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Société - Liban

Un quartier chic d'Achrafieh encore secoué par le meurtre d'un octogénaire

Trois suspects ont été arrêtés mercredi par les renseignements de l’armée ainsi que l’employée de maison, rapporte une source au sein de l’institution.

Un quartier chic d'Achrafieh encore secoué par le meurtre d'un octogénaire

L'immeuble où résidait la victime, dans le quartier de Sioufi à Achrafieh, le 2 avril 2024. Photo Matthieu Karam

À l'entrée d'un immeuble cossu d'Achrafieh, un concierge répond aux questions d'un motard  sur le crime qui a secoué son quartier de Sioufi. « Nous sommes sous le choc. Nous avons tellement peur maintenant », souffle-t-il, ne lâchant pas la bâtisse de l'œil. Au cinquième étage, une porte d’entrée est marquée à la cire rouge. Dimanche soir, N. el-Turk*, un homme de 84 ans, paralysé depuis un AVC en 2017 a été tué lors d’un cambriolage à son domicile alors qu’il rentrait d’une promenade avec sa femme. Trois suspects ont été arrêtés mercredi par les renseignements de l’armée ainsi que l’employée de maison de nationalité syrienne, indique une source au sein de l’institution. « Nous sommes tellement soulagés, tous les habitants de l’immeuble et tous les Beyrouthins. Mais le mal est déjà fait, qu’il repose en paix… » évoque, suite à l’annonce, Mona Matar, la voisine du 4e étage.

La porte d'entrée de l'appartement de la victime scellée à la cire rouge. Photo Matthieu Karam

Un fait divers qui a secoué l’opinion publique car il a eu lieu en plein cœur de ce quartier huppé. « Nous parlons d’une zone sécuritaire par excellence au cœur de la capitale », a notamment écrit l’ancien juge auprès du tribunal militaire Peter Germanos, sur X. « Nous n’avons jamais été témoin d’une telle chose », avance Mona Matar. « Il y a des caméras partout ici… »

Pour mémoire

Un homme paralysé tué à son domicile à Sioufi lors d'un cambriolage

Une vie entre le Liban et la France

Depuis quinze ans, ce couple de locataires vivaient une vie paisible dans cette résidence et continuait à faire des allers retours en France, où N. el-Turk a longtemps travaillé dans l’import export. De leur « mariage d’amour » naissent trois enfants, aujourd’hui âgés de 40 à 45 ans, dont une fille qui vit au Canada et deux fils au Liban et en France. « Il voulait profiter de chacun de leur fils », raconte, à la suite des funérailles, Malek el-Turk, leur fils parisien. « Il aimait se poser avec moi dans les terrasses pour boire un café, gâter ses petits-enfants… Un grand-père à la libanaise », poursuit-il. « C’était quelqu’un d’aidant, un globe-trotteur, qui aimait vivre… » raconte Malek. Même après son AVC, il tenait à « croquer la vie à pleine dent. »

La sonnerie sur le palier de l'appartement de la victime. Photo Matthieu Karam

Mais le dimanche 31 mars, la vie de cette famille beyrouthine bascule. Alors que le couple s’est absenté pour une petite promenade, leur employée de maison, engagée cinq jours plus tôt via une agence, fait entrer dans l’appartement ses complices, deux hommes « cagoulés », selon le témoignage du fils. Il est près de 18 heures lorsqu'ils rentrent chez eux. Les intrus les ligotent, les rouent de coups et s’emparent d’objets de valeur avant de prendre la fuite. « Dans les médias, au préalable, il a été dit que la somme volée était de mille euros, c’est faux… Ils voulaient dérober les bijoux qui sont d’une valeur inestimable », poursuit Malek el-Turk, qui préfère rester évasif sur ce qui a été dérobé. Sa mère, 72 ans, parvient à se libérer et frappe à la porte de Mona Matar, sa voisine. « Elle avait des ecchymoses sur le visage, du scotch autour du cou », raconte cette dernière. L’époux de Mme Matar se précipite à l’étage pour s’enquérir de l’état de leur voisin. Il redescend immédiatement appeler les secours avec d’autres résidents. L’un des enfants du couple, qui réside à proximité, arrive en trombe après avoir été prévenu et tente de réanimer son père. En vain : « Contrairement à ce que certains médias ont affirmé dans un premier temps, mon père n’a pas été poignardé mais a succombé à une hémorragie interne dues aux coups », raconte son fils Malek el-Turk, arrivé de France le lendemain alors que les auteurs du crime étaient toujours en fuite.

