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Actualités - OPINION

ÉCLaIRAGE - Près de quatre heures d’entretien hier entre Waël Bou Faour, émissaire du chef du PSP, et l’ancien Premier ministre à Paris Aoun à « L’Orient-Le Jour » : Une plate-forme commune et pas de contradictions avec Joumblatt

Il a fallu près de quatre heures hier pour l’ancien Premier ministre, le général Michel Aoun, et l’émissaire spécial du chef du Parti socialiste progressiste (PSP), Walid Joumblatt, dépêché hier auprès du général à Paris, Waël Bou Faour (membre du bureau politique du PSP), pour commencer à rattraper quinze ans de rupture de dialogue entre les deux hommes. Au plus fort de la « période Aoun », entre 1988 et 1990, les relations n’avaient jamais été totalement interrompues entre les deux hommes. Ainsi, une délégation du Bureau central de coordination nationale (BCCN), le mouvement qui encadrait à l’époque les manifestations populaires à Baabda, avait visité Moukhtara en 1990, quelques mois avant l’invasion syrienne du 13 octobre 1990 qui avait conduit le général Aoun à se réfugier à l’ambassade de France. Dans un geste d’une très grande courtoisie et révélateur d’un esprit chevaleresque, le chef du PSP avait d’ailleurs accueilli les cadres du BCCN à l’hôtel Mir Amin, leur offrant ainsi pendant quelque temps un refuge loin des contrées du Metn-Nord et de Baabda, contrôlées par les forces syriennes. Évidemment, les temps ont changé quinze ans après. Quinze ans durant lesquels les contacts ont été rompus entre le général, dans son exil parisien, et Walid Joumblatt. Quinze ans surtout durant lesquels les tranchées réelles ont cessé d’exister. Quant aux barricades psychologiques, elles commencent peu à peu à disparaître. Ainsi, dès 2000-2001, Walid Joumblatt avait fait une tentative d’ouverture envers l’ancien Premier ministre, estimant que ce dernier devait faire « l’autre moitié du chemin ». Mais les circonstances politiques n’étaient pas encore propices : il a fallu que deux nouvelles dynamiques se mettent en place pour que le dialogue reprenne entre les deux parties : une dynamique internationale, avec une remise en question par la communauté internationale du statu quo prévalant au niveau du dossier libanais depuis 1990, et une dynamique locale, centripète et fondée sur le dialogue, la refonte de l’opposition sur base du rétablissement de la souveraineté, et la réconciliation nationale. Hier, Waël Bou Faour et Michel Aoun n’ont fait qu’amorcer une reprise de langue entre le Courant patriotique libre (CPL-aouniste) et le PSP au plus haut niveau (le dialogue entre étudiants aounistes et progressistes, dont M. Bou Faour était le pilier essentiel côté PSP, dure, lui, depuis quatre ans et a débouché sur des actions communes, notamment le camp de Baakline en 2001). Les deux hommes ont ainsi procédé à « une discussion très approfondie » qui a porté sur le rétablissement de la souveraineté, de l’indépendance et de la libre décision et sur la nécessité d’unifier l’opposition, selon les termes du général Aoun. Les points de divergence ont également été évoqués, a-t-il précisé, évoquant que chaque point avait été passé à l’étude, avec ses aspects positifs et négatifs. Le général Aoun a indiqué à L’Orient-Le Jour qu’« il existe déjà un tronc commun et pas de contradictions » entre ses positions et celles du PSP, mais juste « une divergence sur la façon d’aboutir aux résultats voulus », précisant qu’il s’agit là d’un premier contact et que « le dialogue sera poursuivi et consacré par une rencontre avec Walid Joumblatt, que ce soit à Paris ou à Beyrouth ». Selon l’agence al-Markaziya, M. Joumblatt devrait effectuer très bientôt une visite dans plusieurs pays d’Europe pour rencontrer des responsables européens. Se pourrait-il qu’en chemin, le domicile de Michel Aoun soit une des étapes de son voyage ? La question reste entière. Cette reprise du dialogue entre Aoun et Joumblatt via Bou Faour devrait raffermir encore plus la dynamique visant à resserrer les liens de l’opposition au Liban, en prévision, certes, des législatives, mais aussi dans une optique plus large. Le processus, qui regroupe désormais les aounistes, est déjà enclenché, et le scrutin du printemps constituera un premier test majeur pour juger de sa viabilité. Mais les signaux qui commencent déjà à apparaître, à quelques mois des élections, sont positifs, notamment en ce qui concerne la coordination Aoun-Bristol. Ainsi, le Amid du Bloc national, Carlos Eddé, a-t-il rencontré le général pas plus tard que lundi, une réunion préparatoire à la visite de Waël Bou Faour et dont le résultat a été positif. Par ailleurs, l’ancien président de la République, Amine Gemayel, qui a reçu hier à son domicile de Sin el-Fil une délégation du CPL formée de MM. Michel de Chadarévian et Gebran Bassil, a contacté par téléphone le général Aoun. Il s’agissait du premier contact direct entre les deux hommes depuis l’an 2000, date à laquelle le président Gemayel était rentré d’exil. Le fait en lui-même est important, dans la mesure où la partielle de Baabda-Aley après le décès du député Pierre Hélou avait considérablement détérioré les rapports entre Michel Aoun et Amine Gemayel. Et les municipales de l’an dernier n’avaient pas été l’occasion d’améliorer les rapports en dents de scie qu’entretiennent les deux hommes depuis l’époque où M. Gemayel était à Baabda et M. Aoun à Yarzé. Durant sa rencontre avec les deux cadres aounistes, l’ancien chef de l’État a mis l’accent sur la nécessité d’élaborer un programme commun d’opposition qui dépasse les contingences électorales. Autre preuve de cette coordination entre les différentes forces de l’opposition, Waël Bou Faour avait tenu le président Gemayel au courant des détails de sa visite à Michel Aoun avant de se rendre à Paris. Il reste que l’essentiel, dans cette dynamique, est le « retour à la normale » qu’elle est progressivement en train d’instaurer, loin du climat d’exclusives et d’exclusions créé sur la scène interne après la fin de la guerre. Il reste qu’une fois que la rencontre Aoun-Joumblatt sera devenue une réalité, il faudra, sans plus tarder, que d’autres réunions similaires se déroulent. Notamment une rencontre Aoun-Geagea, incontournable pour effacer définitivement tous les vieux clivages hérités de la guerre et réintégrer tout le monde dans un système politique purifié et rendu à ses fils sur les bases élémentaires de la souveraineté et l’indépendance. Mais il faudra, pour ce faire, que le pouvoir y mette un peu du sien, en permettant à Samir Geagea de recouvrer enfin la liberté et son statut de chef de parti et à Michel Aoun de regagner les terres libanaises, sans que l’épée de Damoclès d’une justice vindicative ne continue à planer au-dessus de sa tête. Michel HAJJI GEORGIOU
Il a fallu près de quatre heures hier pour l’ancien Premier ministre, le général Michel Aoun, et l’émissaire spécial du chef du Parti socialiste progressiste (PSP), Walid Joumblatt, dépêché hier auprès du général à Paris, Waël Bou Faour (membre du bureau politique du PSP), pour commencer à rattraper quinze ans de rupture de dialogue entre les deux hommes.
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