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Actualités - CHRONOLOGIE

Athlétisme - L’ex-athlète de la RDA souhaite que son record soit retiré des tablettes Ines Geipel part en guerre contre le dopage

L’ancienne athlète est-allemande Ines Geipel, spécialiste du saut en longueur et du relais 4x100 m, a officiellement demandé à ce que son nom soit retiré des palmarès sportifs, un geste symbolique pour dénoncer le dopage d’État qu’ont subi à leur insu des milliers de sportifs du temps de la RDA communiste. De ce jour de juin 1984, Ines Geipel a gardé le souvenir d’un témoin qu’elle a eu du mal à passer à la relayeuse suivante, puis « de quatre visages rayonnants ». La jeune femme venait de réaliser avec ses trois coéquipières du SC Motor Iéna la meilleure performance allemande d’une équipe de club sur 4x100 m en 42 secondes 20/100. Un record qui n’a jamais été égalé depuis. « Mais vous savez ce qu’il en est de la joie, c’est un sentiment qui ne dure pas », soupire-t-elle plus de 20 ans plus tard, devant un latte macchiato, dans un café de Kreuzberg, ce quartier turco-bohème de Berlin où elle vit. « Ce record, il est empoisonné par le dopage », explique-t-elle. Ines Geipel a consulté son dossier à l’ouverture des archives de la police secrète, la Stasi, et compris que ce « riche cocktail » de vitamines en tout genre qu’on lui administrait était une terrible mixture dopante et menaçante pour sa santé. Lâchée par ses ex-coéquipières Alors, en juillet, elle a demandé que son record disparaisse des tablettes. Ines Geipel estime que c’est « la dernière pierre » dans son incessant combat pour que les victimes du dopage d’ex-RDA obtiennent réparation. Ses trois coéquipières désapprouvent « absolument » sa démarche. La plupart des grands sportifs est-allemands « savent ce qui s’est passé, mais ils restent sur leurs mensonges », dénonce cette blonde élégante dans sa veste de tweed. Pour garder un peu de cette gloire d’antan qui faisait monter sur les podiums, les sportifs disent « nous, on était propres », selon elle. Ines Geipel a choisi une autre voie. « Je veux que les jeunes gens qui font du sport aujourd’hui courent après de vrais records », insiste-t-elle. À 45 ans, elle court toujours après la vérité. Pourquoi a-t-elle souffert de crises de boulimie pendant de si longues années ? Pourquoi tant de dépressions ? Pourquoi son ventre la fait-elle tant souffrir encore aujourd’hui ? « On nous faisait avaler un tas de pilules », notamment de terribles stéroïdes Oral-Turinabol dont les sportifs endurent encore les séquelles. Elle a commencé l’athlétisme à haut niveau à 17 ans. Intégrée dans l’équipe nationale, elle part s’entraîner au Mexique en vue des Jeux olympiques de Los Angeles de 1984 auxquels la RDA ne participera finalement pas. Et là, « je suis tombée amoureuse », s’esclaffe-t-elle. « Sortie du rang » L’élu est un athlète mexicain avec qui elle entend rester en Californie après les JO. Comble de la désobéissance, Ines Geipel compte parmi ses amis des opposants déclarés au régime. La Stasi décide de se débarrasser de cette athlète trop libre. « J’étais sortie du rang et, dans une dictature, on ne revient jamais dans le rang, estime-t-elle. En 10 minutes, j’ai été exclue de l’athlétisme, on ne m’a même pas laissé prendre mes affaires. » Mais c’est bien plus tard, en 2003, qu’elle a découvert la terrible vérité. Opérée de l’appendicite juste avant son exclusion du sport, son ventre a été charcuté : muscles coupés, organes sectionnés. « Je pense qu’ils avaient prévu d’anéantir mon ventre pour m’exclure du sport », lâche-t-elle. À l’été 1989, quand le rideau de fer tombe en Hongrie, sa soif de liberté est insatiable. Elle fuit la RDA pour se réfugier en RFA. Aujourd’hui, Ines Geipel est professeur d’expression orale dans une école d’art dramatique et écrit des romans. « Je ne veux pas toute ma vie être une victime », affirme-t-elle. L’effacement de son record est son ultime combat. Car ensuite « je veux être à nouveau libre ».
L’ancienne athlète est-allemande Ines Geipel, spécialiste du saut en longueur et du relais 4x100 m, a officiellement demandé à ce que son nom soit retiré des palmarès sportifs, un geste symbolique pour dénoncer le dopage d’État qu’ont subi à leur insu des milliers de sportifs du temps de la RDA communiste.
De ce jour de juin 1984, Ines Geipel a gardé le souvenir d’un témoin...