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Actualités - CHRONOLOGIE

Conférence à La Sorbonne de l’ancien Premier ministre Michel Aoun : « La laïcité est la forme la plus apte à répondre aux aspirations de notre jeunesse »

L’ancien Premier ministre Michel Aoun a donné une conférence hier à la Maison de la recherche, à La Sorbonne (Paris), dans le cadre des « Journées géopolitiques du Liban », devant un parterre de parlementaires français et de personnalités académiques françaises et libanaises. « Vous comprendrez ma joie et celle de mes concitoyens à l’annonce de cette nouvelle historique » qu’est l’annonce du retrait total des forces syriennes prévu le 30 avril, a indiqué d’entrée Michel Aoun à l’adresse de ses interlocuteurs. « Si le Liban retrouve enfin sa totale indépendance et bientôt sa pleine souveraineté, il le doit en premier lieu au combat pacifique et persévérant qu’aura mené son peuple, et singulièrement sa jeunesse courageuse et héroïque, durant des années», a déclaré le général. « Notre société porte en elle des caractéristiques qui en font sa singularité, qui sont autant de points forts, qui peuvent se révéler source de faiblesse. En additionnant ses différences, elle devient plus riche. En les opposant, elle en gaspille les avantages et n’en subsiste souvent qu’un solde négatif. Dès lors, tout dépend de la faculté des différentes composantes de la société à exploiter cette pluralité qui la caractérise en l’investissant dans son bien-être et son progrès, soit à l’inverse, dans sa division et son éclatement », a-t-il précisé. Et d’indiquer qu’« à chaque atout que présente une société pluriculturelle peut s’opposer un risque : ainsi, la tendance à l’échange et l’émulation que favorise la diversité est toujours menacée par la tentation de l’hégémonie de parties qui refusent d’accepter la différence culturelle de leurs concitoyens. Au droit à la différence s’oppose le danger de la pensée unique. La diffusion d’une culture de la tolérance, exigence principale et ultime d’une société hétérogène, reste soumise aux assauts des intégrismes et autres fanatismes. » « Pour réussir à dépasser les différences et répondre aux exigences de sa vocation, une société pluraliste et plurielle doit impérativement cultiver le respect du droit à la différence d’une part, mais elle se doit également de proposer à toutes les entités qui la composent, individuelle, collective ou représentative, des valeurs communes à partager dont la portée transcende les différences, au premier chef desquelles le respect de toutes les libertés, et, particulièrement, des libertés de conscience et d’expression. L’un des premiers défis auxquels est confrontée notre société est celui de la nécessité de réconcilier le citoyen avec les institutions censées le représenter et le défendre dignement, afin d’exiger de sa part qu’il s’acquitte de ses devoirs de citoyen dans le respect de la loi. C’est pour atteindre cet objectif prioritaire que je propose de mettre en place une « charte du citoyen libanais », inspirée de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et de l’esprit des lois, qui aura pour vocation, sous le contrôle d’une institution ad hoc, de définir les droits et les devoirs de tout citoyen et régir ses rapports avec l’État », a-t-il indiqué. Respecter la moralité publique Selon le général Aoun, « les éléments de pouvoir essentiels sont à réanimer et restructurer: l’exécutif, le législatif, la justice, sans oublier le quatrième, les médias ». « Un retour à la moralité publique s’impose afin que l’intégrité morale redevienne la règle et que la confiance régisse à nouveau, naturellement, la relation entre le citoyen, ses dirigeants, et tout représentant des pouvoirs publics », estimant que « la moralité publique est l’exigence capitale, la condition sine qua non, pour mener avec succès la réhabilitation de la vie politique». En parallèle, Michel Aoun a préconisé « une redéfinition de la mission des institutions et services sécuritaires ». « Les organisations chargées de la défense et du maintien de l’ordre doivent à nouveau remplir le rôle qui leur est dévolu. Elles n’ont pas pour mission d’aider à pérenniser le régime et lui permettre d’assouvir ses ambitions », a-t-il dit. Évoquant le dossier de la justice, le