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Actualités - OPINION

Les lecteurs ont voix au chapitre

Detlev Melhis met le secteur bancaire face à ses responsabilités Selon des informations publiées dans la presse nationale et internationale, la Commission d’enquête internationale de l’ONU (l’UNIIIC), présidée par le magistrat allemand Melhis, aurait demandé la levée du secret bancaire sur les comptes de certaines personnes suspectées dans l’assassinat du président Rafic Hariri, et la « Special Investigation Commission », instituée auprès de la Banque du Liban, aurait accédé à cette demande et ordonné aux banques de la place de Beyrouth de communiquer toutes les informations dont elles disposent sur les comptes ouverts auprès d’elles, directement ou indirectement, par ces suspects. Les signes de dysfonctionnement dans la lutte contre le blanchiment sont inquiétants Si ces informations s’avéraient exactes, le conditionnel étant de mise, elles soulèveraient une question de taille : fallait-il en arriver à ce que l’enquêteur international demande la levée du secret bancaire pour que les banques concernées s’interrogent sur la provenance et la destination de montants importants crédités et débités sur les comptes ouverts et maintenus auprès d’elles par certains de leurs clients ? N’existe-t-il pas des mécanismes « déclencheurs » au sein des banques qui auraient dû attirer l’attention de leurs employés et de leurs dirigeants, et les soumettre à des obligations légales de réaction ? S’il apparaissait à l’issue de la levée du secret bancaire que les comptes concernés ont fait l’objet de mouvements illégaux, la réponse serait simple et brutale, et ce indépendamment de l’assassinat du président Hariri : des « déclencheurs » existent, ils ont certainement « sonné », et alors de deux choses l’une : soit qu’ils n’ont pas été entendus, soit qu’ils l’ont été mais rien n’a été fait, et dans les deux cas la responsabilité des banques est engagée. En la matière, l’inertie est aussi fautive que l’action. Pareil dysfonctionnement serait grave pour des raisons propres aux banques et au secteur bancaire, mais aussi pour des raisons macro-économiques. L’enquête menée par le juge Mehlis a permis de lever le voile sur des pratiques irrégulières dans plusieurs secteurs de la politique et de l’économie libanaises, et il est regrettable qu’il ait fallu un cataclysme et le travail minutieux, têtu et professionnel d’enquêteurs de l’ONU pour que certaines vérités apparaissent enfin. Longtemps mis au ban du Groupe d’action financière sur le financement des capitaux (GAFI) du G7 du fait de sa législation sur le secret bancaire et de certaines de ses pratiques, le Liban a beaucoup peiné pour retrouver une honorabilité internationale. La loi de 1956 sur le secret bancaire, pièce maîtresse de la réglementation bancaire locale qui charpente le secteur le plus florissant de l’économie nationale, a été considérée incompatible avec la lutte mondiale contre le blanchiment de l’argent sale. L’opacité totale du voile jeté par cette loi sur les comptes bancaires, leurs titulaires, leurs mouvements et tout ce qui gravite autour avait conduit les organismes internationaux à mettre le Liban sur une liste noire où il côtoyait des îles aux noms évocateurs devenues soudainement peu fréquentables : Cook, Marshall et autres Caïmans. Pour un État qui dépend lourdement des prêts internationaux et de la notation souveraine cela était mortellement dangereux. Il a fallu promulguer une loi assouplissant le mécanisme de levée du secret bancaire pour que le nom du Liban soit ôté de la liste noire : il s’agit de la loi n°318 de 2001 relative à la lutte contre le blanchiment d’argent. L’adoption de cette loi et la mise en place de la « Special Investigation Commission » (SIC) auprès de la Banque du Liban étaient le prix à payer pour rentrer dans les faveurs de la communauté financière internationale. La réglementation est pourtant claire et d’application facile Cette loi n°318 est souvent présentée au grand public comme un instrument de contrôle externe aux banques exercé par la SIC (et donc par la Banque du Liban) et ayant pour effet de lever ponctuellement le secret bancaire à