Il est toujours fascinant de regarder l’ahuri politisé aux extrêmes moduler son analyse géostratégique en fonction de sympathies préétablies. Il a beau affûter ses neurones, il s’emmêle toujours les pronostics, opère un virage sur l’aile à 180 degrés, pour ensuite s’acharner à se placer en compatibilité avec son mental.
Mais on n’y peut rien ! Le Koullouna bas du plafond a un solide penchant pour les certitudes préfabriquées. Le débat d’idées, le choc des concepts, ce n’est pas son genre de beauté. Ici, d’emblée, faut avant tout qu’il palpite pour un chef, un mentor ou un groupe de tordus, fussent-il étrangers. La culture politique locale lui a appris à crier d’abord « Par notre âme et notre sang… », et à fabriquer bien plus tard l’argumentaire qui va avec. Normal, plus il y a d’abrutis, moins il y a de gens pour s’en apercevoir…
Depuis l’équipée sanglante du Hamas en territoire hébreu, aussitôt suivie du matraquage meurtrier israélien des civils à Gaza, on ne compte plus le nombre d’excités qui se croient obligés de manifester leur libido pour l’un ou l’autre camp. Il y a ceux qui applaudissent à la vue d’une population entière réduite en charpie, bavent devant la télé en regardant les avions de Benji concasser l’enclave et répandre par-dessus la béchamel au sulfure de phosphore blanc. À l’autre bout du cirque, c’est kif-kif mais sur le revers du miroir : on y voit d’autres allumés qui tressent des lauriers aux supplétifs iraniens locaux et glorifient le nouvel élevage au Liban-Sud d’un frisottis de barbus palestiniens, censés servir de paratonnerre aux prochaines dérouillées israéliennes. Libanais, comptez vos abattis, ça va tomber comme à Gravelotte !
Et c’est au milieu de ce dialogue du sourd-muet unijambiste et de l’aveugle cul-de-jatte que végète Mikou-les-miquettes, ballotté entre ses jérémiades et professions de foi pacifiques et sa trouille de courroucer le Victorieux divin. Si au moins ça servait à quelque chose. Mais tiens, fume ! À entendre ce dernier, va falloir encore libérer le caillou syrien de Chebaa, récupérer la Palestine et Jérusalem, compter sur Abdallah Bou Habib pour calmer Yahia Sinouar, et attendre que l’Arabie et l’Iran, tous deux gouvernés par des épaves exotiques de droit divin, se décident à étoffer notre cache-misère. Dans le jeu de la haute stratégie régionale, les rôles sont déjà distribués : les Saoudiens et les Iraniens font la cuisine… et les Libanais la vaisselle.
Incorrigible Mikou ! Ce n’est pas parce qu’il n’a jusque-là servi à rien qu’il ne sera pas capable d’être inutile cette fois encore.
gabynasr@lorientlejour.com
commentaires (5)
Les libanais la vaisselle s’il y a l’eau ?
Eleni Caridopoulou
18 h 04, le 08 décembre 2023