Ce n’est pas la première fois depuis le 7 octobre que des officiels israéliens appellent ouvertement au départ « volontaire » des Gazaouis hors de l’enclave palestinienne. Mais au cours des derniers jours, ces déclarations se sont largement multipliées et banalisées au sein du discours politique et de la société israélienne. Les provocations les plus entendues sur le sujet ont été lancées dimanche par le ministre israélien des Finances ayant également autorité sur l’administration civile en Cisjordanie, Bezalel Smotrich. Dans un entretien avec la radio de l’armée israélienne, le chef de file du parti d’extrême droite, Sionisme religieux, a exhorté les Gazaouis à quitter la bande de terre à feu et à sang pour laisser la place aux Israéliens qui pourraient « faire fleurir le désert ». « La bonne solution pour la bande de Gaza est d’encourager le départ volontaire vers des pays qui acceptent d’accueillir des réfugiés », a-t-il déclaré. Et d’ajouter : « S’il y a 100 000 ou 200 000 Arabes à Gaza et non deux millions d’Arabes, toute la discussion du jour d’après sera totalement différente. »
Ces propos ont été suivis lundi par les déclarations du ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir. Le chef du parti d’extrême droite Force juive a de son côté déclaré lors d’une réunion de sa formation que « la promotion d’une solution encourageant l’émigration des habitants de Gaza est nécessaire », appelant également à un retour de colons juifs dans l’enclave palestinienne. Ces derniers l’avaient quittée à la suite d’une décision unilatérale d’Israël en 2005, après 38 ans d’occupation.
Transfert forcé
Loin d’être anodines, ces positions émanent de deux figures parmi les plus importantes au sein du gouvernement le plus à droite de l’État hébreu, bien qu’exclues du cabinet de guerre formé le 11 octobre pour gérer l’attaque du Hamas contre Israël. Officiellement, leurs vues contrastent avec la ligne tenue jusqu’à présent par Benjamin Netanyahu. Début novembre, ce dernier avait déclaré à Fox News qu’Israël ne cherchait « pas à déplacer qui que ce soit » de Gaza, un acte qui pourrait être interprété comme faisant partie intégrante d’une « purification ethnique » visant à modifier la composition démographique d’un territoire, selon la définition du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Mais le chef de l’exécutif aurait envoyé un autre message en privé. Selon le quotidien de droite Israel Hayom, le Premier ministre israélien aurait proposé de mettre en œuvre des plans de « migration volontaire » des Gazaouis vers d’autres pays, lors d’une session parlementaire de députés du Likoud tenue à huis clos le 25 décembre. « Notre problème, c’est de savoir quels sont les pays qui sont prêts à les absorber, et nous y travaillons », aurait-il déclaré, selon le quotidien israélien. Dimanche, le média israélien Channel 12 a également affirmé, sans citer de source, que l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair aurait récemment rencontré Benjamin Netanyahu ainsi que Benny Gantz, membre du cabinet de guerre, en vue d’endosser un potentiel rôle d’intermédiaire avec des États arabes pour une « réinstallation volontaire » des Gazaouis. Des allégations démenties depuis par Tony Blair.
Aux yeux des Gazaouis, ces appels au déplacement supposé « volontaire » ont tout d’un transfert forcé. « Israël a bombardé massivement la bande de Gaza et créé une situation dans laquelle l’enclave n’est plus vivable, commente Diana Buttu, avocate palestino-canadienne. L’ensemble des infrastructures, l’eau, l’approvisionnement en nourriture, tout cela n’est plus, et c’est précisément ce qu’Israël cherchait. » Fin octobre, les fuites dans la presse d’un document proposé par le ministère israélien du Renseignement laissaient entrevoir que les autorités de l’État hébreu envisageaient en priorité pour l’après-Hamas à Gaza l’option d’un transfert de population vers l’Égypte.
Alliés de coalition
De son côté, Le Caire ne cesse de rejeter fermement ce scénario pour l’après-guerre selon lequel Israël prévoirait d’installer les Gazaouis dans le Sinaï. L’Égypte a pris l’initiative fin décembre de proposer à l’État hébreu un plan vers la formation d’un gouvernement de transition composé de technocrates du Hamas et du Fateh. Une proposition pour l’instant écartée par Israël. Le Premier ministre israélien s’est à nouveau opposé samedi à ce que des membres du mouvement islamiste comme du Fateh fassent partie d’une potentielle future gouvernance dans l’enclave palestinienne, bien que Tel-Aviv semble de plus en plus envisager en coulisses l’idée suggérée par Washington selon laquelle l’Autorité palestinienne jouerait un rôle dans la gestion de Gaza sous la forme d’une « Autorité palestinienne réformée ». La question aurait ainsi été discutée le 26 décembre au cours de la rencontre à Washington entre le ministre israélien des Affaires stratégiques Ron Dermer, le conseiller à la Sécurité nationale de la Maison-Blanche Jake Sullivan, ainsi que le secrétaire d’État américain Antony Blinken.
Les plans évoqués en privé par le Premier ministre d’une « migration volontaire » des Gazaouis tiendraient-ils de calculs politiques ou d’un réel projet pour l’après-guerre ? Pour l’heure, le Premier ministre israélien a maintenu peu de doutes sur le fait que l’État hébreu continuerait à assurer un contrôle sécuritaire dans l’enclave pendant une période indéterminée, précisant samedi au cours d’une conférence de presse que la zone frontalière entre la bande de Gaza et l’Égypte devrait être sous le contrôle d’Israël.
Depuis le quartier général de l’armée à Tel-Aviv, Benjamin Netanyahu a aussi déclaré : « Ma ligne est claire : continuer à nous battre jusqu’à ce que tous les objectifs de la guerre soient atteints, à savoir l’élimination du Hamas et la libération de tous nos otages. » Israël semble entrer désormais dans une troisième phase de sa guerre à Gaza, de plus basse intensité. Mais s’il a assoupli sa position face à la pression de son soutien américain, le Premier ministre israélien semble de l’autre côté offrir des garanties en vue de conserver ses précieux alliés de la coalition gouvernementale, à l’instar de Bezalel Smotrich et d’Itamar Ben Gvir, qui menacent régulièrement de la quitter si les autorités n’adoptent pas une ligne dure dans la guerre en cours. Selon le Times of Israel, Benjamin Netanyahu aurait annulé jeudi, sous la pression du ministre des Finances, un débat prévu au sein du cabinet de guerre sur l’aménagement de la bande de Gaza après le conflit, affirmant qu’il tiendrait la discussion au sein du cabinet de sécurité, où siègent les deux figures d’extrême droite. Signe du mécontentement de Washington à l'encontre du gouvernement le plus à droite de l'État hébreu, l'administration Biden a fermement condamné mardi les récentes déclarations d'Itamar Ben Gvir et de Bezalel Smotrich, alors que le porte-parole du département d'État a déclaré : « Cette rhétorique est incendiaire et irresponsable ». « (Gaza) restera une terre palestinienne, où le Hamas ne contrôlera plus son avenir et où aucun groupe terroriste ne pourra menacer Israël, a-t-il également dit. C'est l'avenir que nous recherchons, dans l'intérêt des Israéliens et des Palestiniens, de la région environnante et du monde entier. »
L'entité sioniste veut faire partir avec une pécule les palestiniens faisant parti des réfugiés de 1948 (75% de la population) , le reste et ceux qui veulent rester "seront gérés par les conseils des tribus arabes de Gaza"
19 h 28, le 04 janvier 2024