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Eclairage - Le procès avait été intenté en 1994 par l’opposition Kataëb La justice frappe Pakradouni et ses prédécesseurs depuis 1989 « d’illégalité et d’illégitimité »

Les premiers signes avant-coureurs étaient déjà perceptibles au lendemain du début de l’intifada de l’indépendance, lorsque trois membres de la direction politique Kataëb avaient déjà commencé à remettre en question les orientations politiques prosyriennes et loyalistes du parti. Mais l’embryon de révolte avait été rapidement maîtrisé, et Georges Kassis, principal contestataire, avait été radié du parti pour son insoumission. C’est une nouvelle gifle, bien plus importante, et bien plus énorme sur le plan de la portée symbolique, qui vient d’être infligée à la direction du parti et à son prestige. Le tribunal de première instance de Beyrouth, présidé par le juge Fady Élias, a en effet décidé de considérer comme illégales et illégitimes les élections qui ont eu lieu au sein de la formation depuis 1989, c’est-à-dire, respectivement, celles de 1989, 1992, 1995, 1998 et 2001. La conséquence de ce jugement est de frapper d’illégalité les directions successives du parti depuis 1989, les décisions de ces directions, ainsi que leurs présidents respectifs, Georges Saadé, Mounir el-Hajj et Karim Pakradouni, déjà taxés d’illégitimes par l’opposition à Saïfi, que ce soit celle de l’ancien chef du parti, Élie Karamé, ou de l’ancien président de la République, Amine Gemayel. La décision ne s’est pas contentée de statuer sur la légitimité et l’illégalité des différentes directions du parti depuis 1989. Elle a également nommé l’ancien magistrat Hafez Zakhour directeur provisoire des affaires du parti Kataëb, précisant que sa tâche sera d’organiser de nouvelles élections à Saïfi dans les plus brefs délais (les prochaines élections étaient prévues en mai prochain). À la base de cette décision, il existe un procès intenté depuis 1994 par les membres de l’opposition Kataëb d’Élie Karamé: Antoine Moarbès, Khalil Nader, Antoine Richa, Antoine Jazzar, Chaker Aoun, Élie Karamé lui-même, et Michel Jabbour, et soigneusement mis à jour par Me Moarbès lors de chaque scrutin depuis cette date. C’est conformément à ce procès que l’opposition Kataëb remettait systématiquement en cause la légalité et la légitimité de toutes les élections au sein du parti depuis 1989, sur base de leur contravention aux statuts de la formation. Le groupe de vétérans refusait d’envisager une participation à la vie politique du parti tant que les statuts de 1989 n’auraient pas été modifiés, ce que le jugement rendu hier a fait, en réclamant que les prochaines élections aient lieu sur base des statuts qui étaient d’usage avant le scrutin de 1986. L’invalidation du mandat de la direction actuelle du parti (et de toutes celles qui l’ont précédée) est donc avant tout une victoire résultant de onze ans de détermination de Me Antoine Moarbès et de ses compagnons. Mais la journée d’hier constitue également une victoire pour l’ancien président Amine Gemayel. Le tribunal de première instance de Beyrouth a également annulé la décision du parti, en date du 6 mai 2002, qui avait radié Amine Gemayel de la formation. Dans son jugement, le tribunal a souligné que M. Gemayel recouvre ainsi son statut de partisan. L’ancien chef de l’État a toujours fait peu de cas de cette décision de la direction de Saïfi que tous les opposants Kataëb avaient jugée à l’époque comme strictement vindicative. Mais cette double réhabilitation ouvre aujourd’hui la voie à une nouvelle étape. L’ancien président ne s’y est pas trompé, puisqu’il a évoqué, dans un commentaire de la décision, « le temps révolu de l’hégémonie et du régime sécuritaire », qui ont créé de toutes pièces, selon lui, les dissensions au sein du courant kataëbiste. Le parti Kataëb a été, selon lui, victime de l’opération de mainmise qui a visé l’ensemble des courants politiques souverainistes. M. Gemayel a placé l’étape à venir sous le signe de la réconciliation interkataëb, pour « une renaissance du parti » dans la continuité de son rôle et de ses options historiques. L’objectif étant désormais de redynamiser le parti et de resserrer les rangs. De son côté, Élie Karamé, qui a rappelé que le procès avait été intenté en 1994 peu avant sa radiation du parti par Georges Saadé, a mis en évidence la portée symbolique énorme du jugement, qui va enfin donner la chance au parti de revenir à lui-même. Mais, pour cela, il faudra de « la crédibilité » et « un retour à l’esprit militant » qui ont de tout temps caractérisé les Kataëb. Il reste à savoir quelle sera la réaction, à froid, du chef du parti frappé d’illégalité, Karim Pakradouni. Dans un communiqué, M. Pakradouni s’est dit surpris par cette décision judiciaire, estimant qu’au moment « où les dossiers issus de la guerre sont clos, celui des Kataëb est étrangement rouvert », et qu’en attaquant la légalité de Georges Saadé, on « porte un coup à Taëf même », dont Saadé avait été l’un des protagonistes. Une argumentation pour le moins très particulière. M. Pakradouni fera appel devant les tribunaux, ce qui fait que, pour l’instant, la décision ne sera pas exécutoire. Mais en attendant le verdict de la cour d’appel, il faudra bel et bien songer à l’avenir d’un parti depuis trop longtemps schizophrène, déchiré entre un passé idyllique et un présent irrémédiablement lourd. Tout dépendra de la réaction de M. Pakradouni, qui a désormais le choix entre la fuite en avant et la paix des braves, même si cette paix compromissoire correspond, pour lui, à un retour dans les rangs de la masse partisane. Michel HAJJI GEORGIOU

Les premiers signes avant-coureurs étaient déjà perceptibles au lendemain du début de l’intifada de l’indépendance, lorsque trois membres de la direction politique Kataëb avaient déjà commencé à remettre en question les orientations politiques prosyriennes et loyalistes du parti. Mais l’embryon de révolte avait été rapidement maîtrisé, et Georges Kassis, principal...