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VIENT DE PARAÎTRE «Syllabes décousues», de Philippe Kandalaft Saisons d’orangers sur Tripoli, ou le lyrisme d’une mémoire transfigurée

Un premier livre en littérature est toujours un acte d’amour. Un cri d’amour. Souvent d’amour déçu. Avec son cortège d’amertume, de révolte, d’amères désillusions, d’espoirs avoués ou camouflés. D’aveux en confidences, de phrases sibyllines en rimes perdues, de narration descriptive en réflexion méditative, se profilent, en «syllabes décousues», les pages d’une vie, brusquement, dûment, remplies et qu’on essaye en vain de remodeler selon les images qui ont hanté cette même vie au tracé marqué au fusain, à la sanguine ou en estampe vaporeuse. Demeure donc ce murmure irrépressible contre le temps qui fuit et les rêves qui s’effilochent. Avec la ferme détermination de ne jamais se laisser faire ou de baisser benoîtement les bras. Tout aussi bien que le plaisir et le réconfort de s’abandonner aux souvenirs des jours lumineux et des moments de plénitude, authentique stock énergétique pour affronter l’adversité. Philippe Kandalaft, à l’âge mûr, décide de se lancer dans la bataille des mots et entreprend de bâiller la porte de la littérature. Un premier ouvrage, Syllabes décousues, paru aux éditions Dar an-Nahar, avec un titre clairement révélateur du projet entrepris silencieusement et presque en secret, jette la lumière sur un passé dominé par la guerre mais aussi par les joies innocentes d’une enfance baignée par les parfums enivrants des orangeraies en fleurs... Originaire du Liban-Nord, plus précisément de Tripoli, Philippe Kandalaft, ancien enseignant reconverti dans la gestion des entreprises, signe là son premier opus. Un opus où transparaît, en toute évidence, la délectation jubilatoire de l’amour des mots et le sens de la formule. Un livre qui n’est ni poésie, ni essai, ni roman. Mais peut-être tout à la fois, avec la présence d’une « voix » intérieure aux intonations françaises à la fois puristes et élégantes, digne héritage d’un studieux écolier formé aux établissements des missionnaires français des frères Jean-Baptiste de la Salle et détenteur, par la suite, d’un diplôme de lettres de la Sorbonne. Poésie libre avec une musicalité, une cadence, un rythme particulier pour évoquer les palmiers du désert : voilà le décor planté et le ton donné pour couvrir le parcours de 282 pages où passé, futur et présent fusionnent, s’annihilent, s’imbriquent et se chevauchent. Avec la naïveté d’un premier écrit, de ses maladresses et de ses orgues ronflants, Philippe Kandalaft, avec émotion, sensibilité et une sagesse parfois bien sentencieuse, brosse le portrait d’un parcours le menant des rives odoriférantes de Tripoli (à l’époque la capitale du Nord n’était alors qu’un immense verger et pas encore rongée par la construction et le béton sauvages !) aux sables d’un désert qui le fascine dans sa solitude et l’infini de ses vagues lisses et dorées… Innombrables images fignolées avec dévotion et zèle, se rattachant au passé, avec le fracas de la guerre du Liban et, plus loin dans le temps, le charme tout en douceur de «ce grand théâtre qu’est la vie» que l’auteur, inlassablement, sonde et interroge. Marqué d’un certain romantisme, habité d’une sourde colère contre la souffrance au travail et les déboires de l’humanité, ce livre «poétique» (déjà de par le choix même de l’expression) accuse chez l’auteur une sensibilité d’écorché vif et la quête d’une inspiration lyrique, loin de tout imaginaire, au plus profond du vécu. Edgar DAVIDIAN
Un premier livre en littérature est toujours un acte d’amour. Un cri d’amour. Souvent d’amour déçu. Avec son cortège d’amertume, de révolte, d’amères désillusions, d’espoirs avoués ou camouflés. D’aveux en confidences, de phrases sibyllines en rimes perdues, de narration descriptive en réflexion méditative, se profilent, en «syllabes décousues», les pages d’une vie,...