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Liban - Le commentaire

Les assurances US accueillies avec prudence

Cela tourne à la ritournelle : les responsables US de tout poil et de tout acabit ne cessent de répéter qu'aucun bazar ne sera conclu avec la Syrie ou avec l'Iran au détriment du Liban. On ne peut que s'en réjouir.
Mais comme on dit, les promesses n'engagent que ceux qui y croient. Il y a marché et marché. Et le passé relationnel, soulignent des pôles chevronnés à longue mémoire, fourmille d'exemples de décisions américaines biaisées, équivoques. Ou même franchement hostiles à la cause libanaise bien comprise. Des mauvaises surprises, des actes engagés contraires à un verbe engageant, les parties régionales, Liban en tête, en ont eu leur content depuis Yalta. Car l'époque ne reconnaît à un État, à une puissance, qu'un droit de pragmatisme fondé sur la défense égoïste de ses intérêts.
On se souvient de Dean Brown. Les Palestiniens menaçaient d'envahir le pays chrétien, Abou Ayad, numéro deux de l'OLP à l'époque, jurait que la route de Jérusalem passait par Jounieh. Les Libanais, se tournant vers Washington, lui avaient demandé s'il allait les protéger. Réponse US : Capitulez, partez ou laissez les Syriens entrer.
Damas avait entamé sa reptation à travers la Saïka, en soutenant le Mouvement national. Le président Sleimane Frangié avait entrepris alors de larges concertations, au sujet d'un recours à l'armée syrienne, pour ne pas assumer seul une telle responsabilité. Fouad Boutros témoigne dans ses Mémoires que tous les recours diplomatiques, tous les efforts déployés par le président Frangié étant restés vains face à l'expansion palestinienne, il ne restait qu'à faire appel à l'armée syrienne. Et le ministre déclarait en substance au président : il n'y a pas d'autre choix que de laisser entrer l'armée syrienne, mais Dieu seul sait quand elle se retirera... Les Américains, de leur côté, répétaient déjà leur attachement à l'unité, à l'indépendance et à la souveraineté du Liban, en restant les bras croisés.
Il est apparu par la suite que la solution d'un État palestinien de substitution au Liban ne marchait pas, mais qu'en même temps les Libanais ne pouvaient défaire l'OLP sur le terrain. Il fallait donc les déloger ou les contrôler de près et Damas avait reçu son feu vert à cet effet. Opération rééditée, en plus définitif, en août 1982 quand, chassé de Beyrouth par les Israéliens, Arafat s'est trouvé expulsé de Tripoli par les Syriens.
Plus tard, les États-Unis ont envoyé un contingent, dans le cadre d'une force multinationale, et des bâtiments de guerre. Après les attentats contre leur ambassade et contre les marines, ils sont repartis, ce qui est bien compréhensible, mais se sont également lavé les mains du dossier libanais. En laissant cette carte blanche qui a permis aux Syriens d'exercer sur le Liban asservi, pressuré sur tous les plans, une si longue « tutelle » (les guillemets s'imposent).
C'est donc un réflexe de mémoire nationale dramatique qui pousse nombre de vétérans politiques libanais à s'inquiéter de l'ouverture US sur le tandem syro-iranien. Au stade actuel, Washington parle de dialogue constructif. Mais qui dit dialogue dit négociation. Sur quoi ? Sur l'Irak, la Palestine, l'Afghanistan, sur la lutte contre le terrorisme et l'éradication de la violence, sur la stabilisation de la région. Et, forcément, sur le Liban, terreau fertile de déstabilisation, seul front actif face à Israël.
En pratique, l'Iran réclame un rôle régional primordial, et le droit à une force nucléaire comme d'autres pays. Les États-Unis et l'Occident sont disposés à lui reconnaître ce rôle, mais sans le nucléaire ni les missiles à longue portée, ni les armes de destruction massive. Pour qu'en retour, il les aide dans cette stratégie de retrait qu'évoque Barack Obama au sujet de l'Afghanistan, leur départ d'Irak étant déjà agencé. Or, à part qu'il lui est loisible de titiller les pays de ce Golfe pétrolier dont les Américains ont tant besoin, de quels atouts dispose l'Iran ? Des fractions majoritaires en Irak, de l'alliance avec la Syrie et du Hamas en Palestine. Mais, presque surtout, du Hezbollah au Liban. Donc, si les États-Unis refusent vraiment de céder sur la vraie souveraineté libanaise, la partie qu'ils se promettent d'engager avec Téhéran et Damas risque d'être serrée pour eux. Il y aurait, sans nul doute, un prix à payer pour une telle loyauté. Y sont-ils prêts ?
Cela tourne à la ritournelle : les responsables US de tout poil et de tout acabit ne cessent de répéter qu'aucun bazar ne sera conclu avec la Syrie ou avec l'Iran au détriment du Liban. On ne peut que s'en réjouir.Mais comme on dit, les promesses n'engagent que ceux qui y croient. Il y a marché et marché. Et le passé relationnel,...
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