l’initiative de cet organisme. Mais ce qui est plus rarement dit, c’est qu’il s’agit d’abord et surtout d’un instrument d’autocontrôle des banques. La levée du secret bancaire est l’aboutissement d’un long processus qui dépend d’abord de la vigilance et, il faut le dire, de l’honnêteté des banques. Au quotidien, chaque banque doit « connaître son client » (« Know Your Client ») et scruter ses opérations bancaires à travers des processus détaillés que la Banque du Liban a minutieusement décrits dans une série de directives (notamment n°8488 de 2003) et que la SIC suit de près. Pour ce qui nous intéresse, la banque doit interroger son client sur la provenance des fonds et/ou leur destination chaque fois qu’apparaît une discordance entre l’opération envisagée et l’activité professionnelle du client, ses habitudes ou sa personnalité. En outre, la banque doit considérer comme un signe (une présomption ?) de blanchiment les dépôts d’argent suivis de retraits immédiats et multiples, ainsi que les dépôts dont les volumes ne correspondent pas à l’activité du client. Le déclenchement de ces sonneries d’alarme connues de chaque employé de banque, du guichetier au directeur général, doivent mettre en branle une procédure interne au sein de la banque concernée qui la conduit à investiguer auprès du client et, le cas échéant, une procédure externe en direction de la SIC avec, en bout de parcours, la levée du secret bancaire. Le processus n’est nullement compliqué, et la banque qui faillit à ses obligations ne bénéficie d’aucune excuse. Il ne lui revient en effet pas de se livrer au difficile exercice de qualification de l’activité sous-jacente aux mouvements de comptes de terrorisme, trafic de narcotiques ou d’armes, vol ou détournements de biens publics ou privés (suivant les termes de l’article premier de la loi n°318 modifié en 2003), mais seulement de se poser une question simple, mécanique : les mouvements qu’elle constate sur le compte sont-ils normaux ou pas, c’est-à-dire correspondent-ils au profil du client ou pas ? Le reste est du domaine de la SIC et, en filigrane, du juge compétent. La banque qui ne se pose pas cette question simple ou qui ne met pas tout en œuvre pour y répondre viole la loi. Comme l’a écrit un spécialiste français, avec la nouvelle loi, les banques ne sont plus considérées comme des victimes des pratiques de blanchiment, mais comme des responsables potentiels de ces pratiques ; elles sont au centre du dispositif législatif et judiciaire mis en place pour lutter contre le blanchiment. En violant leur obligation de vigilance, elles causent un dysfonctionnement de tout le système mis en place. Et c’est là que réside la gravité du dysfonctionnement qui aurait été mis en lumière par les informations relatives à l’enquête de l’ONU. Il est en effet logique d’affirmer que si dans cette affaire la SIC s’est mise en mouvement à la demande de la Commission d’enquête de l’ONU et a demandé la levée du secret bancaire sur les comptes de certains suspects, c’est que le déclenchement du processus ne s’est pas fait en interne, à l’instigation des banques concernées, et que donc celles-ci n’ont pas entendu sonner les alarmes internes ou, plus grave, ne les ont pas écoutées. Pourtant la situation relève du cas d’école et il serait impossible pour ces banques de plaider l’ignorance : des clients dont les revenus habituels sont connus auraient effectué des dépôts et des transferts portant sur des montants substantiels qui ne sont pas en rapport avec ces revenus. Les sanctions sont nécessaires De tout cela découlent deux conséquences. D’abord, si les faits relatés par la presse s’avéraient exacts, les banques concernées auraient violé la loi, et les peines criminelles et disciplinaires prévues dans la loi n°318, dans le Code de la monnaie et du crédit, dans le Code pénal et autres textes leurs seraient applicables. Ensuite, et surtout, l’application de ces peines devrait se faire avec la plus grande vigueur parce que le dévoilement de ce dysfonctionnement dans le rapport qui sera soumis par le juge Melhis au Conseil de Sécurité de l’ONU et dont la diffusion sera instantanée et universelle risque de causer la rechute du Liban auprès du