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Les guerres de l’opium entre la Chine et l’Angleterre : des facettes de l’impérialisme occidental

Dès que l’on lit les termes « opium », « Angleterre » et « Chine » dans le titre, une association hâtive pourrait être faite entre la Chine et l’opium, et cela en raison de l’utilisation généralisée de ce stupéfiant par la population chinoise à partir du XVIIIe siècle. Or, lorsque nous examinons l’histoire de la Chine à cette époque, des épisodes révèlent les intentions expansionnistes et colonisatrices des Européens. Celles-ci ont eu des conséquences néfastes sur les intérêts fondamentaux des peuples conquis, contrairement aux allégations relatives à une prétendue diffusion de la civilisation européenne évoluée et de sa religion, le christianisme, comme étant la vraie foi, à l’adresse de peuples considérés comme sous-développés.

Dès le VIe siècle, l’opium était présent en Chine, mais sa consommation était limitée à un usage médicinal. À partir du XVIIIe siècle, les Anglais ont joué un rôle majeur dans l’augmentation de sa consommation en l’important massivement dans le pays. Face à l’addiction croissante de la population à cette drogue et à ses effets néfastes sur la société, provoquant d’importants troubles sociaux et économiques, la Chine en interdit, en 1838, son importation.

L’Angleterre, bravant l’interdiction chinoise, persistera dans le trafic d’opium, en échange de marchandises telles que des soieries, du thé et de la porcelaine. Ceci a déclenché des événements tragiques en Chine à partir de 1839, marquée par des guerres et des soulèvements majeurs qui ont laissé des cicatrices profondes dans son histoire. Le nombre de victimes s’est élevé, selon certaines estimations, à plusieurs millions, jusqu’en 1949, date à laquelle les communistes ont pris le pouvoir en Chine.

Cette série d’événements qui ont marqué la Chine a débuté avec la première guerre de l’opium (1839-1842) entre l’Angleterre et l’Empire chinois, suivie de la seconde guerre de l’opium (1856-1860) qui a exacerbé la situation en impliquant cette fois-ci une coalition occidentale composée de la France et du Royaume-Uni, soutenue par les États-Unis. Ces conflits ont eu un impact dévastateur sur le pays.

Les causes des guerres de l’opium étaient multiples et complexes, englobant des facteurs économiques, politiques et idéologiques. Le point de départ des hostilités a été la décision du gouvernement chinois d’interdire le commerce de l’opium. La Grande-Bretagne, profitant de ce commerce illégal pour compenser son déficit commercial à l’égard de la Chine, a réagi contre cette interdiction en déployant dans le pays une force militaire, déclenchant ainsi les deux guerres de l’opium, visant à poursuivre les activités prohibées. De plus, la Chine, en tant que puissance riche et fermée au commerce international, attisait la convoitise des nations occidentales. Celles-ci ont alors utilisé les guerres de l’opium en vue d’imposer leur volonté à ce pays, d’obtenir d’importantes concessions territoriales et commerciales et d’ouvrir la Chine à leurs produits.

Les guerres de l’opium ont conduit à la signature de traités inégaux qui ont ouvert la voie à la domination occidentale. Ces accords ont entraîné d’importantes pertes territoriales, notamment la cession de Hong Kong, ainsi que des conséquences économiques graves. Les conditions imposées à la Chine par ces traités incluaient l’ouverture forcée des ports chinois au commerce étranger, renforçant ainsi la domination économique des Occidentaux. De plus, la Chine a été contrainte d’accorder des droits extraterritoriaux aux étrangers, les exemptant de la juridiction chinoise et de l’obligation de verser des indemnités de guerre. Enfin, la persistance de la dépendance à l’opium a continué à affaiblir la société chinoise, accentuant sa vulnérabilité.

La destruction du Palais d’Été impérial pendant la seconde guerre de l’opium entreprise par les forces franco-britanniques réduisit ce joyau mondial en cendres, après un pillage massif.

