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Actualités - ANALYSE

ÉCLAIRAGE - Moscou veut affirmer son indépendance en politique étrangère Iran, Syrie, Ouzbékistan : la Russie pactise avec les démons de l’Amérique

L’Iran, la Syrie puis l’Ouzbékistan : Moscou ne craint pas d’afficher son appui à des pays que Washington voudrait mettre au ban de la communauté internationale, affirmant ainsi vigoureusement son indépendance en politique étrangère. Dernier épisode en date : le président ouzbek Islam Karimov, cloué au pilori par l’Occident pour la répression sanglante de l’insurrection d’Andijan en mai, a signé avec Vladimir Poutine lundi au Kremlin un accord d’assistance mutuelle en cas d’agression. Lorsque le traité entrera en vigueur, toute menace contre l’Ouzbékistan équivaudra donc « à une menace contre la Russie », s’est félicité l’autoritaire président Karimov. Un pied de nez en particulier à Washington : il permet à Moscou de se ménager la possibilité d’utiliser largement les installations militaires ouzbèkes, au moment même où les aviateurs américains de la base de Karshi Khanabad (sud du pays) s’apprêtent à plier bagage, Tachkent ayant mis fin abruptement à leur bail. Le cas de l’Ouzbékistan, ex-république soviétique d’Asie centrale, peut être considéré comme une opportunité saisie par la Russie pour afficher son assurance retrouvée. C’est ainsi que l’interprète Fedor Loukianov, rédacteur en chef de la revue La Russie dans la politique globale. « Andijan a représenté une grande tentation pour la Russie, celle de rétablir sa domination politique quelque part, en l’occurrence en Asie centrale. Pour un pays qui entretient une vision postimpériale du monde, il est très difficile de ne pas se laisser tenter », déclare M. Loukianov à l’AFP. Pour lui, ce rapprochement est « une tentative de montrer, avant tout aux États-Unis, que la Russie peut être indépendante et jouer un rôle de premier plan ». Mais défendant Tachkent, Moscou s’attache également à soutenir l’Iran et son droit à ne pas se laisser dicter sa conduite par Washington en matière d’industrie nucléaire. Ainsi que la Syrie, visée pour son rôle présumé dans l’assassinat de l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri (les sanctions souhaitées par les Américains ont été efficacement bloquées par les Russes). Pour Viktor Kremeniouk, analyste moscovite de l’Institut des États-Unis et du Canada, analyser la politique étrangère russe sur la seule base d’une lutte d’influence russo-américaine serait toutefois une simplification exagérée. Moscou « cherche ses propres méthodes pour stabiliser l’Asie centrale, l’Afghanistan, l’Iran... Ce qui correspond aux intérêts de l’Occident. La Russie remplit là une tâche que personne d’autre ne peut prendre en charge », explique-t-il. Et même le soutien russe à M. Karimov peut être présenté comme une action nécessaire pour empêcher la montée d’un islamisme radical en Asie centrale, ajoute M. Kremeniouk. M. Loukianov défend un point de vue similaire à propos de l’Iran. « Je ne dirais pas que la Russie soutient l’Iran en tant qu’État voyou. Il s’agit d’une action coordonnée, la position de Moscou étant très proche (sur le dossier du nucléaire iranien) de celle de l’Union européenne ». Et comme « les États-Unis ne sont pas particulièrement intéressés au lancement d’une nouvelle guerre contre Téhéran », la Russie joue un rôle positif dans la recherche d’un compromis. Elle a ainsi proposé récemment d’enrichir chez elle l’uranium pour les centrales iraniennes. Selon lui, la vigueur retrouvée de la diplomatie de Moscou a été favorisée par les problèmes de l’Occident (les échecs de la Constitution européenne, l’embourbement en Irak) et l’importance des réserves énergétiques russes, accrue grâce à l’envolée des prix du pétrole. Et en dépit des apparences, observe Alexandre Choumiline, directeur du Centre d’études des conflits au Proche-Orient, les relations avec l’Occident « restent prioritaires » pour Moscou. « La Russie n’a pas l’intention de les gâcher, elle louvoie pour éliminer d’éventuels conflits », dit-il. Michel VIATTEAU (AFP)

L’Iran, la Syrie puis l’Ouzbékistan : Moscou ne craint pas d’afficher son appui à des pays que Washington voudrait mettre au ban de la communauté internationale, affirmant ainsi vigoureusement son indépendance en politique étrangère.

Dernier épisode en date : le président ouzbek Islam Karimov, cloué au pilori par l’Occident pour la répression sanglante de l’insurrection...