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Législatives : juin 2009 - Pour aller plus loin

Finalement, la 15–10–5 tient bon

Tout le monde se met à la récupération de l'alcali volatil et rira bien qui rira le dernier. Après Berry et le groupe du centre, c'est au tour de Hariri de tenter de réinstaller dans son propre paddock le pack ministériel de Walid Joumblatt. Un leader puissant, devenu électron libre, autant que denrée proposée sur le marché, après son repositionnement.
L'entourage du Premier ministre désigné fait, dès lors, savoir qu'il compte s'en tenir à la 15-10-5, bien que nombre de ses partenaires du 14 Mars la trouvent dépassée. Ses raisons ? D'abord que la formule bénéficie d'une solide couverture internationale, notamment saoudo-syrienne, qui tient pratiquement lieu de garantie. Ensuite, qu'elle a également reçu une forte approbation intérieure. Enfin, et surtout, la nécessité de ne pas rebuter, ou braquer, non seulement l'opposition mais également Joumblatt.
D'autant que ce dernier a fourni, en même temps que des explications sur la portée et la signification précises de son évolution, des assurances formelles : il place ses trois ministres au cœur même du quota prévu pour le chef du gouvernement, donc de la majorité. Joumblatt a particulièrement insisté sur un élément à caractère personnel, et l'on sait combien cela compte en politique : il ne lâche pas Hariri et ne passe pas du côté du 8 Mars.
Donc, la base arithmétique est en principe maintenue. On ne peut pas dire pour autant que rien n'a changé. Le choc négatif de la surprise Joumblatt reste trop fort pour s'estomper de sitôt. Car, bien au-delà des conjonctures ministérielles, les loyalistes ont ressenti la prise de distance joumblattiste comme un coup porté aux valeurs nationales sacrées que sont la souveraineté, l'indépendance et les libertés. Ils y voient un ralliement tacite, mais complice quand même, aux tentatives de déboulonner la révolution du Cèdre au profit de l'axe syro-iranien et de ses fidèles du cru. Autrement dit, si Joumblatt est de bonne foi comme il le soutient, il a bien mal choisi son moment, affirment-ils. Cependant, Hariri entreprend de traiter en personne le problème de la fissure interne. Il enjoint aux membres du bloc Liban d'abord comme à ses partisans de ne pas répondre à Joumblatt et de ne pas en commenter l'initiative dans les médias.

Aoun
En réalité, comme l'on est là devant une question de fond, le Premier ministre désigné estime qu'on peut en reporter l'étude, pour compléter d'abord la formation du gouvernement. Sur ce plan, il lui reste le nœud Aoun à résoudre. Le Courant patriotique libre réclame cinq ministères incluant des portefeuilles dits de souveraineté. Il exige le retour de Gebrane Bassil aux Télécoms. Encore que le général Aoun affirme n'en avoir jamais demandé la reconduction et proteste de se voir accusé d'entraver la mise en place du cabinet. Il affirme qu'il attend encore d'être informé de la formule retenue par Hariri, ainsi que de ses propositions, pour se fixer. Un point à signaler : les loyalistes trouvent que les opposants, qui se déclarent pressés, devraient mettre du leur pour amener le général à composition.
Retour aux loyalistes. Ils indiquent que Hariri a mis à profit sa présence à l'étranger pour entreprendre des contacts, afin de renforcer sa position après le coup d'éclat de Walid Joumblatt. Un coup dans le dos ressenti d'autant plus violemment que le leader du PSP, visitant Koraytem juste deux jours auparavant, n'en avait pas prévenu son allié. Alors qu'antérieurement, la coordination et la communication étaient parfaites entre les deux hommes, qui ne se cachaient rien, à en croire les haririens.
Quoi qu'il en soit, on se focalise maintenant sur la mise en place du prochain cabinet. Selon un pôle du 14 Mars, sa composition, déjà pratiquement arrêtée, ne sortira pas de l'ordinaire et n'apportera aucune surprise. Dans un geste symbolique autant que pédagogique, Saad Hariri ne compte rendre visite à aucun député, avant de demander la confiance de la Chambre, par respect du principe de la séparation des pouvoirs. Cela, donc, pour la forme. Pour le fond, des loyalistes avouent que le gouvernement qui va voir le jour ne correspond pas du tout au rêve personnel de Hariri. Mais il doit s'en contenter. Car les circonstances ne permettent pas une formule moins bancale sur le plan de la vision nationale, de l'État de droit et de l'intérêt du Liban bien compris. Comme les Libanais ne peuvent, par leur faute, s'entendre que sur un minimum, c'est le minimum qu'ils obtiennent. Et c'est sur cette base qu'ils doivent coopérer. À la demande pressante des parties extérieures, d'accord pour estimer que ce n'est pas le moment de laisser le Liban se déstabiliser, au risque d'entraîner la région avec lui.
À partir de là, les loyalistes estiment que l'on va désormais aller vite en besogne et que le gouvernement verrait le jour dans quelques jours. Ils soulignent cependant que la plaie étant encore très vive, il pourrait y avoir rapidement des divergences diverses. Ils ne comprennent pas, disent-ils, pourquoi Joumblatt s'est comporté de la sorte. Le secrétariat général du 14 Mars, rappellent-ils, a été établi pour que l'on y discute les points de vue différents des composantes du mouvement, afin que la ligne reste unifiée. Or Joumblatt en a retiré ses représentants, sans exposer, et expliquer, ses motivations concernant les menaces israéliennes, la situation au Sud, les conséquences potentielles de l'acte d'accusation du TSL, les développements régionaux et les relations syro-libanaises. On ne peut pas dire, ajoutent ces sources, que le 14 Mars est sur une autre planète que Joumblatt. Car les éléments qu'il soulève sont mentionnés dans plus d'un document du 14 Mars cosigné par Joumblatt lui-même. En tout cas, le mouvement ne compte pas se laisser abattre. Le secrétariat général va bientôt publier un nouveau mémoire politique de fond et préparer une réunion élargie.
Il reste un détail de taille. Pour les loyalistes, Joumblatt exagère, sans doute à dessein, dans la frayeur. À leur avis, en effet, l'acte d'accusation du TSL, quelle qu'en soit la teneur, ne risque pas de provoquer des troubles internes. Ils rappellent que Hariri ne cesse de répéter, on ne peut plus fermement, qu'il n'est pas question de mettre le TSL sur le marché politique ou médiatique, et qu'il faut le garder, très strictement, dans son cadre technique judiciaire. Avant, pendant et après la publication de l'acte d'accusation, il va appeler tout le monde au calme, à la paix civile et à la stabilité. Il y tient, évidemment, autant sinon plus que Joumblatt.
L'entourage du Premier ministre désigné fait, dès lors, savoir qu'il compte s'en tenir à la 15-10-5, bien que nombre de ses partenaires du 14 Mars la trouvent dépassée. Ses raisons ? D'abord que la formule bénéficie d'une solide couverture internationale, notamment saoudo-syrienne, qui tient pratiquement lieu de garantie. Ensuite,...