Dans le cadre du Festival des femmes du cinéma de Beyrouth, et plus particulièrement à l’occasion de la séance d’ouverture, le public eut droit à la projection du film Les Barbares en avant-première, dont le thème principal dégage des sentiments de tolérance et de compassion envers le prochain.
Il s’agit d’une famille de six membres qui se trouve hors du pays natal et de la résidence habituelle du fait de la situation politique et militaire. Autrement dit, elle subit les conséquences de l’irresponsabilité d’autrui.
Concurremment, c’est l’histoire d’une commune bretonne réputée pour la richesse de son patrimoine architectural et paysager, portée à se soumettre à la décision prise par une administration territoriale dirigée par un corps municipal visant à dérégler le mécanisme de la routine préalablement établie. Pourtant, l’objectif de cet acte administratif s’avère élevé et généreux. Effectivement, il s’agit de l’accueil d’un groupe de déplacés appartenant à une autre ethnie que la leur.
La confrontation de ces deux entités donne lieu immanquablement à un choc de civilisations qui généralement et géopolitiquement oppose les normes culturelles respectives. D’où il s’ensuit des conflits inévitables qui finissent par se dissiper aussitôt que renoncer à ses préjugés signifie accepter la pluralité. Du même coup, les divergences disparaissent progressivement et perdent de leur consistance.
C’est une œuvre qui passe par le comique pour faire valoir un sujet à la fois ancien et d’actualité, délicat et pénible, abondamment traité et pourtant inépuisé tant que le recours à la violence est une source intarissable de règlement de différends.
La bienveillance de certains Paimpontais est équivalente à l’animosité des autres. Alimenté par des causes externes, le désaccord s’installe, il oppose les meneurs et divise les compatriotes influençables qui se trouvent dans l’obligation d’adopter des attitudes distinctes pour assouvir la dépendance.
Quand bien même aimants, les motifs qui concernent chacun des favorables varient en fonction de sa manière de penser ; la personne à l’origine du projet procède par dévouement, elle consacre son existence à une cause qui demande le don total de soi. Le maire est animé par un sentiment qui l’attache à ses avantages et qui lui fait rechercher le profit et la notoriété, il ne se lasse pas de mentionner son entreprise privée et de mettre en valeur ses exploits.
La peur de l’autre et de la différence est mise en évidence. Elle creuse l’abîme, se transforme en rejet et fait naître l’indésirable qui doit être chassé et abandonné. Plus l’être humain apprend à connaître l’étranger en tenant compte du bien dont il peut être l’occasion et non pas du mal qu’on lui attribue automatiquement, plus on espère évoluer dans un monde meilleur. La métamorphose du plombier suite à l’intervention bénéfique du tiers inconnu en est un fidèle exemple.
Un clin d’œil fait allusion à la latence du refus d’acception du concitoyen naturalisé en faisant preuve de nationalisme restrictif dénigrant systématiquement tous ceux qui n’appartiennent pas à une même descendance au profit d’une admiration pour celui avec qui on partage les ancêtres. C’est le cas du policier qui se révolte lorsqu’il réalise que l’architecte connaît Dalida, Aznavour et Moustaki, tous les trois Français par naturalisation, et ignore Hallyday, un Français de souche.
Le village de Paimpont eut la chance de recevoir des réfugiés agréables et pleins de bonne volonté, néanmoins tous leurs semblables ne sont pas nécessairement du même calibre, bien au contraire. Ils sont prêts à s’intégrer et travailler afin de subvenir à leurs besoins. Ils mettent leur savoir réciproque à la disposition des hôtes. La parentèle dont il est question est formée d’individus cultivés ayant des métiers enviables dans leur pays. En l’occurrence un architecte, une designer, une chirurgienne, un poète à l’humour prononcé, détenant le secret de la recette de la bonne crêpe, une adorable brunette charmeuse, un petit garçon fragile et sensible. Des villageois niais se trouvent face à eux, ils font preuve de racisme et de xénophobie jusqu’au point de se dire que les barbares sont ceux qui croient à la prétendue barbarie des autres...
Le mérite du film réside dans l’évocation des atrocités d’un régime despotique qui lui valut un boycottage de la part de certains.
L’évolution de l’action fait penser, en quelque sorte, à une pièce musicale canadienne intitulée Come from away inspirée d’une histoire vraie. Celle-ci se déroule dans la semaine qui suit les attentats du 11 septembre 2001 et raconte comment des voyageurs forcés à atterrir sur une île, d’abord surpris par une hospitalité inaccoutumée et insolite, commencent peu à peu à nouer des liens avec les habitants locaux.
La situation des réfugiés, indépendamment de leur nationalité, est intimement liée à la compassion entre les peuples. Toutefois, il ne faudrait pas sous-estimer l’anxiété justifiable exprimée par les ressortissants de l’État protecteur.
Avocate à la Cour
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