GAFI, avec les conséquences qui en découlent au niveau du financement international dont il est tributaire. Il faut convaincre les Libanais et la communauté internationale que la loi n°318 a été promulguée pour être strictement appliquée. Il en va de la crédibilité du secteur bancaire et de celle du Liban. Nasri Antoine DIAB Professeur à la faculté de droit de l’USJ Avocat à la cour Patriote avant tout « Nous ne sommes pas nés pour nous, mais pour notre pays. » (Platon à Archytas – IVe a. J-C) Face à tous les remous qu’occasionnent les périodes de transition où les passions sont exacerbées, parce que l’on s’imagine que l’occupant n’étant plus là, tout va aller comme sur des roulettes et que la fièvre des réalisations s’empare de nos êtres, nous sommes tentés par une précipitation qui peut s’avérer plus que néfaste. C’est dans le calme du soir, lorsque l’instant des dormeurs, des rêveurs, de ces dormeurs aux rêves endormis se présente et sonne le couvre-feu, pour les accompagner dans des bras bienfaiteurs, que je commence ma longue nuit de veille. Du fond de la ville me parviennent les ronflements lourds des laborieux écrasés de fatigue. Tout à l’heure, l’heure des vérités à dire, puis à assumer, tout en m’assurant que tous les éléments de mon discours sont présents, je m’apercevrais, comme le dit notre Giban grec, Nikos Kazantzaki, que « je suis venu pousser mon cri et partir ». Ce cri, c’est un « non » à la négation de l’autre en tant qu’entité sociale réelle, présente sur le terrain ! N’avez-vous donc rien compris, « gens des tentes », de tous les événements que vous avez vécus dans une fraternité intense ? Il vous faut, impérativement, pousser un cri à pleins poumons : patriote, oui, partisan, non ! En effet, un patriote, c’est cette personne qui aime sa patrie et la sert avec dévouement. Le partisan, lui, c’est cette personne introvertie, recroquevillée, attachée, dévouée à une formation politique et qui prend parti pour sa doctrine. Est-ce à dire qu’il n’est pas possible d’être, à la fois, patriote et partisan ? Assurément oui ! La condition sine qua non demeurant d’être d’abord patriote ! Mais au Liban, cela tient du miracle… Toi qui viens de démanteler certaines tentes, avec l’impression du devoir accompli, attention, le danger d’un passé récent te guette ! Arrête-toi un peu et repense à tous les actes de bravoure, refais tes calculs… Je t’offre, en guise de reprise de souffle, cette citation d’Alfred de Vigny dans Servitude et grandeur militaire : « L’histoire est un roman dont le peuple est l’auteur. » Et toi, comment vas-tu écrire l’histoire nouvelle de ta patrie ? Avec quels éléments de réflexion ? Permets-moi de t’en proposer quelques-uns, dont tu disposeras selon les phases par lesquelles tu passeras : a) en premier, note sur un papier ces quelques mots, ces quelques termes : avenir, échéance, choix : révolutionnaire ou révolté ? b) devant cette feuille blanche où ces quelques mots dessinent déjà ton avenir, reviens sur cette nuance importante de patriote et partisan. Tu trouveras, j’en suis sûr, qu’elle est grande, car, effectivement, être patriote, c’est reconnaître dès le sein maternel que cela consiste en un espace, non seulement physique, mais surtout moral et spirituel où chaque citoyen se sent, dans le même temps, la racine, le tronc et les branches de ce cèdre éternel, magnifique par sa divine quiétude. C’est aux pieds de ce cèdre-là que la prière du chrétien, aussi bien que du musulman se transcende en louanges éternelles. Cela est plus fort que l’unité, cela se nomme unicité ! c) échéance : le temps passe vite ; rattrape-le, domine-le de peur qu’il ne prenne le pas sur tes décisions. Pose-toi les questions suivantes : – ai-je une connaissance parfaite de l’état des lieux sociocritiques, nationaux et régionaux des événements actuels ? – suis-je en mesure de revoir de façon analytique et objective mes convictions personnelles et politiques ? d) le choix : le passé et son cortège de malheurs t’ont appris – bien que tu n’aies pas vécu ces situations, directement, mais par tes grands-parents et parents interposés – que la cruauté imbécile ne sert à rien, ne mène à rien… Rien, c’est le néant. Toi, au contraire, tu te