Sentiment d'insécurité

Trois jours après les faits, les renseignements de l’armée lèvent un pan du voile sur l’identité des suspects : l’employée de maison et trois autres complices présumés. « Ils sont tous syriens. La femme arrêtée est entrée clandestinement au Liban et pour les trois autres nous n’avons pas d’information », continue la source. « Nous continuerons à suivre l’affaire en espérant que le pouvoir judiciaire fera tout son possible pour imposer les sanctions les plus sévères aux coupables et que toutes les agences de sécurité intensifieront leur travail pour empêcher que de nouveaux crimes ne se produisent », a déclaré le député de Beyrouth I, Ghassan Hasbani. Après le meurtre d'un policier de la municipalité à Gemmayzé en janvier dernier, l’élu avait annoncé le lancement de « Tabligh » (rapporter, en arabe), appelant les habitants de Beyrouth à signaler toute infraction à la loi sur une plateforme en ligne « en particulier par ceux qui sont illégalement présents dans la zone… » afin d’aider les forces de sécurité, selon le communiqué de presse des Forces libanaises à l’époque.

Déjà sensible, le lien entre le sentiment croissant d’insécurité et la présence de réfugiés syriens – estimés à un million et demi selon le  gouvernement – dans un pays en crise économique et sociale profonde est à nouveau martelé par d’autres personnalités politiques locales. En octobre 2023, le ministre sortant de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, avait alors avancé que 30 % des crimes sont commis par des ressortissants syriens. Un chiffre contesté par plusieurs organisations comme Human Rights Watch, qui considère entre autres que compte tenu du nombre de crimes impunis, ces statistiques sont à prendre avec des pincettes. Par ailleurs, en août 2023, un rapport des FSI montrait que le taux de criminalité déclaré au Liban avait baissé de 38 %  au cours des sept premiers mois de 2023 par rapport à l'année précédente. 

« Le meurtre de N. el-Turk à Achrafieh prouve que la solution n’est pas dans l’organisation de la présence des réfugiés syriens au Liban, mais plutôt dans leur retour à leur pays, qui est sûr », a déclaré Naji Hayek, membre du Courant patriotique libre, sur X. « Le crime odieux qui a eu lieu à Achrafieh montre qu’il faut traiter de manière officielle, responsable et plus ferme le dossier des déplacés syriens qui a désormais un aspect sécuritaire alors que le taux de criminalité parmi ces déplacés augmente et qu'il cible les Libanais », a quant à lui affirmé l’ancien ministre Michel Pharaon (et également actionnaire de L'Orient-Le Jour). Mona, elle, met plutôt l’accent sur le manque de confiance envers les autorités. « J’espère que la sentence sera sévère afin qu’un tel crime ne se reproduise plus… Mais dans ce pays, l’impunité règne », déplore Mona Matar, la voisine. 

À l'entrée d'un immeuble cossu d'Achrafieh, un concierge répond aux questions d'un motard  sur le crime qui a secoué son quartier de Sioufi. « Nous sommes sous le choc. Nous avons tellement peur maintenant », souffle-t-il, ne lâchant pas la bâtisse de l'œil. Au cinquième étage, une porte d’entrée est marquée à la cire rouge. Dimanche soir, N. el-Turk*, un homme de...

commentaires (11)

FAUT CHANGER LA LOI : PENDAISON !

LA LIBRE EXPRESSION

20 h 56, le 04 avril 2024

Tous les commentaires

Commentaires (11)

  • FAUT CHANGER LA LOI : PENDAISON !

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 56, le 04 avril 2024

  • Ce qui me surprend c'est qu'on ne mentionne pas l'agence de placement. Elle a tout de même recruté une personne entrée illégalement au Liban...

    Lilou BOISSÉ

    18 h 51, le 04 avril 2024

  • Pourquoi ils ont engagé une employée syrienne ?

    Geha bel Day3a

    16 h 45, le 04 avril 2024

  • Pourquoi ils ont engagé une employée syrienne ?

    Eleni Caridopoulou

    11 h 54, le 04 avril 2024

  • Je vous remercie sur un article bien écrit Et précis source incluses

    Malek turk

    10 h 49, le 04 avril 2024

  • Crime abject. Nous appelons à l'application de la peine la plus dure autorisée par la loi pour ces criminels.

    K1000

    10 h 44, le 04 avril 2024

  • Est ce qu’il faut revenir à l’auto défense face à cette horde de malfaiteurs syriens présents dans tous les quartiers chrétiens.

    Lecteur excédé par la censure

    10 h 06, le 04 avril 2024

  • Anne and ShameLe nom de l'agence et du propriétaire qui a employé une personne sans papiers...Cupidité des libanaisAllah yerhamo

    Nad

    08 h 32, le 04 avril 2024

  • Pourquoi mettre l’accent sur un quartier ‘chic’ dans le titre . Et ‘Cossu’ On dirait que vous justifiez le crime en quelque sorte. Sioufi est un quartier comme les autres dans lequel habitent des personnes de toutes les classes sociales .

    Liban d’hier

    07 h 17, le 04 avril 2024

  • En israel tout est la faute du KHamaSS, et au Liban tout est la faute des syriens…

    Gros Gnon

    00 h 34, le 04 avril 2024

  • Y a-t-il un correcteur dans l’avion?

    Marionet

    00 h 30, le 04 avril 2024

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