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Politique - Crise migratoire

L’UE annonce une aide d’un milliard d’euros pour soutenir la « stabilité socio-économique » du Liban

Ursula von der Leyen a dit « compter sur une bonne coopération » de Beyrouth dans la lutte contre l’émigration clandestine vers l’Europe.

L’UE annonce une aide d’un milliard d’euros pour soutenir la « stabilité socio-économique » du Liban

Le Premier ministre sortant Nagib Mikati recevant hier la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen au Grand Sérail, à Beyrouth. Joseph Eid/AFP


La présidente de la Commission européenne a annoncé jeudi à Beyrouth une aide d’un milliard d’euros pour soutenir la « stabilité socio-économique » du Liban, tout en appelant ce pays en crise à coopérer dans la lutte contre l’immigration clandestine. Cette annonce intervient alors que l’Union européenne, qui fait face à une hausse des demandes d’asile, a récemment passé des accords avec la Tunisie, la Mauritanie et l’Égypte pour tenter de réduire le nombre d’arrivées à ses frontières.

Les fonds européens seront « disponibles à partir de cette année jusqu’en 2027. Nous voulons contribuer à la stabilité socio-économique du Liban », en renforçant les « secteurs essentiels » comme l’éducation, la sécurité sociale et la santé, a déclaré Ursula von der Leyen à Beyrouth, où elle s’est entretenue avec le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, et le président du Parlement, Nabih Berry. Accompagnée par le président chypriote, Nikos Christodoulidès, elle a dit « compter sur une bonne coopération » de Beyrouth dans la lutte contre l’immigration clandestine vers l’Europe depuis les côtes libanaises. Elle a indiqué que l’UE soutiendrait l’armée et les forces de sécurité libanaises, principalement avec des « équipements et la formation au contrôle des frontières ». L’aide au Liban, sous forme de subventions, sera répartie à hauteur de 736 millions d’euros pour l’aider à faire face à la crise syrienne et ses conséquences, selon Peter Stano, porte-parole de l’UE pour les Affaires étrangères. Les 264 millions restants seront alloués à la coopération bilatérale pour l’aide aux forces de sécurité principalement. Concernant la présence des réfugiés et migrants syriens au Liban, la chef de la Commission européenne a dit « comprendre les défis » et a promis que l’UE allait étudier des façons d’« aider de manière plus efficace », notamment en se penchant sur « les moyens d’adopter une approche plus organisée du retour volontaire en Syrie ».

« Pays de transit de la Syrie vers l’Europe »

Le Liban, frappé par une crise économique depuis 2019 et qui dit accueillir près de deux millions de réfugiés syriens, soit le plus important ratio par habitant au monde, n’a de cesse d’exhorter la communauté internationale à les rapatrier, les armes s’étant tues dans plusieurs régions syriennes. De nombreux migrants entrent au Liban depuis la Syrie, souvent dans l’espoir d’émigrer vers l’Europe. « La réalité actuelle de cette question est devenue plus grande que la capacité du Liban à la traiter », a déclaré Nagib Mikati, lors d’une conférence de presse en présence de Mme von der Leyen et de M. Christodoulidès. « Nous renouvelons notre demande à l’UE (...) d’aider les personnes déplacées dans leur pays d’origine, pour les encourager à rentrer volontairement », a-t-il poursuivi, en mettant en garde « contre le fait que le Liban se transforme en pays de transit de la Syrie vers l’Europe ». Réitérant que le Liban « supporte depuis 2011 le plus lourd fardeau » dans la région, il a relevé la hausse des tensions entre Syriens et Libanais « à la suite d’incidents et crimes, qui se sont multipliés ». Il a menacé d’un effet boule de neige de cette instabilité qui risque de « s’étendre à l’Europe », transformant la situation en « crise régionale et internationale ». Les migrants, demandeurs d’asile et réfugiés qui quittent le Liban par bateau se dirigent souvent vers Chypre, le pays de l’UE le plus proche des côtes du Moyen-Orient. « Les problèmes à la frontière chypriote ne sont qu’un exemple de ce qui pourrait arriver si cette question n’était pas résolue de manière radicale », a averti M. Mikati.

« Pas viable »

Chypre, qui fait état d’une augmentation des arrivées de ressortissants syriens, estime que la guerre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza, qui a déclenché des violences à la frontière libano-israélienne, a affaibli les efforts de Beyrouth pour empêcher les départs. De janvier à avril 2024, plus de 40 bateaux transportant environ 2 500 personnes ont accosté à Chypre, a indiqué à l’AFP le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR). « Je suis conscient que nous ne pouvons pas continuer comme si de rien n’était, que ce problème de longue date doit être abordé de manière efficace et décisive, a déclaré M. Christodoulidès. La situation actuelle n’est pas viable pour le Liban, pour Chypre, pour l’UE. » Il s’est dit convaincu que l’aide annoncée jeudi « renforcera la capacité des autorités libanaises » à contrôler les frontières terrestres et maritimes.

Depuis que l’armée syrienne a repris le contrôle de la plus grande partie du pays, certains pays d’accueil, dont le Liban, exercent des pressions pour renvoyer les réfugiés. Mais les défenseurs des droits humains mettent en avant le risque de possibles arrestations arbitraires et actes de torture à leur retour. Dans un communiqué, huit ONG, dont Amnesty et Human Rights Watch (HRW), ont mis en garde jeudi contre le retour forcé des réfugiés en Syrie « tant que les conditions d’un retour sûr, volontaire et digne ne seront pas réunies ». « L’aide de l’UE visant à permettre ou à encourager les retours vers la Syrie risque d’entraîner des retours forcés de réfugiés, rendant le Liban et l’UE complices de violations du principe de non-refoulement », indique le communiqué. Le sommet à Beyrouth a été organisé alors que l’UE organise, à la fin du mois, la conférence de Bruxelles sur la Syrie et le Liban. Beyrouth devrait y faire du lobbying pour sa proposition de « solution », à savoir refouler vers la Syrie tous les migrants se trouvant au Liban sans documents officiels.

