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Société - Justice

Devant le Palais de justice, ces irréductibles soutiens de Ghada Aoun

Qu'ils soient aounistes ou appartenant à des collectifs de déposants, ces militants suivent la procureure à la trace et partagent ses combats. "Tous, quoi qu'elle fasse..."

Devant le Palais de justice, ces irréductibles soutiens de Ghada Aoun

Des membres des collectifs "Calibre", "Notre argent est à nous" et du Courant patriotique libre (CPL) devant le Palais de justice avant l'arrivée de Ghada Aoun, à Beyrouth, le 22 mars 2024. Photo Raphaël Abdelnour

"Qu'elle est forte ! Elle utilise les armes des juges contre eux !" Maya Geara, avocate, sort du Palais de justice avec un franc sourire. Elle n'hésite pas à afficher sa fierté suite à la décision prise par "la présidente", la procureure Ghada Aoun : un recours en dessaisissement contre le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), Souheil Abboud.

Ils étaient une petite trentaine à braver la pluie, vendredi matin, pour soutenir Ghada Aoun. La procureure générale près la Cour d’appel du Mont-Liban, qui s'est souvent retrouvée ces dernières années au centre de controverses judiciaires, s'est présentée peu avant 10h à sa convocation devant le Conseil supérieur de discipline, au Palais de justice de Beyrouth. Avec une heure de retard, mais peu leur importe. "Qu'elle vienne ou pas, on la soutient !", clame Aline Akl, encartée au Courant Patriotique libre (CPL, aouniste) arrivée très tôt devant le Palais, un parapluie dans une main, une pancarte dans l'autre.

À son arrivée, la juge Ghada Aoun se faufile entre les journalistes et l'attroupement de sympathisants pour entrer au Palais de justice. Photo Raphaël Abdelnour

Lorsque "la présidente" arrive, c'est une liesse quasiment digne d'une star. "Que Dieu soit avec toi, Ghada !", hurle un homme en se précipitant vers la voiture de la magistrate. "C'est vous qui devez les juger, on ne peut pas vous juger !", crie un autre. La juge Aoun sort du véhicule, déploie son parapluie, reconnaît les visages. Elle reçoit d'abord les compliments avec un sourire silencieux, avant de lâcher quelques mots à voix basse et d'entrer dans le Palais.

"Jusqu'au dernier souffle"

Puis vient l'attente, avec la voix de Julia Boutros grésillant en fond sonore sur une grosse enceinte. "Nous sommes la révolution, nous sommes la colère..." fredonnent certains. "C'est elle qui leur impose l'ordre, et maintenant ils veulent la discipliner", ironise Aline Akl en moquant le Conseil de discipline. Cette cinquantenaire a été de tous les sit-in, depuis les perquisitions au siège de la société de transfert de fonds Mecattaf il y a trois ans. Ces descentes très médiatisées de la juge, en 2021, sous les vivats de ses "partisans", et alors même qu'elle avait été démise de l'affaire, lui avaient valu d'être appelée à comparaître devant l'inspection judiciaire. "On était les premiers à nous révolter contre Riad Salamé, à manifester devant la Banque du Liban (BDL). Ils nous chassaient en nous jetant des pierres", se souvient Aline Akl.

Les personnes venues soutenir Ghada Aoun brandissent leurs pancartes en attendant la magistrate, le 22 mars 2024. Photo Raphaël Abdelnour

Comme elle, plusieurs arrivent devant le Palais en saluant les autres d'un signe complice : le pouce et l'index dressés, symbole du CPL. Sur la trentaine de personnes présentes, près de la moitié revendiquent leur appartenance au "Tayyar" aouniste. "Si jamais le Conseil l'empêche d'exercer, ils ne savent pas ce qui les attendent ! Ils verront comment elle répondra !", rit Alexis Malychef, sympathisant CPL et soutien indéfectible de Gebran Bassil comme de Ghada Aoun. "On sera avec elle jusqu'au dernier souffle", renchérit Aline Akl.

L'orange ne dérange pas

Cette couleur politique donnée à la mobilisation ne gêne pas les autres participants, appartenant à l'association Calibre, "un collectif pour la justice libre", ou encore au collectif de déposants "Notre argent est à nous". L'avocate Maya Geara, membre de Calibre, ne se sent pas du tout proche du parti orange. "Mais nous sommes avec toute personne qui défend Ghada Aoun, peu importe. S'ils ont suivi son travail, tant mieux !", affirme-t-elle. "De toute façon, moi, je n'ai plus espoir dans ce pays désormais. Mais on combattra jusqu'au bout !"

Portrait

Ghada Aoun, au-delà des scandales

La procureure Aoun n'a jamais caché sa proximité avec le CPL, qui, lui non plus, ne varie pas dans son soutien affiché à la magistrate, notamment dans sa croisade menée contre l'ex-gouverneur de la BDL Riad Salamé. La juge avait engagé des poursuites contre lui et procédé à l’arrestation de son frère Raja, en mars 2022, de même qu’elle avait ciblé plusieurs banques libanaises, interdisant à leurs PDG de voyager et de disposer de leurs biens.

Après environ 30 minutes d'audience, les grilles du Palais de justice ont laissé sortir la voiture de "la présidente", qui a filé sans faire aucune annonce ni adresser un mot aux personnes rassemblées. "Que Dieu te garde, Ghada !", hurle à nouveau un homme. À la prochaine audience, le 15 avril, la plupart seront de retour. Qu'il pleuve ou qu'il vente.

"Qu'elle est forte ! Elle utilise les armes des juges contre eux !" Maya Geara, avocate, sort du Palais de justice avec un franc sourire. Elle n'hésite pas à afficher sa fierté suite à la décision prise par "la présidente", la procureure Ghada Aoun : un recours en dessaisissement contre le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), Souheil Abboud.Ils étaient une petite...

commentaires (2)

Un Ghassan 3waideit cache un autre Souheil Abboud.

PPZZ58

09 h 14, le 23 mars 2024

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Commentaires (2)

  • Un Ghassan 3waideit cache un autre Souheil Abboud.

    PPZZ58

    09 h 14, le 23 mars 2024

  • Les choses sont pourtant simples : La BDL et les banquiers de l'ABL sont pour le moins complices du PILLAGE de l'epargne des Libanais. Et aussi de leurs salaires. L'ensemble des citoyens le savent. Une juge met en cause les crapules bancaires. Quelle que soit son etiquete politique (et ce n'est pas la mienne), nous devons bien lui reconnaitre ce courage. Quand aux magistrats qui veulent la desaissir, eh bien il fait avoir le courage de le dire : ils sont aux ordres des mafieux. Point.

    Michel Trad

    16 h 22, le 22 mars 2024

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