Mais commençons par le commencement. Aussitôt son diplôme en poche de la faculté française de médecine de Beyrouth à l'époque, le jeune médecin, qui se spécialise à Paris, pense déjà à sa collection. Une lithographie reçue en cadeau d'un ami intermédiaire en art, et c'est le début de l'aventure. Depuis, ça n'arrête pas car, «grâce à cet ami qui avait accepté d'être payé à tempérament, j'achetais sans problème en effectuant des versements mensuels». Par la suite, tout en ayant recours à son ami, le Dr Nahoul fait la connaissance de certains artistes devenus de bonnes connaissances auxquels il achète directement des toiles. Ainsi, il est par exemple en possession d'une quarantaine d'œuvres de Tony Soulié prises à l'atelier de l'artiste. Ses autres acquisitions sont signées Francis Bacon, Frédéric Benrath, Camille Bryen, Robert Couturier, Hans Hartung, Ladislas Kijno, René Laubiès, Joan Miro, Ernest Pignon-Ernest, Pierre Soulages, Arpad Szenes, Mark Tobey, Vladimir Vélickovic, Maria Elena Vieira da Silva, pour ne citer que ceux-là...
Et pourquoi une donation au musée de Nice plus précisément? «Les musées parisiens sont riches et n'ont pas besoin de cette donation, explique cet amateur-collectionneur. Et puis, c'est parce que j'y vis une bonne partie de l'année. Le conservateur à qui j'avais écrit pour faire une proposition de donation a fait le déplacement jusqu'à Paris pour voir une partie du fonds. Il a découvert des œuvres de qualité, a-t-il dit, qui complétaient les lacunes du Mamac de sa ville.»
Et le Liban!
Nice a su apprécier le geste de son donateur et lui a fait honneur en éditant un très beau catalogue de la donation avec une préface de M. Christian Estrosi, député des Alpes-Maritimes, maire de Nice et président de Nice-Côte d'Azur où on peut lire: «J'exprime ma profonde gratitude pour le geste exemplaire qui a conduit le Dr Khalil Nahoul à offrir un ensemble d'œuvres significatif venant enrichir la collection du Musée d'art moderne et d'art contemporain de Nice. Après les donations de Niki de Saint-Phalle et d'Albert Chubac, c'est une joie pour notre ville de recevoir et de présenter au public près d'une centaine d'œuvres d'artistes majeurs du XXe siècle. À la fois personnel et cohérent, cet ensemble, tout en conservant sa propre particularité et autonomie, entre en résonance avec le fonds artistique du Mamac. Certaines pièces, comme celles de Pignon-Ernest, confortent notre collection quand d'autres élargissent son champ. Le Mamac et la ville de Nice peuvent être fiers de voir entrer dans leurs collections des œuvres de Hans Hartung, de Francis Bacon et de Vladimir Vélickovic, mais aussi de Pierre Soulages...» Ce catalogue compte également un texte de M. Gilbert Perlein (conservateur en chef du patrimoine et directeur du Mamac). Le musée a aussi organisé une exposition ouverte au public du 12 mars au 23 mai avec vernissage en grande pompe, discours de circonstance et tutti quanti. Et, comme toujours, la presse était au rendez-vous.
Avant même sa donation, cet amateur amoureux d'art avait déjà misé sur d'autres peintres et d'autres acquisitions. «Mes murs sont pleins, une fois de plus», dit-il. Son fonds compte jusqu'à ce jour 120 nouvelles œuvres.
Y aura-t-il une autre donation? Au Liban peut-être, cette fois? «Je ne suis pas réticent, répond spontanément le Dr Nahoul, au contraire, j'y ai pensé. Mais le Liban n'a pas de musée d'art contemporain. Et puis, pour être franc, je suis inquiet et dubitatif pour
l'avenir!!!»
DU BI TA TIF! Un maître mot. Dubitatifs, la plupart des Libanais le sont aujourd'hui. Dubitatifs pour l'avenir de ce petit bout de terre que seule l'initiative privée a maintenu jusque-là sur la carte du monde. En attendant la relève par un État digne de ce nom.
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