Va te faire fuel

Le dossier de l’électricité qui agite le landernau politique et social nous aura au moins donné le bonheur de découvrir Ayoub Hmayed, qui jusque-là faisait gentiment la sieste sous la table du Conseil des ministres.
Berrydolâtre jusqu’au trognon, ancien du club des déshérités, il s’était déjà rattrapé lorsqu’il exerçait ses talents à la
direction du ministère de l’Information, ce Jurassic Park qui n’existe plus que dans les pays ringards, qu’il avait tôt fait de transformer en agence pour l’emploi : pas moins de 65 ahuris s’étaient vu offrir, à l’époque, le poste glorieux de
correspondant… à Baalbeck. CNN était knock-out.
Depuis, il a fait du chemin, Ayoub. Arrivé dans les soutes à bagages au moment où les chars d’Istiz Nabeuh
investissaient l’actuel gouvernement, il avait une mission bien précise : remplacer l’un des renégats du mouvement Amal rachetés par Rafic-à-fric dans la précédente équipe. Le comte de Berry a alors placé notre ami à la tutelle de
l’Électricité où manifestement, depuis, il fait des étincelles.
Lorsque le conseil d’administration de l’EDL décide donc de tripler les frais fixes, alors que plus de la moitié des abonnés s’électrocutent gratis, qu’en hiver les turbines de l’office sont bouchées par les sacs poubelle, qu’en été les transformateurs disjonctent à cause de la surcharge, et qu’à l’automne et au printemps les isolants se ratatinent à cause de l’humidité (ouf !), Ayoub opine et démarre la moulinette à déclarations. Conformément à la loi de la pesanteur, il ouvre la bouche plus facilement qu’il ne la ferme.
Dernier prétexte tout trouvé pour taper dans le portefeuille des gens : le prix du fuel. Une saloperie polluante de qualité intermédiaire, achetée à prix d’or et qui damerait le pion à la lutte mondiale contre le cancer. Qui achète, qui vend ? Le fuel est concentré, mais la responsabilité est diluée…
Maintenant que le Conseil des ministres a retoqué le projet, Ayoub aura un énorme défi à relever : rendre l’électricité
tellement bon marché, que seuls les riches auront les moyens de s’éclairer à la bougie.
Gaby NASR