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Idées - Économie

Anticiper les effets du changement climatique sur le tourisme d’hiver au Liban

Anticiper les effets du changement climatique sur le tourisme d’hiver au Liban

Sur les pistes de ski du domaine de Mzaar (Mont-Liban). Photo O.B.


Alors que la 28e Conférence des parties (COP28) des Émirats arabes unis s’est achevée cette semaine, les 198 participants, dont le Liban, sont de plus en plus emmenés à réfléchir sur l’impact du changement climatique et de ses des effets divers sur leur environnement, leur économie et leur structure sociale. L’augmentation des incendies de forêt, la prolifération des parasites et l’élévation du niveau de la mer menaceront par exemple la biodiversité, les écosystèmes et les habitats naturels fragiles. Parmi ces bouleversements, les effets attendus sur l’économie du tourisme en particulier, qui représente l’une des activités économiques les plus importantes du monde au début du XXIe siècle et un secteur traditionnellement important pour le pays du Cèdre, sont loin d’être négligeables... Les zones côtières libanaises pourraient par exemple être touchées par l’élévation du niveau de la mer et ses conséquences pour les infrastructures touristiques et les plages. Les périodes de chaleur intense et de sécheresse prolongée peuvent accroître le risque d’incendies de forêt, menaçant la biodiversité, mais aussi les destinations touristiques, en particulier celles situées près des zones boisées.

Avantage comparatif menacé

Avec cinq domaines skiables, le Liban est le seul pays arabe du Moyen-Orient à proposer une activité de ski dans des stations de ski naturelles, dont l’altitude varie entre 1 700 et 2 850 mètres, avec trois domaines skiables s’élevant à une altitude comprise entre 1 000 et 2 000 mètres – un avantage comparatif de taille au au Moyen-Orient, malgré la concurrence de certains pays comme la Turquie (qui dispose de plusieurs stations naturelles) ou les Émirats arabes unis, qui ont misé sur une offre de neige artificielle. Cette concurrence n’empêchait pas le Liban de figurer en bonne place du « marché touristique » des activités hivernales, avec 202 069 journées de ski vendues au cours de la saison hivernale 2018/2019.

Cet avantage est d’autant plus précieux dans des circonstances de crise prolongée, que la saison de ski peut générer des revenus en devises non négligeables pour une économie exsangue : en mars dernier, le ministre sortant du Tourisme Walid Nassar avait par exemple déclaré que les quelque « 700 000 touristes et expatriés libanais lors des deux premiers mois de 2023 (avaient) généré près de 1,5 milliard de dollars ».

Or cet avantage comparatif risque fort de s’éroder du fait de la conjonction de deux facteurs. L’un, de court terme, est lié à la baisse de fréquentation due à la crise économique et au contexte géopolitique régional. L’autre, à plus long terme, est lié à la vulnérabilité des stations de ski libanaises au changement climatique. Selon les données de la Banque mondiale, la température moyenne enregistrée en janvier 2016 est similaire à celle de 1991, à sept degrés Celsius, sauf que durant l’intervalle, cette moyenne mensuelle a varié sensiblement entre un pic de 10,1°C en 2010 et un plancher de 4,2°C en 1992. En dépit de ces fluctuations, on constate toutefois une tendance vers une augmentation continue des températures moyennes.

Au Liban, divers scénarios de changement climatique ont été formulés à l’aide d’un modèle de circulation générale à échelle réduite appelé PRECIS. Ces scénarios visent à projeter les altérations des températures et des précipitations d’ici à la fin du XXI siècle. Les résultats indiquent que d’ici à 2040, les températures devraient augmenter d’environ 1 °C le long de la côte et de 2 °C à l’intérieur des terres, avec des augmentations supplémentaires prévues d’ici à 2090 se situant entre 3,5 °C et 5 °C, respectivement. Un autre impact notable concerne les précipitations, qui devraient diminuer de 10 à 20 % en 2040 et potentiellement chuter de 45 % en 2090. Cette évolution vers un climat plus sec et constamment plus chaud prolongera la durée des conditions chaudes et arides. Les journées d’été devraient connaître des températures supérieures à 35 °C, et les nuits tropicales des températures supérieures à 25 °C. En outre, les périodes de sécheresse au Liban devraient s’allonger de 9 à 18 jours d’ici à 2090.

En outre, toujours selon les mêmes scénarios, le changement climatique devrait entraîner une réduction de la couverture neigeuse de 40 à 70 %, accompagnée d’une augmentation des températures de 2 à 4 °C. Cela entraînera une modification de l’état de santé de la population et de l’environnement. Il en résultera une hausse de l’altitude des zones enneigées (de 1 500 m à 1 900 m) et une diminution du temps d’enneigement (de 110 jours à 45 jours).

Ces changements sont naturellement significatifs pour l’attractivité du pays en termes de sports d’hiver. Les résultats d’un questionnaire distribué aux visiteurs de cinq stations de ski au Liban pendant la saison de ski de décembre 2017 à février 2018 indiquent que les skieurs ont été invités à donner une note entre 1 et 7 afin d’identifier et d’analyser les facteurs d’incitation et d’attraction. Le facteur le plus attractif selon les skieurs au Liban en 2018 est l’air pur des montagnes suivi de l’enneigement – des éléments qui sont directement impactés par le changement climatique.

Pistes d’adaptation

Dans ce contexte, de nombreux pays ont pris des mesures d’adaptation face aux changements climatiques, particulièrement dans le domaine du tourisme hivernal. Le réchauffement climatique a entraîné des hivers plus doux dans certaines régions du Canada, affectant l’industrie du tourisme hivernal. Afin d’attirer les touristes tout au long de l’année, des stations de ski, notamment en Colombie-Britannique, investissent dans des technologies de fabrication de neige, des activités hors piste et des événements liés à la neige. Les stations de ski au Japon, en particulier sur l’île d’Hokkaido, ont aussi diversifié leurs offres en introduisant des activités comme la randonnée en raquettes, le ski de printemps et le tourisme thermal pour compenser ces changements et maintenir leur attractivité touristique.

L’investissement privé dans le tourisme hivernal durable est devenu une préoccupation croissante en raison des défis imposés par le changement climatique. Les entreprises du secteur touristique, en particulier celles associées aux sports d’hiver, manifestent un intérêt croissant pour l’intégration de pratiques durables afin de réduire leur impact sur l’environnement. Des fonds sont alloués à des technologies telles que des canons à neige utilisant des méthodes de production de neige plus efficaces et économes en énergie. Ces formes d’investissements privés aspirent à rendre le tourisme hivernal plus durable en minimisant son impact environnemental, tout en offrant des expériences attrayantes aux visiteurs.

Économiste et coordinateur académique à la Sorbonne Université Abou Dhabi.

Alors que la 28e Conférence des parties (COP28) des Émirats arabes unis s’est achevée cette semaine, les 198 participants, dont le Liban, sont de plus en plus emmenés à réfléchir sur l’impact du changement climatique et de ses des effets divers sur leur environnement, leur économie et leur structure sociale. L’augmentation des incendies de forêt, la prolifération des parasites et...

commentaires (1)

Il suffira de trouver un lac en pente et on pourra faire du ski-nautique...

Gros Gnon

17 h 07, le 16 décembre 2023

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Commentaires (1)

  • Il suffira de trouver un lac en pente et on pourra faire du ski-nautique...

    Gros Gnon

    17 h 07, le 16 décembre 2023

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