Mercredi, vers minuit et demie, un missile israélien a détruit un centre de la Jamaa Islamiya à Hebbariyé, village du caza de Hasbaya au Liban-Sud, tuant sept jeunes secouristes. L'information a été confirmée par plusieurs sources locales, par la Jamaa Islamiya et par le Hezbollah. L'armée israélienne a revendiqué l'attaque par la suite, indiquant avoir « éliminé des saboteurs ».
Que sait-on sur cette frappe meurtrière et dans quel contexte intervient-elle ?
Que s'est-il passé ?
- Vers minuit trente, l'aviation israélienne a tiré un missile sur un centre de « l'Association médicale islamique », affiliée à la Jamaa Islamiya, un groupe lié aux Frères musulmans.
- Sept secouristes ont été tués dans la frappe : Abdallah Atoui, Mohammad Atoui, Bara' Abou Kaïs, Abderrahmane Chaar, Hussein Chaar, Ahmad Chaar et Mohammad Hamoud. La plus âgée des victimes avait 25 ans.
- D'après le moukhtar du village, un seul missile a été tiré, provoquant une « violente explosion », qui a fait trembler les maisons.
- D'importants dégâts matériels ont été enregistrés, selon l'élu local. « Au moins dix maisons détruites et de nombreuses voitures calcinées », rapporte-t-il.
- L'armée israélienne a revendiqué la frappe, disant avoir « éliminé un saboteur », un « terroriste important affilié à la Jamaa Islamiya » dans un « bâtiment militaire ». L'homme visé « était impliqué dans des opérations menées précédemment contre le territoire israélien, et a été tué avec d'autres saboteurs qui étaient avec lui dans le bâtiment ».
- En riposte, le Hezbollah a annoncé avoir « tiré des dizaines de roquettes » sur la ville de Kiryat Shmona, dans le nord d'Israël. Le parti chiite a visé la ville, ainsi qu'une caserne située dans la localité.
- La riposte du Hezbollah a fait au moins un mort, un Israélien d'une trentaine d'années, selon le quotidien Haaretz.
Le contexte
- Depuis le début de la guerre le 7 octobre entre Israël et le mouvement Hamas dans la bande de Gaza, des alliés du mouvement islamiste palestinien - en particulier le Hezbollah - procèdent à des échanges de tirs quasi quotidiens avec les forces israéliennes le long de la frontière sud du Liban. Le Hezbollah dit procéder à des attaques en soutien au Hamas. Israël, de son côté, s'attaque au Hezbollah et à des responsables du Hamas présents sur le sol libanais.
- « C'est la première fois que Hebbariyé est frappée par l'aviation » israélienne depuis le 8 octobre, selon le moukhtar. La localité avait déjà été frappée à plusieurs reprises par des tirs d'artillerie, tandis qu'une frappe de drone y avait tué trois membres de la Jamaa Islamiya en mars. Hebbariyé est un village frontalier sunnite.
- La Jamaa Islamiya, parti libanais sunnite, est impliquée dans les combats contre Israël depuis le début des hostilités au Liban-Sud.
- Au Liban, les différentes milices et les groupes armés ont leurs propres organismes de soins, secouristes et même leur « Défense civile ». C'est notamment le cas du Hezbollah et de son « Comité sanitaire islamique » et des « Scouts de la mission islamique (al-Rissala), qui dépend du mouvement Amal. Ces deux organisations sont très présentes sur le terrain depuis octobre, notamment pour déblayer les décombres après des frappes, transporter des blessés et victimes et ouvrir les routes.
- Plusieurs secouristes liés au Hezbollah et au mouvement chiite Amal ont été tués ces derniers mois dans des frappes israéliennes.
Les réactions
- La Jamaa Islamiya a dénoncé un « crime odieux » dans un communiqué, appelant les autorités à exhorter la communauté internationale à prendre des mesures contre l'Etat hébreu.
- Le Hezbollah a, de son côté, condamné « l'agression criminelle odieuse » d'Israël, en présentant ses condoléances aux victimes et en promettant que « cette agression ne restera pas sans réponse ».
- Le ministère libanais de la Santé a dénoncé, dans un communiqué, l’attaque israélienne sur de Hebbariyé, qui montre qu’Israël « persiste à s’en prendre aux centres médicaux », rappelant que ces actes « sont contraires aux lois et conventions internationales, notamment la Convention de Genève ».
- Sur son compte X, le ministre de l’Agriculture Abbas Hajj Hassan, proche du mouvement Amal, a fustigé « un ennemi qui ne connaît que le langage du meurtre », et qui a tué « des secouristes qui veillent à la sécurité de leurs concitoyens ». Le député Qassem Hachem, du bloc du président du Parlement et chef d’Amal Nabih Berry, a estimé que « seul le recours à la force peut faire face » aux crimes israéliens.
- Le Parti socialiste progressiste du leader druze Walid Joumblatt a dénoncé « une hécatombe qui va à l’encontre de toutes les lois internationales », appelant à « présenter une plainte urgente au Conseil de sécurité de l’ONU ». Un député de ce bloc, Wael Abou Faour a qualifié l’attaque de « crime de masse » contre des travailleurs humanitaires.
- Des réactions similaires ont été exprimées par de nombreux autres partis, notamment par le Rassemblement des partis et forces nationales et régionales de la Békaa, ainsi que par le Rassemblement des habitants du Arqoub.
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Le Liban est comme le fromage gruyère
Eleni Caridopoulou
18 h 32, le 27 mars 2024