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Politique - Guerre Israël-Hamas

C’est bien un char israélien qui a tué le journaliste Issam Abdallah

Amnesty International et Human Rights Watch ont présenté jeudi à Beyrouth les résultats de leurs investigations respectives. Les agences AFP et Reuters ont publié les leurs en parallèle. Tous arrivent à la même conclusion. 

C’est bien un char israélien qui a tué le journaliste Issam Abdallah

Le portrait d'Issam Abdallah dans les locaux d'As-Safir le 7 décembre, devant son appareil photo recouvré après sa mort le 13 octobre à Alma el-Chaab. Photo João Sousa/L'Orient-Le Jour

Les visages sont fermés ce jeudi 7 décembre dans la salle de conférence du journal As-Safir, à Hamra. Les organisations Amnesty International et Human Rights Watch (HRW) y ont convié la presse pour leur présenter les résultats de leurs enquêtes respectives sur la frappe israélienne qui a tué le vidéojournaliste libanais Issam Abdallah de l’agence Reuters le 13 octobre à Alma el-Chaab, dans le sud du Liban. Une frappe « délibérée », ont-ils conclu, qui a également blessé six journalistes d’Al Jazeera, AFP et Reuters, venus couvrir le regain de tension à la frontière libano-israélienne, moins d’une semaine après le déclenchement de la guerre entre le Hamas et Israël. Publiées le même jour, les enquêtes des agences AFP et Reuters parviennent à la même conclusion.

« Je revis cet instant chaque jour », assure Dylan Collins, journaliste américain de l’Agence France Presse (AFP), blessé ce jour-là. Invité à prendre la parole lors de cette conférence en sa qualité de témoin, il l’affirme : le groupe de journalistes était « clairement identifié comme tel » avant d’être pris pour cible par deux frappes consécutives. Après le premier tir, « j’ai vu ma collègue Christina Assi à terre, ses jambes gravement atteintes, et j’ai utilisé des garrots pour stopper l’hémorragie », dit-il.

Le corps d’Issam Abdallah, tué sur le coup, n’a été découvert que plus tard, précise-t-il. Il était « à peine reconnaissable ». Une seconde frappe, après 37 secondes selon chacun des rapports, a incendié la voiture d’Al Jazeera et blessé d’autres journalistes, dont Dylan Collins. « Je sais que ces enquêtes ne rendront pas la vie à Issam ni sa jambe à Christina, mais j'espère qu'elles permettront d'obtenir justice », a-t-il plaidé.

Le journaliste de l'AFP Dylan Collins, le 7 décembre 2023, à Beyrouth. Photo : João Sousa/L'Orient-Le Jour

« S’il y a justice, elle sera incomplète »

« Il s’agit vraisemblablement d’une attaque ciblée contre des civils qui doit faire l’objet de poursuites pour crime de guerre », déclare tout de go Aya Majzoub, directrice régionale adjointe à Amnesty International. À ses côtés, Ramzi Kaiss, enquêteur à HRW, évoque lui aussi « une attaque apparemment délibérée contre des civils ». Si contrairement à Al Jazeera, qui avait directement imputé la frappe à Israël, AFP et Reuters ont enquêté pendant sept semaines pour parvenir à cette conclusion, c’est « pour réunir des preuves irréfutables pouvant mener à des poursuites juridiques », précise Maya Gebeily, directrice du bureau régional de Reuters, intervenant via Zoom.

Critiquée dans un premier temps pour son refus d’attribuer la frappe à Israël, l’agence britannique est désormais catégorique : « Les preuves que nous avons réunies et publiées aujourd’hui montrent qu’un équipage de char israélien a tué notre collègue Issam Abdallah », affirme la rédactrice en chef Alessandra Galloni, citée dans l’enquête de l’agence. Même son de cloche du côté de l’AFP qui, au terme d’une enquête menée conjointement avec le collectif britannique d’experts et d’enquêteurs indépendants Airwars, conclut qu'un « obus de char de 120 mm stabilisé par des ailettes, exclusivement utilisé par l’armée israélienne dans la région, est à l'origine de la frappe mortelle », ajoutant que « la succession de deux frappes, espacées de 37 secondes, montre qu’elles étaient ciblées ».

Enfin, si l’agence Reuters affirme que la deuxième frappe provient du même char, selon son analyse d’une vidéo non publiée qui lui a été fournie par le radiodiffuseur italien Rai, les trois autres enquêtes n’ont pas été en mesure d’identifier avec précision la nature de l’armement du second tir. Contacté par Reuters, le porte-parole de l’armée israélienne, Richard Hecht, a été lapidaire : « Nous ne ciblons pas les journalistes ».

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Une affirmation que ces quatre enquêtes contredisent, bien qu’il reste à la justice de le confirmer : « Nous disons une frappe « apparemment » délibérée car nous ne sommes pas un tribunal », admet en effet Ramzi Kaiss à L’OLJ. S’il rappelle que « ce n’est pas la première fois qu’Israël cible de façon vraisemblablement délibérée des journalistes en toute impunité », il juge difficilement envisageable une poursuite devant la Cour pénale internationale, dont ni le Liban ni Israël ne sont signataires. « Mais d’autres enquêtes peuvent être menées, notamment aux États-Unis, étant donné qu’un citoyen américain, Dylan Collins, a aussi été victime de la frappe ».

Reste que pour la journaliste d’Al Jazeera, Carmen Joukhadar, blessée le 13 octobre, « s’il y a une justice au bout du compte, elle sera incomplète. Car la vraie justice, c’est de ne pas perdre nos collègues ». Selon le dernier décompte du Comité de protection des journalistes (CPJ) publié le 7 décembre, « au moins 63 journalistes et employés de médias ont été tués depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas le 7 octobre, dont 56 Palestiniens, 4 Israéliens et 3 Libanais.

Les visages sont fermés ce jeudi 7 décembre dans la salle de conférence du journal As-Safir, à Hamra. Les organisations Amnesty International et Human Rights Watch (HRW) y ont convié la presse pour leur présenter les résultats de leurs enquêtes respectives sur la frappe israélienne qui a tué le vidéojournaliste libanais Issam Abdallah de l’agence Reuters le 13 octobre...

commentaires (3)

Et qui a tué Hariri et 15 députés derrière lui??

LeRougeEtLeNoir

14 h 31, le 08 décembre 2023

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Commentaires (3)

  • Et qui a tué Hariri et 15 députés derrière lui??

    LeRougeEtLeNoir

    14 h 31, le 08 décembre 2023

  • En fait, la seule chance d'avoir des investigations judiciaires vient du fait qu'une des victimes - Dylan COLLINS - est un américain. Problème tout de même; les USA ne reconnaissent pas la compétence des juridiction internationales concernant leurs ressortissants. Difficile dans ces conditions d'aller demander réparation à une juridiction que l'on ne reconnaît pas. Surtout si l'auteur du crime est l'état d'Israël; qui est quasiment le 51e état des Etats-Unis d'Amérique du nord. Les USA faisant condamner ou condamnant Tsahal... Disons que... moi, je demande à voir. Affaire à suivre...

    CODANI Didier

    13 h 14, le 08 décembre 2023

  • Wow.... Justice?!

    Marie Claude

    19 h 45, le 07 décembre 2023

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