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Nos Lecteurs ont la Parole

Être libanais avant tout

Par George SABAT
Dans son article publié le 24 février dans la revue électronique National et « Lebanon : stuck at the starting gate », le Dr Samir Makdissi conclut un minutieux et brillant exposé des événements qui se sont succédé durant la dernière décennie au Liban par un constat plutôt pessimiste.
Selon cet économiste et politologue reconnu pour la pertinence de ses analyses, les Libanais resteraient victimes de leurs contradictions internes et incapables de s'en libérer tant que prévaudra le régime confessionnel dans ce petit pays de quatre millions et demi d'habitants.
Les déclarations du Dr Makdissi rejoignent et confirment les demandes des participants aux manifestations du groupe Khalass, à proximité de l'église Mar Mikhaël à Chiyah, pour exiger l'abolition pure et simple de ce système qui régit les relations entre l'État et les citoyens depuis l'avènement de l'indépendance.
Cette déclaration fait aussi écho à un article publié le 23 février dans L'Orient-Le Jour : « Ces jeunes qui veulent faire tomber le régime confessionnel », sans oublier la campagne menée dans le même but depuis plusieurs mois par M. Nabih Berry.
Décidément, de l'avis de beaucoup de nos penseurs et de nos dirigeants, le régime confessionnel est à l'origine de tous nos maux. D'après ces personnalités, une fois qu'on s'en sera débarrassé, tout reviendra dans l'ordre dans notre pays et tous nos problèmes seront par le fait même résolus.
Mais, est-ce bien là le cas ? Il semble que nous ayons, au Liban, une tendance à tout simplifier sans prendre la peine de rechercher et d'analyser. Au début, beaucoup de Libanais déclaraient que tous nos maux étaient causes par le maronitisme politique. Après 1975 et pendant quinze ans nous avons lutté contre les Palestiniens, que l'on soupçonnait, à tort ou à raison, de vouloir s'emparer du pays. Nous avons ensuite imputé aux Syriens la responsabilité du manque de développement au Liban. Six ans après leur départ, nous constatons que rien de concret n'a été réalisé durant cette période de « liberté » pour démarrer le chantier des réformes. De l'avis de beaucoup, cet échec est le résultat de la dichotomie qui s'est emparée du pays, chacun des deux groupes rejetant la responsabilité sur l'autre.
Et maintenant, soixante-sept ans après l'indépendance, voilà que nous retournons à la réflexion de Georges Naccache, « Deux négations ne font pas une nation », et nous concluons : « Éliminons le confessionnalisme et tous nos problèmes seront résolus. »
Je vous en prie, Messieurs, tâchons d'examiner la question sous un angle différent. Pourquoi ne pas admettre le fait que le citoyen de ce pays, fut-il sunnite, chiite, druze ou chrétien, a oublié depuis belle lurette qu'il était avant tout libanais.
Croyez-vous, mes amis, que le fait de biffer la mention de confession sur une carte d'identité résoudrait instantanément tous nos problèmes et ferait de nous tous des citoyens exemplaires ?
Pourquoi ne pas retourner le problème et envisager d'acquérir, pour commencer, ce sens civique, ce véritable patriotisme, cet attachement aux 10 452 kilomètres carrés quitte, une fois ce résultat atteint, à jeter aux orties, tous ensemble et d'un commun accord, nos anciennes cartes d'identité pour exhiber fièrement les nouvelles qui ne porteraient que la mention : « Untel ou unetelle, citoyen du Liban et fier de l'être ».
Ne pensez-vous pas que le confessionnalisme est un mal de l'« esprit » plutôt qu'une erreur dans notre Constitution ? C'est l'« esprit » et la mentalité qu'il faut changer, bien avant les édits.
Soyez plus clair, me demanderez-vous, que proposez-vous au juste ?
Imaginons pour un instant qu'une révolution pareille à celles qui se sont produites en Égypte et en Tunisie, ou qui sont en cours de l'être en Libye, au Yémen et à Bahreïn, se produisait chez nous, au Liban, et avait pour effet de bouter hors du pouvoir aussi bien les tenants du 14 Mars que ceux du 8 Mars.
Que ferait alors ce peuple, débarrassé de ses « tyrans » des deux bords, qui aurait enfin la liberté de choisir le régime et les conditions de vie qu'il préfère ? Que demandera ce peuple ? Que voudra-t-il ?
C'est la question que nous devrions tous nous poser. Que veut ce peuple ? Laissez-le s'exprimer librement, loin de l'intoxication des médias, des séances d'endoctrinement, des meetings et des manifestations organisées. Que veut ce peuple ? Que veulent la ménagère au foyer, l'employée, le mari gagne-pain, le fonctionnaire, l'administrateur, le mécanicien, l'ouvrier, le chauffeur de taxi ?
Si la question était posée librement, loin de toute pression et de toute entrave, je suis convaincu que la réponse serait, dans la plupart des cas, la même que celles qui ont été présentées par les jeunes et les moins jeunes en Égypte, en Tunisie et ailleurs. « Nous voulons la liberté de penser, le droit au travail, à une vie décente et à un avenir meilleur pour nos enfants et surtout la liberté d'exprimer notre opinion sans influences ou contraintes extérieures.
C'est cette soif d'expression qui s'est manifestée par l'immolation de Bou Azizi en Tunisie, qui sera imité par bien d'autres ailleurs. C'est elle qui a été à l'origine de cet incendie qui se développe, se propage et embrase tout le Moyen-Orient.
L'homme, sous toutes les latitudes, sous tous les cieux, recherche avant tout la liberté. Nul système, nulle dictature, fut-elle militaire, religieuse ou partisane, ne lui est acceptable. Cet individu veut s'autogérer et refuse d'accepter de porter le carcan d'un système qui lui aurait été imposé.
Je conclurais ces réflexions par un appel à nos dirigeants. Si vous voulez que le « peuple » vous suive, donnez-lui la faculté de participer à la gouvernance de son pays. Faites en sorte que les quatre millions et demi de Libanais décident par eux-mêmes, libres de toute « dictature » intérieure ou étrangère de leur propre avenir.

Dans son article publié le 24 février dans la revue électronique National et « Lebanon : stuck at the starting gate », le Dr Samir Makdissi conclut un minutieux et brillant exposé des événements qui se sont succédé durant la dernière décennie au Liban par un constat plutôt pessimiste.Selon cet économiste et politologue reconnu pour la pertinence de ses analyses, les...

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