
Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, lors d'une conférence de presse à Meerab le 19 avril 2024. Photo Ani
Le chef des Forces libanaises (FL), Samir Geagea, a haussé le ton vendredi sur la question des réfugiés syriens au Liban, douze jours après l’enlèvement et le meurtre d’un cadre de son parti, Pascal Sleiman, retrouvé mort en Syrie. «Les responsables politiques exposent le Liban à un danger existentiel et bradent notre avenir», a-t-il lancé lors d’une conférence de presse au siège des FL à Meerab, en exprimant même des craintes qu'une « partie régionale quelconque n’en vienne à armer les réfugiés syriens » dans un objectif précis. Samir Geagea s'était entretenu le matin même avec la coordinatrice de l'ONU au Liban, Joanna Wronecka, de la question des réfugiés syriens.
Sur le plan politique, M. Geagea a clairement fait assumer la responsabilité de l’aggravation de la crise des réfugiés au Premier ministre sortant Nagib Mikati, ainsi qu’au ministre de la Défense Maurice Slim et à celui de l’Intérieur Bassam Maoulaoui. Ce dernier a récemment envoyé des circulaires aux mohafez (gouverneurs) du pays les incitant à prendre des nouvelles mesures pour organiser la présence syrienne dans leurs régions respectives. Il a également affirmé que « l’auto-sécurité est interdite », dans une référence à des violences qui ont mis aux prises des Libanais et des réfugiés syriens dans plusieurs régions.
Sur ce point, M. Geagea a interpelé le ministre de l’Intérieur, lui demandant de « s’acquitter de son devoir s’il ne veut pas de l’auto-sécurité » et d’assurer le suivi des circulaires qu’il envoie aux autorités locales. « Le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur doivent déployer tous les efforts nécessaires, suivis des Forces de sécurité intérieure (FSI) et de la Sûreté générale, puis des municipalités », a-t-il poursuivi. Ajoutant une phrase énigmatique : « Si les forces de l’ordre ne bougent pas, nous nous tournerons vers les municipalités comme nous l’avons déjà fait, et si celles-ci ne bougent pas non plus, le citoyen sera alors acculé à assumer cette responsabilité ».
« À partir d’aujourd’hui, nous ne nous tairons plus face à la négligence », a-t-il martelé.
4 millions de Syriens en 2030 ?
Plus de 1,5 million de Syriens vivent au Liban, le pays ayant la plus grande population de réfugiés par habitant au monde. Quelque 800 000 d'entre eux sont enregistrés auprès de l'ONU. Leur présence au Liban alimente régulièrement le débat politique, les responsables libanais réclamant leur rapatriement.
Le chef des FL s’est attardé sur les chiffres, estimant que seuls 300 000 des Syriens résidant actuellement au Liban sont en situation légale, tous les autres devant être considérés comme en situation irrégulière. Il a également estimé qu’au moins 200 000 de ces Syriens seraient armés. Mais le plus grave, selon Samir Geagea, est lié au facteur démographique. « Il est estimé qu’en 2030 les ressortissants syriens au Liban seraient au nombre de 4 millions, c’est-à-dire un nombre comparable à celui des Libanais », a-t-il souligné. Il a rappelé que le Liban, en tenant compte de la corruption, a dépensé non moins de 70 à 80 milliards de dollars en raison de cette présence syrienne.
M. Geagea n’a pas ménagé la communauté internationale, l’accusant de « privilégier la solution la plus facile, qui est celle de garder ces réfugiés au Liban ». « Le Haut commissariat des réfugiés (HCR) accorde le statut de réfugiés là où il n’a pas la prérogative de le faire, et nous consultons nos avocats ce propos », a-t-il lancé. Évoquant la loi internationale, il a rappelé que le Liban y est cité comme pays de passage et non de refuge. Il a insisté sur le devoir des forces de l’ordre, notamment la Sûreté générale, de rapatrier les personnes en situation irrégulière conformément aux lois libanaises, ce qui ne nécessite qu'une « décision judiciaire, et en aucun cas une décision politique ».
« Cette terre est la nôtre, si les pays européens considèrent qu’il s’agit d’une question humanitaire, qu’ils se répartissent ces réfugiés entre eux, parce que nous n’accepterons pas d’être des laissés pour compte », a-t-il lancé. Le Liban « a effectué son devoir humanitaire pendant 13 ans », a-t-il ajouté, estimant que la guerre en Syrie peut durer 13 ans de plus.
À une question sur les critiques du Courant patriotique libre (CPL, aouniste), qui considère que les revendications des FL sont tardives sur ce dossier dont il a fait un porte-étendard durant des années, M. Geagea a rétorqué que « le CPL était au pouvoir », se demandant « ce qu’il a fait pour alléger ce fardeau ». Pour ce qui est du dialogue avec le régime de Damas, le chef des FL a affirmé que le pouvoir en Syrie « ne veut pas du retour des réfugiés sur son territoire ».
Selon lui, « un peuple ne peut plus supporter la présence d’un autre peuple sur son sol, en pleine crise économique ». Assurant que son parti ne se taira plus face au « danger de perdre le pays », il a exigé une solution « dans les prochains mois ».
Je remarque parmi les commentaires des lecteurs quelques un qui parlent de populisme chaque fois qu'un Libanais demande que les Syriens rentrent chez eux . Les populistes sont des gens qui n'ont pas les moyens de se réfugier à l’Étranger ! Les donneurs de leçons sont souvent les premiers à prendre la poudre d'escampette en direction de Paris ou Miami . J'avais pu le constater en 1982 lorsque les ferries amenant de Chypre des médecins étrangers, remplacés immédiatement à bord par des porteurs de green cards !
20 h 02, le 21 avril 2024