dois de remplir cet espace pour être productif à ta société, à ton environnement. Prête l’oreille à cette sorte d’exhortation du « grand Jacques » (Brel) : « Le monde n’a pas besoin de révolutionnaires, mais de révoltés. » L’avant-dernier choix qui te restera à faire est celui d’un chef. Oui, le Liban manque cruellement de chefs ; de cette trempe de chefs qui sait monter au créneau, indiquer la marche à suivre et canaliser les énergies, tout en sachant endosser les responsabilités en cas d’échec et ne pas les imputer à autrui. Le Liban d’après le cataclysme doit profiter de la chance qui lui est présentée de devenir enfin une patrie. La tâche est celle que Jean Jaurès a mise entre les mains de ceux qui l’élisaient : « Il vaut mieux changer l’homme pour changer la société, plutôt que changer la société pour changer l’homme. » Armand PARASKEVAS Formateur de formateurs BILLET En (re)passant par là … La signature au bas du coup de gueule ci-dessous – qui est aussi (comment s’en étonner ?) un acte de foi dans le Liban de demain, celui des jeunes – ne dira peut-être rien, sauf à ceux qui y reconnaîtraient Alcide Borik, l’inénarrable compère du « Théâtre des Dix Heures», celui de la belle époque. Ah, son « Chum cheminée», chantée avec le nasillement qui convient… Il est heureux de constater que l’homme n’a rien perdu de sa verve (forcément caustique), de son amour aussi pour un pays qui longtemps fut le sien ; que lui non plus il n’a pas changé. Sacré Alcide ! Et merci pour le goût des choses et du temps passés. C.M. aQuarante-huit ans sont passés depuis que j’ai mis la clef sous le paillasson. Presque un demi-siècle. Le paillasson est parti, la clef avec, et me revoilà de nouveau de passage par Beyrouth ! J’ai l’impression que tout est là, merveilleusement identique à ce qu’il fut à l’époque du paillasson mais aussi que tout a changé. Les rues, les routes qui cheminaient allègrement sous nos pas, sont devenues soit des lignes de mire sorties d’images virtuelles, soit des chemins réhabilités dans un style typiquement tiers-monde. Les constructions, les bâtisses oscillent entre des modèles directement issus de revues d’architecture modernes et de vieilles façades badigeonnées en série par je ne sais quelle Communauté européenne, comme une foule de vieilles péripatéticiennes aux faciès ravalés par de pesants maquillages. Et puis le Liban de papa représenté par ceux dont le métier (ou le vice) est de représenter les autres… pour leur propre compte s’entend. Ceux qui étaient là en 75 et qui y sont toujours et voudraient y rester avec leur descendance jusqu’à la fin des siècles. Quant au point de vue de certains, il est encore et toujours exprimé avec violence : faire sauter l’autre, sans jamais vouloir comprendre qu’il ne s’agit que d’un autre Libanais qui pense différemment. Le pouvoir, lui, fait montre, au mieux, d’une incurie coupable, au pire d’une complicité criminelle. Comme par le passé, la tradition veut que ceux qui auraient pu faire progresser la démocratie, aider à moderniser les institutions, assurer la primauté de la civilisation en soient durement punis, de préférence dans une hécatombe d’innocents civils (pour l’exemple). Comme par le passé, ce sont encore et toujours les creux discours des responsables déplorant tout, sans lever le petit doigt pour remédier à rien. Reste la jeunesse, la seule chose à avoir changé : formidable ! Elle rejette spontanément les bêtises de papa et veut construire un Liban à la mesure de ses aspirations. Je repars donc bientôt, plaçant tous mes espoirs dans cette jeunesse éprise de liberté et de démocratie bien comprise, cette jeunesse dégoûtée des combines byzantines malsaines et des appétits hégémoniques des loups du voisinage. J’espère sincèrement que le Liban de demain se fera avec ces Libanais-là et contre les autres. Alberto Sidi DELBURGO Peut-on sauver le Liban ? 1- Le constat : Les alliances politiques actuelles sont artificielles, contre nature et contre l’intérêt de la population et du pays. Nous avions des milices armées qui ont détruit une génération entière de Libanais et nous voilà avec des milices politiques qui sont en train de détruire l’espoir de plusieurs générations. Allons-nous laisser faire ? 