général a déclaré que « depuis l’entrée du Liban dans l’ère syrienne, celle-ci a été vidée de son sens et a perdu toute crédibilité. Soumise au pouvoir politique, totalement inféodée aux services occultes et dressant l’arbitraire comme règle de base, la justice du Liban a perdu, comme lui, l’indépendance nécessaire à la justification de sa raison d’être ». Lutter contre trois syndromes pathologiques Évoquant ensuite les engagements du Liban vis-à-vis du monde et son respect du droit international, le général Aoun a abordé la question des relations libano-syriennes. « Nos rapports à la Syrie s’inscriront dans le cadre normal et naturel des relations entre deux pays voisins. Dès lors que le dernier soldat syrien aura quitté le Liban, une révision de nos relations se fera dans ce cadre. Restera à régler le problème épineux et humain des citoyens libanais détenus arbitrairement dans les prisons syriennes. Leur libération – une exigence – sera le point de départ d’une nouvelle ère dans nos rapports avec la Syrie, basés sur le respect mutuel des souverainetés et des intérêts des deux pays. Nous serons bien évidemment appelés à reconsidérer les accords multiples conclus ces dernières années, qui nous semblent pour le moins relever de l’abus de position dominante. Si les relations entre nos deux pays se voudront fraternelles, elles ne s’établiront pas moins dans un cadre diplomatique normal avec échange de représentations respectives. » « Les défis à relever sont immenses. Une société nouvelle verra le jour, épousant son temps et avançant vers la modernité. Trois obstacles majeurs parsèment notre chemin vers la rénovation. Trois syndromes pathologiques, véritables féodalités culturelles, hérités d’une époque que nous œuvrons à voir bientôt révolue et qui empêchent la démocratie réelle de s’installer définitivement, insufflant progrès et ouverture au pays. Le premier est ce que j’appelle le féodalisme politique, synonyme de stagnation, voire de régression institutionnelle et de divorce entre une société aspirant à la modernité et des institutions qui relèvent de l’archaïsme politique. Le second est le féodalisme confessionnel fanatisé qui est un processus d’autodestruction sans fin, de captation des potentialités humaines par un ensemble de pseudopouvoirs fonctionnant à rebours des intérêts nationaux. Le troisième enfin est le féodalisme financier, à l’origine du système de clientélisme, instaurant la corruption des esprits et des cœurs au service exclusif de certains. Ces trois types de féodalisme sont à éliminer et les habitudes qui les engendrent à modifier. Ainsi, pourrons-nous établir un nouveau contrat social entre Libanais », a en outre affirmé Michel Aoun. Pour la laïcité Mettant l’accent sur l’aspiration de l’être humain en général et des Libanais en particulier en faveur de la liberté, le général a indiqué que « chaque fois que nous serons confrontés au choix entre la liberté et tout autre projet, idéologique, religieux, ou politique, quel qu’il soit, notre choix sera celui de la liberté ». Selon lui, c’est désormais aux Libanais de décider de la forme du nouveau Liban, « en fonction de l’ampleur du dénominateur commun qu’ils auront pu atteindre. En ce qui nous concerne, nous estimons que la laïcité est la forme la plus apte à répondre aux aspirations profondes de notre jeunesse », a-t-il souligné. Et de conclure : « À cette époque, où le monde connaît l’une des plus grandes crises culturelles de son histoire (...), le Liban a l’ambition de réitérer l’exploit d’être le cœur de l’Occident et la raison de l’Orient. Un endroit où les uns et les autres ne viendront plus régler leurs problèmes, mais où ils puiseront l’inspiration, l’exemple à suivre, pour les régler chez eux. » Il convient par ailleurs de noter qu’avec Dory Chamoun, Ghenwa Jalloul et Gabriel Murr, Michel Aoun a donné hier une conférence à la faculté de médecine de l’USJ.

L’ancien Premier ministre Michel Aoun a donné une conférence hier à la Maison de la recherche, à La Sorbonne (Paris), dans le cadre des « Journées géopolitiques du Liban », devant un parterre de parlementaires français et de personnalités académiques françaises et libanaises.
« Vous comprendrez ma joie et celle de mes concitoyens à l’annonce de cette nouvelle historique »...