Israël et le Hezbollah jouent avec le (cessez-le)-feu

Pour la première fois depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu mardi, le Hezbollah a revendiqué un tir d’obus ciblant le site de Roueissat el-Alam, dans les collines contestées de Kfarchouba. Selon un communiqué du parti, cette attaque intervient « suite aux violations répétées » de l’accord par Israël. Depuis le 27 novembre, l'armée de l'État hébreu a en effet mené des dizaines d’attaques sur le territoire libanais, sans parler des survols aériens à répétition. De quoi mettre le Hezbollah, qui considère l’arrêt de la guerre comme une « victoire », dans l’embarras. C’est donc vraisemblablement pour montrer qu’il n’est pas passif face à ces « violations » que le parti chiite a mené l’attaque de lundi. À noter que la région ciblée est symbolique, s’agissant d’une zone non habitée et contestée entre le Liban, la Syrie et Israël. Dans les années 1990 et jusqu’au début des années 2000, le Hezbollah visait régulièrement les fermes de Chebaa et les collines de Kfarchouba, ce qui entraînait toujours des ripostes sans provoquer une escalade majeure. Serait-ce le cas aujourd'hui aussi ou le contexte, depuis le 7 octobre 2023, a changé la donne ? Les quelques jours – voire heures – qui viennent porteront sans doute la réponse. Dans son texte de revendication, le Hezbollah a également critiqué « les parties chargées de mettre fin à ces violations » qui « n’ont pas réussi » à le faire. Une allusion aux Américains et aux Français, mais aussi à l’armée libanaise, chargée, selon le texte de l’accord, de superviser la mise en œuvre du cessez-le-feu. Un comité composé de ces trois acteurs, ainsi que d’Israël et de la Force intérimaire des Nations unies (Finul), doit être mis en place prochainement pour assurer cette mission.

« Répondre avec force »

De leur côté, les Israéliens n’ont pas tardé à réagir. Dans un communiqué, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, a décrit cet acte comme « une violation sérieuse » du cessez-le-feu. Tout en affirmant qu’il y « répondra avec force », il a assuré qu’Israël « reste déterminé à l’application de l’accord ». Son ministre de la Défense, Israël Katz, a également promis d’agir « contre toute violation du cessez-le-feu par le Hezbollah » dans une publication sur son compte X. Enfin, le ministre israélien des Finances, l’extrémiste Bezalel Smotrich, a estimé que le Hezbollah avait commis « une grave erreur » en tirant sur Israël. Malgré ces déclarations, un porte-parole du Pentagone a déclaré que, bien qu’il y ait eu quelques incidents, le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah « tient toujours », rapporte Reuters.Il n’empêche qu’Israël a rapidement intensifié ses raids au Liban-Sud après le tir du parti chiite.

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Une frappe à Tallousé (Marjeyoun) a fait quatre morts et un blessé, selon le ministère de la Santé. À Haris, un bombardement israélien a, lui, fait cinq morts et deux blessés. Les localités de Borghoz (Hasbaya), Meis el-Jabal (Marjeyoun), Yaroun et Maroun el-Ras (Bint Jbeil) ont également été ciblées, tout comme Sriré (Jezzine). En outre, des tirs d’artillerie israéliens ont visé Kfarchouba, Chebaa et Rachaya el-Foukhar (caza de Hasbaya), ainsi que Khiam (Marjeyoun). De lourds tirs de mitrailleuses ont également atteint des quartiers de Aïtaroun (Bint Jbeil). Une série de frappes israéliennes ont visé en soirée les hauteurs d'Iqlim al-Touffah, Jabal el-Rihane, et la zone située entre Wadi Ezza et Houmine el-Faouqa, ainsi que celle entre Louaizé, Jabal Safi et Mlikh. Un raid israélien a visé une zone située entre Houmine el-Faouqa et Deir Zahrani. Une forte détonation a été entendue, rapporte notre correspondant.

Dans ce contexte, L’Orient-Le Jour a appris que le Conseil de sécurité de l’ONU se réunira mercredi à la demande de la France et des États-Unis pour discuter de l’annonce du cessez-le-feu entre le Liban et Israël. Jean-Pierre Lacroix, secrétaire général adjoint aux opérations de paix, s’exprimera devant le conseil.

Les forces de sécurité visées

Toujours sur le terrain, un agent de la Sécurité de l’État libanaise a été tué lundi matin dans une frappe de drone israélienne à Jdeydet Marjeyoun, au Liban-Sud, selon les informations de notre correspondant dans la région, Mountasser Abdallah. La victime, identifiée comme Mahdi Khreiss, originaire de Khiam, circulait à mobylette près de la station électrique de la ville lorsqu’elle a été ciblée par le tir de drone. Deux autres frappes de drone ont également été menées par l’armée israélienne à Aïtaroun, dans le caza de Bint Jbeil, selon notre correspondant, qui ne fait pas état de victimes. L’armée libanaise a pour sa part affirmé avoir trouvé la dépouille mortelle d’un officier, « victime d’une frappe ciblée de l’ennemi israélien », dans sa voiture à Naqoura. Selon le communiqué publié sur le site de l’institution militaire, « le contact avec lui avait été perdu depuis le 26 novembre », soit la veille de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Selon notre correspondant, cet officier était rattaché à la marine et s’appelait Hussein Younès. La frappe qui l’a tué pourrait être celle d’un drone israélien, effectuée il y a environ une semaine, selon des informations préliminaires.

De même, l’armée libanaise a annoncé qu’un tir de drone israélien sur une pelleteuse de la troupe qui effectuait des travaux au niveau d’un centre militaire proche du poste-frontière de Haouch el-Sayyed Ali, dans le Hermel, dans le nord de la Békaa, avait blessé un soldat. Notre correspondante dans la région, Sarah Abdallah, avait rapporté peu avant une frappe de drone du côté syrien de la frontière, au même endroit. Lundi soir, l'armée israélienne a bombardé, pour la deuxième fois, Haouch el-Sayyed Ali. D'autres raids ont été signalés sur les hauteurs de Wadi Zein, dans l'Anti-Liban, ainsi que sur plusieurs postes frontaliers, du côté syrien, notamment ceux de Joussi, Joubaniyé et Haouz, dans le sud de la province de Homs.

Dans ce contexte, le ministre libanais des Travaux publics et des Transports, Ali Hamiyé, a annoncé plus tôt dans la journée que le poste-frontière de Arida, situé entre le Liban-Nord et la Syrie et bombardé la semaine dernière par Israël, est à nouveau opérationnel. Des travaux ont lieu au niveau des infrastructures frontalières de Abboudiyé et Jisr Qmar, dans la région de Wadi Khaled, également au Liban-Nord. La réouverture de Arida, un lieu de passage stratégique situé sur le littoral à l’extrême nord du Liban, fait suite à celle annoncée la veille par le ministre Hamiyé du poste-frontière de Qaa, dans la Békaa.De son côté, le ministre sortant de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui a annoncé lundi que la crise des déplacés au Liban s’était atténuée, affirmant que « la majorité des personnes sont retournées dignement dans leurs villes et villages ». S’exprimant lors d’une réunion avec les mohafez au ministère de l’Intérieur, M. Maoulaoui a souligné l’importance d’initier une nouvelle phase au Liban, axée sur l’établissement de la légitimité et la reconstruction de l’État, rapporte l’Agence nationale d’information.

Israel and Hezbollah play with (cease)fire