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Lifestyle - Sortir à Beyrouth

"Earth to table" : quand trois passionnés de céramique mettent l’argile libanaise à l’honneur

Ils sont trois, venus d’univers différents avec une passion commune, cette matière méconnue qu’est l’argile locale. Ensemble, sous l’intitulé « Clay Stories Collective », ils vous invitent à leur table, avec une collection de pièces uniques qui véhiculent des histoires et une beauté intérieure et apparente.

Exposition collective de pièces uniques signée « Clay Stories Collective ». Photo Wassim Rahal

C’est d’une même voix accordée à leurs envies et d’une même énergie que le trio « Clay Stories Collective », Zeina Aboul-Hosn, Yasmina Khalifé et Hassan-Kamel Sabbah parlent de l’argile locale, de cette terre qu’ils ont découverte, qu’ils découvrent encore avec leurs yeux et leurs mains, au gré de leurs créations. Une expérience qu’ils ont voulu partager à travers une exposition informelle qui se tient jusqu’au 15 mars à l’espace Takeover et qui a été rendue possible grâce au projet Beryt lancé par l’Unesco.

Venus d’univers différents, ils se sont rencontrés « par hasard » autour d’un atelier de poterie, autour d’une passion pour cet artisanat devenu un art. Réalisatrice, documentariste, auréolée de nombreux prix, Zeina Aboul-Hosn découvre la céramique il y a une dizaine d’années après avoir quitté Londres pour s'installer à Beyrouth. Elle s’évade des conférences de presse, des pays en guerre, des souffrances des réfugiés en se plongeant dans le travail de la poterie. Son choix se porte immédiatement sur l’argile libanaise, qu’elle pétrit dans un dialogue permanent jusqu’à en pousser les limites et lui donner de nouvelles possibilités. Sa première incursion dans le monde de l'art et du design a lieu en 2016 avec sa bouteille « Moonshine » qui fera partie de l'exposition Jungle Protocol organisée par House of Today. Au lendemain de la double explosion d'août 2020, elle présente son projet Together dans une exposition destinée à relancer la galerie Tanit Beyrouth. Ses dernières créations, une série de sphères murales, ont fait partie de l'exposition collective Dear Moon, à la galerie d'art Zalfa Halabi.

Yasmina Khalifé, architecte et collaboratrice au bureau de Raëd Abillama, caresse cette matière depuis de courtes années. Et pourtant, son travail, encore trop discret, porte une signature déjà pleine de grâce et des couches de sensibilité. Après ses années d’études aux Beaux-Arts de Paris et son retour à Beyrouth, elle découvre la céramique en 2019. « La discipline s'est rapidement transformée en une passion pour l'argile, sa plasticité et la liberté de mouvements et de possibilités qu'elle offre », dit-elle. Son travail à la fois précis et sensuel s’exprime avec des formes organiques, mouvantes et sculpturales. En septembre 2021, elle participe à une exposition collective de céramistes à la Mojo Gallery à Tabaris.

C’est dans le cadre de Nafas, un programme de résidence organisé par l'Institut français dont le volet artisan a été conçu et financé par Galop, représentant de la maison Hermès au Liban, dans le but d’aider les artistes et les artisans après l'explosion au port, qu’elle a ouvert une belle parenthèse en passant un mois à Strasbourg  où elle a donné libre cours à sa créativité. C’est également dans ce cadre qu’elle a produit une série de sculptures, un hommage aux femmes de son entourage, des pièces qu’elle a ramenées avec elle et qui sont déjà une belle expression de son talent.

Le troisième personnage de ce trio est Hassan-Kamel Sabbah, débarqué sur la planète poterie par hasard. Après avoir perdu son emploi dans les relations publiques à la suite de la double explosion au port, il décide d'aider une amie céramiste, également touchée par l'explosion et organise un pop-up chez lui pour vendre ses œuvres. Le pop-up a duré une semaine et a été un grand succès. Mordu à son tour, il se lance dans une aventure baptisée Maladroit, une belle collaboration entre des artisans locaux, fabricants de poterie locale et des femmes céramistes, qui vise encore à relever. « Maladroit est un trait d'union entre les deux pour relancer la production de la céramique locale. »

Le trio Zeina Aboul-Hosn, Yasmina Khalifé et Hassan-Kamel Sabbah. Photo Wassim Rahal

Voyage en terre méconnue

Lorsque l’Unesco lance des subventions avec le projet Beryt pour des projets dans des domaines différents – les arts du spectacle et les arts visuels, les beaux-arts et l'artisanat, l'audiovisuel et les médias interactifs, la littérature et la presse, ainsi que le patrimoine et le tourisme –, le trio se forme et décide de tenter sa chance. Le « dossier » est accepté et chacun s’active pour, en quelques mois, créer et produire une collection avec un carnet de charge à respecter : faire connaître un matériau local et en transmettre la connaissance à un public plus large. Dans ce pop-up de dix jours, une série de vaisselle créée par le collectif en utilisant l'argile locale libanaise comprend tous les articles nécessaires pour dresser une table : des assiettes et des bols aux chandeliers et aux objets décoratifs. « L'objectif de cette collection de vaisselle est à la fois de célébrer l'argile locale et l'artisanat – le Liban a l’habitude d’importer l’argile des États-Unis, d’Espagne et d’Italie –, mais aussi de générer des revenus pour le collectif, car les ventes de ces articles peuvent s'étendre au-delà du pop-up », explique Yasmina Khalifé. L'exposition est également immersive, puisqu’elle comprend les éléments réels qui entrent dans la création de la vaisselle. Les visiteurs peuvent ainsi toucher la terre qui est ensuite transformée en argile, travaillée à la main, cuite et enfin émaillée. Zeina, Yasmina et Hassan sont à la fois les hôtes et les guides en offrant des explications détaillées aux visiteurs. Ravis de dévoiler leurs pièces qui portent la signature de chacun et une pièce collective, des pièces qui ont pris des mois de préparation, ils racontent le processus de découverte, pour d’abord trouver la bonne terre, « des mois d’allers-retours dans le Chouf, pour ce projet », puis la création et la production en atelier, « un processus long, lent, expérimental ». En créant ces pièces, ils découvrent les réactions à chaud, c’est le cas de le dire, de cette terre, « inattendues et surprenantes. L’argile libanaise, une matière très noble et généreuse, cache encore ses mystères, précise Zeina. Nous avons voulu embrasser l’imparfait, se laisser emporter dans cette aventure expérimentale aussi ». Et certainement, durant dix jours, emporter un public invité à découvrir le projet.


« Earth to Table » jusqu'au 15 mars à la galerie Takeover, rue Abdel Wahab.

De 10h à 13h et de 16h à 19h.

C’est d’une même voix accordée à leurs envies et d’une même énergie que le trio « Clay Stories Collective », Zeina Aboul-Hosn, Yasmina Khalifé et Hassan-Kamel Sabbah parlent de l’argile locale, de cette terre qu’ils ont découverte, qu’ils découvrent encore avec leurs yeux et leurs mains, au gré de leurs créations. Une expérience qu’ils ont voulu partager à travers une...

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