« Du sérieux »

Fadi Alamé, président de la commission parlementaire des Affaires étrangères, qui a participé à la réunion élargie entre le Premier ministre sortant et ses hôtes européens, en présence des chefs d’appareil de sécurité, affirme à L’Orient-Le Jour que les Européens semblent en effet avoir changé d’approche. « Alors qu’ils se focalisaient jusque-là sur l’importance de voir la Syrie opérer des réformes politiques, ils sont désormais conscients de l’ampleur de la crise économique et politique que vit le Liban, qui estime impossible de continuer à lier le règlement de la question aux réformes en Syrie. » Selon le député du mouvement Amal, l’aide annoncée au Liban n’est pas destinée à y garder les Syriens : « Elle vise plutôt à renforcer les capacités de l’armée et du reste des appareils de sécurité en matière de contrôle des frontières (...) D’autant plus que ce qui leur importe, c’est la lutte contre le trafic humain. » Selon les informations de L’OLJ, M. Mikati s’est montré très clair en expliquant aux deux hauts responsables européens que « le Liban ne demande pas d’aide financière pour maintenir les migrants chez lui, mais pour faire face aux défis qui le guettent face à l’ampleur de la crise ». De source proche du dossier, on apprend que certains responsables libanais se sont montrés favorables à ce que les Européens reprennent langue avec le régime syrien, ne serait-ce qu’autour de cette question. De son côté, Nabih Berry a affirmé que « c’est la première fois que nous percevons du sérieux dans le dossier des réfugiés syriens ». Il a proposé, selon M. Alamé, la création d’un comité de suivi consacré au dossier et qui devrait inclure le Liban, l’UE ainsi que Chypre.

Réfugiés : le HCR annonce qu’il réduit de moitié les dépenses de santé

Le Haut-Commissariat pour les réfugiés de l’ONU a annoncé jeudi qu’il réduisait de moitié la couverture de santé qu’il assurait jusque-là aux réfugiés au Liban, notamment les réfugiés syriens enregistrés sur ses listes. Une délégation du HCR, présidée par le représentant de cette organisation au Liban Ivo Freijsen, a informé à cet effet le ministre sortant de la Santé, Firas Abiad, qui la recevait dans son bureau. Selon le communiqué du ministère de la Santé, la délégation a invoqué « une réduction drastique dans son budget en raison des crises successives dans le monde ». La différence pour la couverture des frais des soins de santé devra donc être assurée par les bénéficiaires eux-mêmes. En réponse aux déclarations de la délégation du HCR jeudi, le ministre de la Santé a déploré cette réduction à un moment où le Liban se débat avec une crise économique sans précédent depuis 2019, ce qui, selon lui, impactera très négativement les communautés de réfugiés au Liban. Firas Abiad s’est également dit étonné que « la communauté internationale abandonne ses responsabilités humanitaires, laissant le Liban seul face aux responsabilités qu’il porte depuis 2011 ». Pour le ministre, la priorité, aujourd’hui, est « de trouver une solution radicale à la crise des réfugiés en assurant leur retour digne dans leur pays ». Le HCR n’était pas immédiatement joignable pour plus de détails sur cette question.

La présidente de la Commission européenne a annoncé jeudi à Beyrouth une aide d’un milliard d’euros pour soutenir la « stabilité socio-économique » du Liban, tout en appelant ce pays en crise à coopérer dans la lutte contre l’immigration clandestine. Cette annonce intervient alors que l’Union européenne, qui fait face à une hausse des demandes d’asile, a récemment...
commentaires (4)

Ce n'est ni plus ni moins qu'un pot de vin pour garder les syriens au Liban... Ce peuple le sait et ne bronchera jamais... Il n' aura que lui-même à blamer quand dans dix ans le Liban n'existera plus

Emile G

16 h 11, le 03 mai 2024

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Commentaires (4)

  • Ce n'est ni plus ni moins qu'un pot de vin pour garder les syriens au Liban... Ce peuple le sait et ne bronchera jamais... Il n' aura que lui-même à blamer quand dans dix ans le Liban n'existera plus

    Emile G

    16 h 11, le 03 mai 2024

  • L’europe va étudier la crise du Liban.Elle échoue tellement en tout quelle ne fait qu’étudier. J’espère qu’elle réussira un examen un jour a réussir quelque chose encore des incapables . Les cancres étudient de tout les cotes

    Haraoui Jean-Paul

    12 h 34, le 03 mai 2024

  • Au lieu d'aller se plaindre chez les européens, pourquoi pas demander directement aux Russes et Iraniens, responsables du maintien du clan Bashar au pouvoir. Et puis les pays du golfe dans tout ça, ils étaient bien impliqués dans cette guerre, se sentent pas concernés par les dégats? Et puis on se plaint d'ingérence... Peut-être faut commencer par se gérer dans la région...

    Ghali Elias

    10 h 25, le 03 mai 2024

  • Ou quand l'Europe achète le Liban et monnaye pour garder tous les réfugiés agglutinés sur ce petit territoire ....à vomir :(

    Vero M

    10 h 22, le 03 mai 2024

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