2- Les possibilités : Sommes-nous capables de sortir de cette autodestruction autrement que par les discours ? A-t-on les moyens en hommes et en matériel pour passer à l’exécution ? Qui peut nous aider à la réalisation de nos espoirs ? Les Libanais compétents existent et en nombre. Des amis du Liban existent et en nombre. Quelle est la personne qui pourra les mobiliser ? 3- Les étapes d’exécution : Première étape : deux groupes armés, déclarés, existent, l’un libanais, l’autre palestinien dans les camps. Le désarmement des deux groupes doit se faire simultanément, en commençant par le palestinien, tout en lui garantissant sa sécurité, par la Finul par exemple. Le groupe libanais doit intégrer, après formation adéquate, les structures de l’État. Deuxième étape : les milices politiques doivent renoncer à leurs slogans vides de sens (genre : progressisme, arabisme, patriotisme, que sais-je encore…) et s’en tenir aux slogans des jeunes qui ont donné le coup d’envoi d’un nouveau Liban, et surtout leur céder la place qui leur revient de droit désormais pour réaliser les objectifs qu’ils ont annoncés. Troisième étape : qui doit chapeauter l’ensemble ? Le Liban a actuellement la chance d’avoir la personne qualifiée pour mener à bien cette tâche. Son nom est sur toutes les lèvres. Suivons l’exemple de la France. En 1958, elle était au bord du gouffre. Les parties politiques traditionnelles n’arrivaient pas à s’en sortir. Malgré leur hostilité à l’égard du général de Gaulle, elles ont fait appel à lui pour opérer le redressement. 4- Donner la chance: Donnons la chance au Liban en favorisant l’aboutissement de ces étapes, qui doivent se réaliser en même temps, car le temps presse. On ne peut bâtir sur des mensonges et des fausses alliances. Nous ne pouvons plus attendre encore quinze ans pour dire que nous nous sommes trompés. Les Libanais méritent mieux que cela. Henri K. SAMAHA Toujours et jamais La scène se passait à Paris, à la Chambre des députés, quelques mois avant l’écroulement du second Empire en 1870. L’Italie était en pleine agitation politique, en quête de son unité nationale, désirant annexer Rome, la cité papale depuis des siècles. L’armée française, avec ses zouaves pontificaux, défendait le pouvoir temporel du pape contre Garibaldi, le champion de l’unité politique et territoriale italienne. Émile Ollivier, brillant avocat et Premier ministre français de l’époque, dans un virulent discours, du haut de la tribune de l’Assemblée nationale, lança cette phrase menaçante : « Jamais la France ne permettra à l’Italie de s’emparer de Rome », sous les applaudissements frénétiques de la majorité des députés. Discrètement, Napoléon III tira la manche de son Premier ministre et lui dit à mi-voix : « Excellence, il y a deux mots qu’il faut éviter de prononcer en politique : toujours et jamais. » J’ajouterai : le mot éternel, qu’on entend aujourd’hui de la bouche de certains leaders politiques du Proche-Orient. Victor Hugo, dans un poème célèbre, avait déjà rappelé la leçon aux puissants de ce monde, quand il fait dire à Napoléon Ier, fou de joie à la naissance de son fils : « L’avenir, l’avenir, l’avenir est à moi… » Paroles téméraires, condamnées par l’auteur des Châtiments, qui répond : « Non, sire, l’avenir n’est à personne, l’avenir est à Dieu. » Paroles empreintes de sagesse qu’il faudrait rappeler aux médias de notre époque. La sagesse arabe veut que l’on ajoute à ses jugements sur l’avenir : «… Si Dieu le veut. » Yves CARIOU Les gardiens des lieux L’ensemble des Libanais avaient attendu anxieux les prises de position du patriache maronite Mgr Nasrallah Sfeir après les élections législatives du printemps dernier. Ils ont également suivi avec intérêt le discours politique du leader des Forces libanaises avant son voyage. Comme ils cherchent les finalités des positions tactiques de M. Walid Joumblatt et les orientations du président Amine Gemayel qui vient de retrouver son leadership au sein du parti Kataëb. La réponse de tous est la même : l’attachement à la démocratie consensuelle, raison d’être du Liban, comme l’avait conçue le grand penseur Michel Chiha. C’est cette même idée de dialogue national que Kornet Chehwane