« Si la vice-présidente (des États-Unis), Kamala Harris, plaide pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza, pourquoi l’envoyé spécial du président Joe Biden, Amos Hochstein, ne fait-il pas de même pour le Liban ? La (résolution du Conseil de sécurité) 1701 pourrait être discutée d’une manière inclusive plus tard. » Cette publication postée mardi soir sur X par le leader druze Walid Joumblatt résume sa position à l’égard de la guerre en cours à Gaza depuis le 7 octobre et dans laquelle le Hezbollah est impliqué depuis le Liban-Sud, érigé en front de soutien au Hamas palestinien : pour éviter une guerre totale au Liban, il faut commencer par imposer un cessez-le -feu. Selon le leader druze, pour parvenir à une stabilité durable à la frontière sud, la communauté internationale ne peut pas presser pour « imposer (au Liban) le retrait du Hezbollah (vers le nord du Litani) sans négocier l’armistice de 1949 ». Un point que l’ancien chef du Parti socialiste progressiste a évoqué lors de son entretien, lundi à Clemenceau, avec l’émissaire américain, qui a élargi – pour la toute première fois – l’éventail de ses rencontres pour y inclure M. Joumblatt et des figures de l’opposition. Mercredi, Walid Joumblatt a dressé pour L’Orient-Le Jour un premier bilan de sa réunion avec le diplomate américain.
Quelles conclusions tirez-vous de votre réunion avec Amos Hochstein ?
Les Américains demandent un cessez-le-feu à Gaza. Mais on est dans le même temps en train de jeter dans la mer des aides alimentaires. Ce qui signifie qu’en dépit de la pression internationale, la guerre se poursuit. On ne peut pas imposer des conditions pour un cessez-le-feu, c'est pour cela que les États-Unis tout-puissants semblent impuissants.
Pareil au Liban, les Américains ne peuvent pas nous imposer un cessez-le-feu sans négocier l’armistice de 1949. Cet accord demeure à mon avis très valable. Et c’est un point que j’ai soulevé lors de la réunion avec M. Hochstein.
(Le texte signé entre Israël et le Liban après la première guerre israélo-arabe déclenchée à la suite de la proclamation de l’État hébreu en mai 1948 prévoit notamment que « la ligne de démarcation derrière laquelle les armées respectives de chaque pays doivent se retirer suive la frontière internationale entre le Liban et la Palestine », en référence au tracé négocié entre Paris et Londres en 1923, connu sous le nom d'accord Paulet-Newcombe. Les deux pays doivent se contenter d'une présence militaire légère dans la région frontalière, NDLR).
Qu’est-ce que vous entendez par « négocier l’armistice de 1949 » ?
Les clauses de l’armistice impliquent le déploiement d’armées régulières des deux côtés de la frontière. Si les Américains et les Israéliens veulent le retrait du Hezbollah à une distance de 10 ou 12 kilomètres au nord du Litani, le Hezbollah lui aussi est en droit (à ce stade où il est un élément du système de défense du Liban) de demander l’arrêt des assassinats et violations quotidiennes de l’espace aérien libanais. Jusqu’à la mise en application de l’armistice. Mais bien entendu, tout cela devrait être coordonné et planifié avec l’État libanais.
Vous étiez l'un des premiers à mettre en garde contre une guerre totale au Liban. Aujourd’hui, les Américains expriment des craintes similaires.
Les Américains expriment la position israélienne. Ils sont inquiets pour les Israéliens qui ont quitté leurs maisons. Au même titre, nous sommes concernés par les 100 000 Libanais qui ont dû quitter le Liban-Sud après les destructions massives des villages (suite aux frappes israéliennes). Il faut voir les choses par le juste milieu.
Comment faire pour éviter la guerre ?
Nous n’avons qu’à commencer au même point où on en était en 2006. Après la guerre de juillet, il y a eu un fait accompli et la résolution 1701 a été adoptée. Aujourd’hui, les Américains veulent que ce texte soit appliqué et que l’armée soit déployée au Sud. Très bien. Nous convergeons avec eux sur ce point. Mais j’ai posé à M. Hochstein la question de savoir si les États-Unis pourraient augmenter leur aide (financière) à l’armée. Il a répondu en disant qu’en ce moment, il ne pourra pas faire passer une telle proposition au Congrès. Pourquoi ? Je ne sais pas. C’est très bizarre.
Pourquoi, selon vous, l’émissaire américain s’est-il entretenu pour la première fois avec des représentants de l’opposition ?
C'est pour entendre l'autre son de cloche.
AU LIEU DE JORDANIE PRIERE LIRE LA PALESTINE.
20 h 37, le 07 mars 2024