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Actualités - CHRONOLOGIE

Droits de l’homme - Yarzé enquête sur l’existence d’une fosse commune à Deir el-Kalaa pour retrouver ses 61 soldats disparus Le voile se lève sur le massacre collectif commis par l’armée syrienne, le 13 octobre 1990

Depuis quelques jours déjà, le couvent Saint-Jean de Deir el-Kalaa à Beit-Méry est l’objet d’une enquête minutieuse de la part de l’armée libanaise qui s’est carrément installée dans la maisonnette située à l’entrée des jardins du couvent. Après avoir exhumé d’une fosse commune, dans le périmètre du ministère de la Défense à Yarzé, les restes de 30 soldats tués le 13 octobre 1990 (17 dont les familles ont participé aux funérailles, car ils ont été identifiés globalement, et 13 non identifiés), le commandement de l’armée poursuit ses investigations et recherche activement l’emplacement où auraient pu être enterrés ses autres soldats disparus dans la bataille du 13 octobre 1990. Car le sort de 61 soldats de l’armée libanaise demeure à ce jour totalement inconnu. Au-delà du côté humanitaire de cette mission et de la nécessité de mettre au jour tous les charniers de la guerre, une question se pose avec acuité : existe-t-il vraiment un charnier à proximité du couvent de Deir el-Kalaa ? Une question à laquelle nul n’est aujourd’hui capable de répondre, faute de preuves. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’armée poursuit une minutieuse enquête avant de procéder à des fouilles. Sinon, que sont devenus les soldats libanais de faction dans la région de Deir el-Kalaa, Beit-Méry, Ras Kafra, Kafra et Monteverde, ce funeste jour du 13 octobre 1990 où l’armée syrienne a envahi les régions chrétiennes ? Quel a été également le sort des deux prêtres qui habitaient le couvent de Deir el-Kalaa, les pères Albert Cherfane et Sleimane Abi Khalil, ainsi que la cuisinière du couvent, Victoria Daccache ? Les suppositions vont bon train. Certains pensent qu’il existe bel et bien un charnier à proximité du couvent Saint-Jean de Deir el-Kalaa où auraient été exécutés non seulement les soldats de l’armée libanaise regroupés en ce lieu par l’armée syrienne après la bataille du 13 octobre 1990 mais aussi les deux prêtres qui se trouvaient au couvent. D’autres réfutent la thèse de l’existence d’un charnier à Deir el-Kalaa et estiment que les corps ont été transportés ailleurs, à Monteverde peut-être, le lendemain ou le surlendemain de la bataille. D’aucuns assurent encore, témoignages à l’appui, qu’un certain nombre de soldats de l’armée libanaise et les prêtres ont été faits prisonniers et transportés en Syrie. Car certains habitants affirment avoir vu les deux prêtres en vie, le lendemain de la bataille. Des suppositions, alimentées par la rumeur, par l’espoir aussi. Quoi qu’il en soit, les parents des soldats disparus, mais aussi l’Ordre des pères antonins n’ont de cesse de connaître le sort de leurs disparus. Alors que les rumeurs s’amplifient, des rescapés de la bataille du 13 octobre sortent de l’ombre et racontent leur vécu personnel, apportant la lumière sur quelques épisodes de cette journée noire. Des soldats, des officiers, des secouristes, qui accomplissaient leur devoir ce jour-là et dont la mission était de défendre leur poste, d’observer l’avancée de l’envahisseur, ou de porter assistance aux blessés. Des habitants aussi qui ont bravé le danger pour sauver des soldats blessés. Parmi ces soldats, certains sont des miraculés. Ils ont réchappé de la tuerie collective orchestrée par l’armée syrienne au couvent de Deir el-Kalaa, le soir du 13 octobre 1990. Ils racontent leur drame et leurs propos sont souvent confirmés par des habitants qui ont contribué à leur évacuation. Mais leurs histoires sont parfois contradictoires, plus précisément lorsqu’elles évoquent les deux prêtres du couvent. Un rescapé de la tuerie collective qui connaissait bien les deux abbés certifie qu’ils ne faisaient pas partie du groupe de prisonniers mitraillés par les Syriens, mais un autre rescapé a raconté à ses sauveteurs qu’il aurait marché sur une soutane, dans le charnier, en se dégageant des corps inertes. Difficile de demander à des rescapés, 15 ans plus tard, de se remémorer avec précision les détails de l’horreur qu’ils ont vécue. De plus, nul n’a été témoin de ce qui s’est passé après la tuerie collective. Seuls quelques noms de rescapés fusent parfois, au cours d’une conversation. Quelques noms de morts aussi. Si la tuerie a bel et bien eu lieu, comme l’indiquent de nombreux rescapés, « aucun de ces témoins n’a assisté à la mise en terre des soldats que l’on recherche », indique le général Hajj Sleimane, responsable de la communication à la direction générale de l’orientation de l’armée libanaise. « Personne non plus n’a vu ce qu’il y avait dans ce camion syrien présumé avoir transporté les corps des militaires tués vers une autre destination. Car il était recouvert d’une bâche », précise-t-il. Quant à l’odeur évoquée par les habitants, si elle représente un indice important, elle ne constitue en aucun cas une preuve du transport de ces mêmes victimes. L’armée base son enquête sur des recoupements de témoignages d’habitants ou de personnes présentes sur les lieux après la bataille du 13 octobre. Elle a même localisé deux ou trois endroits. « Il reste à savoir si ces endroits peuvent avoir servi de fosses communes », observe le général Sleimane. Il n’y a pas si longtemps, le dossier des militaires disparus le 13 octobre 1990 était un sujet tabou. Même au sein de l’armée, était discrédité tout militaire qui racontait avoir participé à la bataille aux côtés du général Michel Aoun. Aujourd’hui, le commandement de l’armée prend les devants et invite officiellement, par la voix du général Hajj Sleimane, toute personne pouvant apporter quelques éclaircissements sur ce qui s’est passé à Beit-Méry, à donner son témoignage à l’armée. Trouver les restes des soldats, mais aussi des civils tués en ce funeste jour et leur donner une sépulture digne de ce nom, serait un moyen de leur rendre au moins leur dignité bafouée. Ce serait indiscutablement un pas vers la vérité, vers la reconnaissance nationale et internationale des crimes de guerre commis par l’armée syrienne au Liban.
Depuis quelques jours déjà, le couvent Saint-Jean de Deir el-Kalaa à Beit-Méry est l’objet d’une enquête minutieuse de la part de l’armée libanaise qui s’est carrément installée dans la maisonnette située à l’entrée des jardins du couvent. Après avoir exhumé d’une fosse commune, dans le périmètre du ministère de la Défense à Yarzé, les restes de 30 soldats tués le...