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Social - Projet lancé par deux ONG pour surmonter les défis logistiques Les handicapés et les élections : pour un changement dans le discours politique

Comment intéresser les politiques à des sujets qui ne sont pas de l’ordre de la politique politicienne ? Deux associations pour la revendication des droits des handicapés sont déterminées à faire entendre leur voix durant ces prochaines élections, même si la marge de manœuvre reste limitée dans un climat politique aussi tendu et dans des délais aussi courts. Ainsi, l’Union des handicapés du Liban et l’Association de la jeunesse non voyante ont lancé, il y a environ une semaine, un projet financé par l’organisation internationale IFES, qui consiste à s’adresser aux candidats et aux différentes forces politiques, d’une part, et à informer les handicapés sur leurs droits électoraux et politiques, d’autre part. Dans ce cadre, une première table ronde est organisée demain, à 16h, à l’Ordre des ingénieurs, avec les représentants des différents partis, pour une discussion qui porterait, pour une fois, sur une cause de dimension nationale. Les droits des handicapés, qui étaient tout à fait méconnus par le passé, ont fait l’objet d’une loi moderne, portant le n° 220 (datant de 2000), qui n’a été que très peu appliquée. Et pourtant, les handicapés, pour être l’une des catégories les plus marginalisées du pays, n’en sont pas moins une partie de cette société, souffrant des mêmes maux qu’elle. C’est ce sur quoi insiste Sylvana Lakkis, présidente de l’Union des handicapés. « Comment prétend-on résoudre les problèmes de pauvreté ou de développement sans aborder la question de l’insertion sociale des handicapés et autres groupes marginalisés ? » se demande-t-elle, soulignant une nouvelle fois l’intérêt d’introduire ce sujet social dans le discours politique. Qu’est-il encore possible de réaliser d’ici aux élections ? Le principal objectif de ce projet est de faciliter l’opération de vote aux handicapés. « J’ai voté à plusieurs reprises parce que je ne crois pas au boycott, raconte Mme Lakkis. À chaque fois, le bureau de vote est au troisième ou quatrième étage. Les escaliers sont étroits et j’ai besoin qu’on m’aide pour y arriver. Une fois dans le bureau, il ne m’est jamais possible d’atteindre l’isoloir à cause de la disposition des chaises des délégués. Le caractère confidentiel de mon vote en est affecté. » Nizar Ibrahim, coordinateur de la campagne et non-voyant, indique lui aussi qu’il a voté trois fois. « Je suis obligé de solliciter les services d’une personne en qui j’ai confiance pour entrer avec moi dans l’isoloir, dit-il. On ne m’a jamais interdit de le faire, mais je m’attends toujours au pire, parce que les chefs des bureaux de vote ne sont pas toujours au courant des besoins spéciaux. » Il fait remarquer que l’entourage et la famille sont toujours des éléments de pression sur l’électeur, mais bien plus dans le cas des handicapés. Pratiquement, sur le terrain, le projet visera à réhabiliter quelques bureaux de vote qui serviront d’échantillons. « Il n’est pas question pour nous de revendiquer des bureaux de vote spéciaux, ce serait contre notre conception de l’insertion », affirme Mme Lakkis. Donc, pour le temps qui reste, les promoteurs du projet, qui ont sollicité l’aide du ministère de l’Intérieur, construiront des rampes spéciales dans ces bureaux de vote choisis. Ils distribuent déjà des brochures et ont préparé des posters sur les droits des handicapés au vote dans la dignité. La campagne médiatique inclura également des spots télé. Les deux associations ont par ailleurs préparé un document recensant les critères d’insertion lors des élections : – Le droit du handicapé d’être accompagné d’une personne qui l’aide. – L’écriture des noms des candidats dans un grand caractère sur des listes placées à l’intérieur des isoloirs. – Les photos des candidats devraient également se trouver dans l’isoloir. – La réhabilitation des bâtiments en conséquence : la permission au handicapé de garer sa voiture devant la porte, la construction d’une rampe, l’élargissement des portes, la disposition des chaises de manière à ce que le passage soit facilité, l’utilisation d’une table ouverte des deux côtés pour que le handicapé puisse atteindre facilement l’urne… Observateurs spéciaux Dans un plus long terme, les deux associations proposent certains articles à ajouter à la loi électorale portant spécialement sur ce sujet, en rapport avec les recommandations de la loi n° 220. « Ces modifications logistiques sont simples et peuvent être mises en place sans difficulté, souligne Mme Lakkis. L’affaire est plus compliquée quand il s’agit du handicap mental, puisque les cas sont extrêmement diversifiés, certains étant en mesure de voter, d’autres pas. Pour une autre fois, nous proposons qu’il leur soit permis de présenter une demande deux mois avant le scrutin, afin que l’on tienne compte de leurs besoins spéciaux. » Des observateurs, chargés de surveiller ce point précis durant le scrutin, sont actuellement formés par l’Association pour la démocratie des élections dans le cadre du projet. Cette campagne est de toute évidence adressée aux hommes politiques – « Ils doivent respecter nos votes qui sont nombreux », souligne Mme Lakkis – mais aussi, et surtout, aux handicapés, qui ont souvent trop peu confiance en eux pour aller voter dans des conditions difficiles, ou alors qui se laissent guider sans faire leur propre choix. « Nous effectuons actuellement des tables rondes dans toutes les régions, explique Mme Lakkis. Il est surprenant de voir les réactions des handicapés, déterminés, souvent pour la première fois, à ce que leur voix compte. Mais il ne faut pas se faire trop d’illusions dans le court terme. » Les deux associations ne comptent pas présenter des candidats cette année. « Mais nous sommes prêts à soutenir d’éventuels candidats handicapés, sans pour autant nous départir de notre neutralité, ajoute Mme Lakkis. Toutefois, les circonstances peuvent changer d’ici à 2009. » Elle plaide, d’ici là, pour l’avènement d’une véritable démocratie dans laquelle les questions sociales prendront la place qui leur revient. Suzanne BAAKLINI
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