avait défendue lors des élections du printemps dernier. Il s’agit d’abandonner toute velléité de concevoir unilatéralement l’avenir du Liban, que le porteur d’une telle volonté soit une des composantes communautaires libanaises, un parti politique ou une milice. Au faîte de sa puissance, Rafic Hariri respectait scrupuleusement le consensus. Au lendemain des dernières élections, M. Saad Hariri a, de son côté, prouvé qu’il respectait le legs paternel. Le président Nabih Berri s’est, lui aussi, mis à l’heure. Ils sont tous les gardiens des lieux. Bienvenue aux autres. Ibrahim K. GEMAYEL À May l’héroïque Je n’aurai retenu de ce visage qu’un sourire. Je n’aurai retenu qu’un radieux sourire. Un sourire qui, tous les matins, pénétrait notre cœur comme le rayon de soleil pénètre la chambre pour l’éclairer. Aimée, adorée, adulée… Nous t’attendions impatiemment et te suivons passionnément… Tu nous informais de tout et nous mettais pour ainsi dire au courant de tout. Tourbillonnante, pétillante, tu parlais autant avec tes mains qu’avec ta bouche… Et tu possédais l’art de faire parler ceux réticents à répondre à tes questions. Non ce sourire ne disparaîtra pas ; la volonté divine en a décidé ainsi, heureusement. Certes, il nous manque déjà mais il retournera, et tu reviendras très vite, plus fraîche et souriante que jamais. Et cet angélique sourire restera éternellement gravé dans nos cœurs. Bravant tous les dangers, et ils sont énormes. Comme beaucoup d’autres, tu as eu le courage – dans cette république bananière – de croire dans le pouvoir de l’information. Comme tu as eu raison. Avec la force du ciel, tu surmonteras l’épreuve. Nous ne courberons pas l’échine. Grâce à toi et à tous les autres, ils sont déjà à genoux. Bruno SPAGNOLO Faisons quelque chose ! Où est notre armée quand on a besoin d’elle ? Où sont les dizaines de barrages que le peuple libanais devait subir le 14 mars 2005 ? Et les arrestations à la pelle des défenseurs de la liberté ? L’armée a pour mission d’assurer la protection des citoyens et celle du territoire. Il est grand temps qu’elle assume ces fonctions. Oui, je serais prête à affronter toutes sortes de mesures de sécurité chaque jour, à chaque intersection, à chaque coin de rue. Alors arrêtons les suppositions, les exclamations, les interrogations, les apitoiements, les déclarations et faisons quelque chose ! Katia BOUERI Le prix des réformes avortées Par deux fois dans le « Courrier des lecteurs », respectivement le 17 août, sous le titre « Taxes sur l’épargne », puis le 7 septembre, sous le titre « Taxes inutiles », j’avais tenté de faire parvenir ma plainte aux responsables. Mon regard est tombé sur l’interview, le 10 septembre, de M. Azour, notre ministre des Finances, qui veut réformer l’administration publique et les instances gouvernementales. En tant qu’épargnant d’un modeste montant qui m’a été accordé à titre d’indemnités après 70 ans de services actifs, j’avais déposé cette somme dans les banques en caisse d’épargne, aux taux officiels prévus. Or voilà qu’un événement imprévu vient interrompre les opérations routinières se rattachant aux clauses des comptes d’épargne. Il s’agit du retour à l’époque de la Conférence de Paris 2, quand feu le regretté Premier ministre Rafic Hariri avait présenté un programme de réforme à la réunion des bailleurs de fonds internationaux réunis en novembre 2001 à Paris. Le Liban s’était alors réjoui d’avoir collecté environ trois milliards de dollars, ce qui lui avait permis d’éviter un krach financier, mais les réformes en question, de l’aveu de M. Siniora lui-même, n’avaient jamais vu le jour (voir conférence du Premier ministre le samedi 17 septembre à son départ de Beyrouth pour New York). Alors, à nouveau la question se pose : à quoi aura servi la taxe (n° 497/2003) perçue depuis deux ans sur nos comptes d’épargne pour des réformes avortées ? Est-ce une taxe à vie pour un avenir incertain ? Raymond CHEAIB Adressez vos commentaires par fax (01/360390), par lettre (rubrique Courrier des lecteurs, boîte postale 2488) ou par mail : redaction@lorientlejour.com
Detlev Melhis met le secteur bancaire face à ses responsabilités

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