
Des proches de Rania Houmani, tuée par une frappe israélienne le 22 mars dans le centre de Tyr, en pleurs au passage de son corps, le 23 mars 2025. Photo Matthieu Karam/L’Orient-Le Jour
Cent-vingt-sept personnes, dont plus de la moitié sont des civils, ont été tuées au Liban par l’armée israélienne depuis l’entrée en vigueur, il y a un peu plus de quatre mois, du cessez-le-feu le 27 novembre 2024, après plus de treize mois de conflit entre le Hezbollah et Israël, selon un décompte de L’Orient-Le Jour. L’aviation israélienne a dans ce contexte mené 47 raids meurtriers depuis la fin du conflit, dont un dans la nuit de lundi à mardi sur la banlieue sud de Beyrouth, alors que côté libanais, trois attaques aux roquettes, qui n’ont pas fait de morts côté israélien, ont été signalées durant cette période, dont l’une revendiquée par le Hezbollah.
À titre de comparaison, entre le début de la guerre déclenchée par le parti chiite le 8 octobre 2023 et le 31 août 2024, avant le début de la guerre ouverte en septembre, deux raids israéliens avaient visé la banlieue sud de Beyrouth (assassinant le numéro 2 du Hamas, Saleh el-Arouri, le 2 janvier 2024, et le chef militaire du Hezbollah Fouad Chokr, le 30 juillet de la même année) et 632 personnes avaient été tuées.
Les 127 victimes se répartissent ainsi : 85 au Liban-Sud (dont 78 dans 41 raids aériens israéliens), 12 dans cinq raids sur la Békaa, quatre à Beyrouth dans la frappe la nuit du 31 mars au 1er avril, et enfin 26 dans le cadre du retour des habitants au Liban-Sud.
À ce jour, le conflit a fait plus de 4 000 morts côté libanais, selon un bilan officiel. Le 25 mars, le président du Parlement, Nabih Berry, a accusé l’État hébreu de plus de 1 500 violations du cessez-le-feu. L’armée israélienne se défend en arguant du non-respect par le Hezbollah des modalités de l’accord qui prévoit le désarmement du parti au sud du fleuve Litani.
Représailles meurtrières
Trois tirs effectués à partir du Liban ont entraîné des représailles israéliennes meurtrières. Suite au tir revendiqué par le Hezbollah le 2 décembre 2024 contre le site de Roueissat el-Alam, sur les collines contestées de Kfarchouba, l’armée israélienne a tué le jour même 11 Libanais dans des frappes de l’aviation sur Haris (Bint Jbeil), Tallousé et Jdeydet (Marjeyoun), le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ayant immédiatement promis de « répondre avec force ».
Trois mois plus tard, le 22 mars 2025, après trois roquettes tirées depuis le Liban-Sud et interceptées au-dessus de la localité israélienne de Metoula, dans une attaque non revendiquée à ce jour, l’armée israélienne a bombardé Touline (Nabatiyé), Qlaylé et Tyr (Tyr), tuant huit Libanais, dont trois combattants du Hezbollah et un membre d’Amal.
Le 28 mars, moins d’une semaine plus tard, une nouvelle attaque de roquettes depuis le Liban-Sud visant le nord d’Israël, également non revendiquée, a entraîné trois raids israéliens meurtriers sur le Liban-Sud, tuant six personnes selon notre correspondant Mountasser Abdallah, trois dans deux frappes distinctes sur Yohmor el-Chakif (Nabatiyé) et trois suite à une frappe sur une villa à Kfar Tebnit (Nabatiyé).
Quarante-sept raids meurtriers
Depuis la fin du cessez-le-feu, l’armée israélienne a donc mené 47 raids meurtriers au Liban, dont 41 au Liban-Sud, répartis comme suit : treize sur le caza de Bint Jbeil, dix sur le caza de Marjeyoun et dix autres sur celui de Nabatiyé, cinq sur le caza de Tyr, deux sur celui de Hasbaya et un sur celui de Saïda. Ces 41 attaques ont coûté la vie à 78 personnes.
Toujours au Liban-Sud, trois Turcs ont été tués par l’armée israélienne le 8 janvier 2025 pour avoir tenté de franchir illégalement la frontière, rapportait le ministère des Affaires étrangères turc le 28 janvier. Et le 7 février, une mine placée dans le fauteuil d’une maison a tué son propriétaire Abbas Haïdar, deux de ses filles, ainsi qu’une personne qui l’aidait à transporter le meuble. L’armée israélienne s’est défendue en attribuant l’engin explosif au Hezbollah, et en estimant que Abbas Haïdar était un « commandant du Hezbollah sur le terrain ».
Journées sanglantes lors du retour des habitants du Sud
En outre, 26 civils ont été tués dans le cadre du retour des habitants des villages frontaliers du Liban-Sud à leurs foyers, après 13 mois d’éloignement contraint.
Pour la seule journée du 26 janvier, date à laquelle l’armée israélienne devait s’être retirée du Liban-Sud selon les termes de l’accord de cessez-le-feu – qui prévoyaient son retrait « progressif » sur une période de 60 jours– 21 Libanais civils ont été tués à Aïtaroun (Bint Jbeil), Blida, Houla, Markaba, Kfar Kila, Meis el-Jabal (Marjeyoun), ainsi qu’un soldat à Dhaïra (Tyr).
Le 12 février, un membre des Forces de sécurité intérieure (FSI) succombait à ses blessures contractées le 26 janvier. Le 27 janvier, deux autres civils étaient tués, à Adaïssé et Bani Hayyan (Marjeyoun). Enfin, le 11 février, un habitant rentrant à son foyer à Houla (Marjeyoun) avait été tué.
La Békaa de plus en plus ciblée, la banlieue de Beyrouth à nouveau dans le viseur
Si le Liban-Sud est bombardé de manière quasi quotidienne depuis le début de la trêve, la Békaa n’est, elle, pas épargnée. L’armée israélienne y mène régulièrement des frappes, disant bombarder des « routes de contrebande » du Hezbollah le long de la frontière avec la Syrie. Dans ce cadre, elle a mené cinq raids meurtriers, tous entre fin février et fin mars. Deux frappes sur le Hermel, les 26 et 27 février, ont fait deux morts, tandis que des zones dans la Békaa ont été bombardées les 31 janvier, le 8 février et le 25 février, faisant dix morts.
Ces derniers jours, la banlieue de la capitale libanaise a été touchée par deux raids israéliens. Le premier a été effectué le 28 février avec un avertissement préalable, sur un immeuble à Hadath, faisant au moins un blessé grave. Dans la nuit du 30 mars au 1 er avril, une autre frappe israélienne, sans avertissement, a visé un bâtiment du quartier de Sfeir, faisant au moins quatre morts, dont un responsable du dossier palestinien au sein du Hezbollah, Hassan Bdeir.
Donc l'autre moitié des morts ce sont ? Tant que nous tergiversons à ne pas vouloir désarmer une milice mafieuse, tant que nous trouvons un prétexte pour justifier la lenteur d'une vraie reprise en main de l'état, la situation va perdurer et Netanyahu comme les barbus en tirerons profit chacun pour sa survie au dépend de la population.
10 h 41, le 02 avril 2025