, M. Aoun a répondu qu'à l'exception de Wi'am Wahhab, « qui est sans aucun doute un agent et un criminel syrien », tous les autres étaient en voie de se transformer en nationalistes libanais. Et de demander aux Américains de reconnaître qu'il est la seule personne susceptible de convertir ces gens-là en véritables Libanais en se rapprochant d'eux.
L'ambassadeur US a évoqué « les activités criminelles du Hezbollah, dont l'infiltration des armes et de la drogue, ainsi que le blanchiment d'argent », qui, a-t-il dit, « sont tout à fait contradictoires avec les appels à lutter contre la corruption lancés par M. Aoun ». Et de souligner que les États-Unis, qui restent opposés au document d'entente adopté par les deux parties, se demandent « comment quelqu'un comme Michel Aoun accepte de faire bénéficier une organisation aussi dangereuse d'une couverture ».
M. Aoun a notamment répondu qu'au cours de l'année 2006, le calme était revenu au niveau de la ligne bleue qui connaissait auparavant des perturbations au quotidien. Et d'expliquer que si le Hezbollah fait désormais preuve de retenue au niveau de la frontière, c'est précisément à cause du document d'entente avec le CPL.
M. Aoun a également affirmé que « le Hezbollah a besoin de lui bien plus qu'il n'a besoin du parti », précisant qu'il est capable d'exercer un contrôle sur ses activités, chose que les États-Unis devraient savoir apprécier tout en lui étant « redevables ».
Le député a ajouté que l'insistance des États-Unis à vouloir désarmer le Hezbollah ne pourra pas se faire par la force, précisant que toute opération militaire internationale rendra le processus de désarmement encore plus difficile. À la question de savoir enfin si une réconciliation est encore possible entre le camp du 14 Mars et le général Aoun, ce dernier s'est contenté de répondre en qualifiant Saad Hariri « de dictateur wahhabite » et Samir Geagea de « criminel ».

Après la libération de Chebaa
Par ailleurs, le quotidien al-Joumhouriya a publié la teneur d'un autre document de WikiLeaks, portant cette fois-ci sur l'entretien qu'a eu le député du CPL, Simon Abi Ramia, avec un responsable américain à l'ambassade US à Paris à la date du 7 mai 2007.
Intitulé : « Abi Ramia affirme : Aoun est l'allié des Américains dans la lutte contre le Hezbollah », le document rapporte les propos du député qui a exhorté, lors de l'entretien, les responsables américains à l'ambassade à considérer M. Aoun « comme un allié des États-Unis dans sa lutte contre le Hezbollah », soulignant la nécessité de désarmer le parti chiite de son idéologie et non seulement de lui ôter ses armes réelles.
M. Abi Ramia a, selon WikiLeaks, expliqué à son interlocuteur que l'objectif de M. Aoun à travers le document d'entente signé avec le Hezbollah est de créer le climat propice en vue de son désarmement définitif, affirmant que « si le parti refuse de désarmer après la libération des fermes de Chebaa, les aounistes se retourneront contre lui ».
Le responsable américain a relevé devant le député que M. Aoun n'a démontré à ce jour aucune capacité à modifier le style adopté par le Hezbollah, encore moins son discours, insistant sur le fait que ni la Syrie ni le parti chiite ne comptent soutenir la candidature de M. Aoun à la présidence de la République. Et de lui demander : quand est-ce que le général Aoun va se rendre à l'évidence que le Hezbollah est en train de l'exploiter ? Le diplomate a ajouté que les prises de position du chef du CPL, notamment son refus du chapitre VII de la résolution des Nations unies (instituant le TSL), ne sont pas à même d'en faire un allié des États-Unis.
À cela, M. Abi Ramia a répondu que la solution consiste à libérer les fermes de Chebaa, de manière à retirer cette carte des mains du Hezbollah, qui n'aura plus d'arguments valables pour conserver ses armes.
Le député, qui a insisté sur la nécessité pour les réfugiés palestiniens de retourner chez eux, a fait remarquer que le parti chiite « ne désarmera pas tant que les Palestiniens resteront armés ». M. Abi Ramia a également expliqué que M. Aoun œuvre à créer un climat de confiance avec le parti chiite, qui facilitera le processus de désarmement de manière définitive. Il a par ailleurs relevé que les leaders au sein du 14 Mars, en particulier Samir Geagea et Walid Joumblatt, ne pourront pas trouver une solution aux armes du Hezbollah. Il a conclu en lui demandant « quel est le plan » des Américains pour parvenir à un désarmement du parti.
À cela, le responsable a répondu que le plan est clair. Il consiste à mettre en place le Tribunal spécial pour le Liban qui augmentera l'influence américaine en Syrie en resserrant l'étau autour du Hezbollah pour ce qui est notamment de la livraison d'armes lourdes qui lui sont destinées à partir de la Syrie.
Dans un document secret portant le numéro 06 Beirut1339, envoyé par l'ambassade des États-Unis à Beyrouth à l'issue d'une réunion qui avait regroupé, le 1er mai 2006, le général Aoun et l'ambassadeur Jeffrey Feltman, le chef du CPL s'est targué d'avoir réussi à « réhabiliter » les Libanais alliés à la Syrie qui, selon lui, ont transféré leur allégeance de Damas à...