Les défaites de la Chine, les ravages de l’opium et les lourdes indemnités découlant des traités et l’influence occidentale ont déclenché une vague de frustration et de colère en Chine, favorisant l’émergence de mouvements nationalistes et révolutionnaires. La corruption gouvernementale, la crise économique due aux catastrophes naturelles et l’incompétence du gouvernement Qing ont exacerbé la situation, contribuant ainsi au déclin du pays. Ces facteurs ont déclenché des guerres civiles et des révolutions, marquant un tournant crucial de l’histoire chinoise.

Deux révoltes ont profondément marqué l’histoire chinoise, laissant des cicatrices durables dans le pays et contribuant aux tensions politiques et sociales qui ont suivi.

La révolte des Taiping (1850-1864) éclata comme un conflit majeur suite aux guerres de l’opium et l’introduction du christianisme par les Occidentaux, mal assimilé par une partie de la population locale. Les rebelles Taiping, inspirés de principes chrétiens, prônaient l’égalité, la justice sociale et la fin de l’esclavage et de la polygamie. Bien que les puissances occidentales aient opté initialement pour une position neutre, elles ont par la suite soutenu l’Empire Qing à partir de 1860 dans le but de protéger leurs intérêts économiques et politiques, ce qui a contribué au final à la défaite des Taiping, tout en alimentant le sentiment anti-impérialiste en Chine. Cette révolte, l’une des plus meurtrières, coûta environ 20 millions de vies, marquant un tournant crucial en catalysant des mouvements révolutionnaires ultérieurs.

La seconde révolte des Boxers (1899-1901) consistait en une rébellion anti-impérialiste et antichrétienne menée par la société secrète des Boxers. Réprimée par une intervention militaire des forces impériales chinoises soutenues par les puissances étrangères, en échange de concessions de la Chine, selon le protocole Boxer, cette action intensifia les divisions internes et accentua le sentiment de ressentiment chinois envers les étrangers.

Les guerres et les révolutions ont profondément façonné l’évolution de la Chine vers le nationalisme et le communisme. Fondé en 1644, l’Empire Qing a été ébranlé par l’instabilité politique, la corruption et les revers face aux influences étrangères. La révolution Xinhai de 1911 a précipité la chute de l’empire en 1912 et l’avènement de la République de Chine. La nouvelle république est restée fragile, dominée par des seigneurs de guerre rivaux. En 1928, le Parti nationaliste chinois (KMT) a consolidé son pouvoir, mais une lutte prolongée avec le parti communiste, intensifiée en 1927 et brièvement suspendue pendant la guerre sino-japonaise de 1937 à 1945. Cette situation précaire en Chine pousse les Japonais à l’envahir de 1937 à 1945, commettant des atrocités et des crimes de guerre.

Après la fin de l’invasion japonaise, les hostilités internes reprennent et, en 1949, les communistes prennent le pouvoir, tandis que le KMT se replie vers Taïwan, créant une nouvelle république qui subsiste encore aujourd’hui. La prise du pouvoir par les communistes en Chine sous Mao Zedong de 1949 à 1976, malgré l’émergence de la Chine en tant que grande puissance mondiale, n’a pas mis fin aux épreuves commencées après la première guerre de l’opium. Cette période a été marquée par des politiques d’ampleur, engendrant des famines dévastatrices, ainsi qu’un chaos politique, des persécutions, des purges et des perturbations sociales, surtout pendant la période de la révolution culturelle qui a débuté en 1966 et a duré jusqu’à 1976. Ces événements ont entraîné des millions de pertes humaines et des dommages sociaux et économiques considérables. Malgré les progrès post-Mao, les épreuves persistent en raison du manque de démocratie et de l’exploitation des travailleurs par le régime qui est censé les protéger.

Georges Élias BOUSTANI

Architecte D.P.L.G.

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Dès que l’on lit les termes « opium », « Angleterre » et « Chine » dans le titre, une association hâtive pourrait être faite entre la Chine et l’opium, et cela en raison de l’utilisation généralisée de ce stupéfiant par la population chinoise à partir du XVIIIe siècle. Or, lorsque nous examinons l’histoire de la Chine à cette...

commentaires (1)

Très intéressant, bravo

Eleni Caridopoulou

18 h 29, le 03 avril 2024

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Commentaires (1)

  • Très intéressant, bravo

    Eleni Caridopoulou

    18 h 29, le 03 avril 2024

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