Un nouveau départ ? Alors que le Courant patriotique libre et le Hezbollah ont frôlé la rupture, sur fond de désaccord sur le dossier présidentiel, les deux signataires de l’accord de Mar Mikhaël montrent des signes d’ouverture depuis quelques jours. « Nous avons repris le dialogue avec le Hezbollah, sans conditions préalables », a ainsi déclaré Gebran Bassil, chef de file du CPL, dans une allocution mardi. De son côté, le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah s’est également félicité mercredi d’avoir « commencé un dialogue avec (son) ami Gebran Bassil ». Les deux partis campent toutefois toujours sur les positions qui ont failli les conduire au divorce. Mais les développements à l’étranger, notamment la réunion de Doha prévue lundi entre la France, les États-Unis, l’Arabie saoudite, le Qatar et l’Égypte sur le dossier présidentiel libanais, pourraient les pousser à fléchir leur position.
« Un pas dans la bonne direction »
« Dans les faits, il n’a jamais été question d’une rupture avec le Hezbollah », affirme à notre journal le député aouniste Ghassan Atallah. « Nous avons eu un désaccord profond sur le partenariat national, mais Hassan Nasrallah a fait un pas vers nous et a rectifié le tir dans le dossier de la nomination d’un successeur au gouverneur de la banque centrale », ajoute-t-il. Le CPL accuse le Hezbollah de vouloir contourner les maronites dans l’élection présidentielle, puisqu’il soutient la candidature de Sleiman Frangié à la présidentielle contre l’avis d’une majorité écrasante des députés chrétiens, et alors que la magistrature suprême leur est réservée. Le parti de Dieu a également soutenu le Premier ministre sortant Nagib Mikati et le président de la Chambre Nabih Berry (son « frère chiite ») dans leurs efforts pour convoquer un Conseil des ministres malgré le vide présidentiel et l’opposition de la majorité des ministres chrétiens.
Toutefois, la semaine passée, il est allé à l’encontre de la volonté de ce duo, en s’opposant à la nomination par le gouvernement sortant d’un successeur au gouverneur de la Banque du Liban, dont le mandat expire le 31 juillet, pour éviter de « provoquer les chrétiens ». Une démarche qui semble avoir porté ses fruits. « Le Hezbollah sait que le pays ne peut pas être gouverné sans les chrétiens, tout comme nous savons qu’on ne peut pas contourner les chiites, c’est l’essence de notre alliance », indique M. Atallah. « Quand nous avons vu que notre allié chiite a fait un pas dans la bonne direction, nous avons rendu la pareille en acceptant de reprendre le dialogue », abonde un ancien député du Liban fort. « Au final, qu’on ne se leurre pas, aucun président ne pourra être élu sans une entente qui inclue le Hezbollah, et ce qui s’est passé le 14 juin l’a montré », ajoute M. Atallah. Le député fait référence à la dernière séance électorale, qui s’est tenue le mois dernier au Parlement. À l’issue du vote, l’ancien ministre des Finances Jihad Azour, soutenu par l’opposition et le CPL, a obtenu 59 voix, contre 51 pour Sleiman Frangié. Aucun des deux candidats n’a donc obtenu les 65 bulletins nécessaires à une élection au second tour.
« Pourquoi pas ? »
Mais sur quelle base le dialogue a-t-il lieu ? « Nous continuons de soutenir la candidature de Jihad Azour le temps que le dialogue porte ses fruits. Mais nous partons du principe que le score de Sleiman Frangié l’a symboliquement éliminé de la course et qu’il faut passer à une troisième option acceptable pour tous et ayant une vision pour le Liban que nous approuvons », affirme Ghassan Atallah. Il n’est pas sûr cependant que le Hezbollah l’entende de la même oreille. « Un dialogue avec conditions n’est pas un dialogue. Nous irons au dialogue avec Sleiman Frangié comme candidat », a en effet martelé Hassan Nasrallah dans sa dernière allocution, qualifiant le zaïm de Zghorta d’homme « honnête, fidèle et courageux ». Nabil Kaouk, membre du conseil exécutif du Hezbollah, a d’ailleurs affirmé que, suite à la reprise du dialogue avec le CPL, « les choses allaient dans la bonne direction ».
Dans le cadre des pourparlers, le CPL pourrait-il donc finir par rallier la candidature de Sleiman Frangié ? « Nous n’avons pas l’obsession des noms. Certes, nous sommes contre Sleiman Frangié, mais pour nous, le plus important, c’est le programme. Alors, s’il nous donne la décentralisation administrative et financière, pourquoi pas », déclare l’ancien élu précité. Du côté de l’opposition, on estime que Gebran Bassil pourrait basculer de l’autre côté s’il arrive à monnayer sa position. « Même si Gebran Bassil continue de soutenir Jihad Azour, on savait que sa position était motivée par des considération tactiques et non par un désaccord de fond. Si le Hezbollah lui donne ce qu’il veut, à savoir une mainmise sur le pouvoir, il renouera avec lui », affirme Charles Jabbour, porte-parole des Forces libanaises.
Lundi, les représentants du groupe des cinq doivent évoquer le dossier présidentiel à Doha, avant que l’émissaire du président français pour le Liban, Jean-Yves Le Drian, ne revienne à Beyrouth le 24 juin. Selon nos informations, le séjour de M. Le Drian pourrait être plus long que la dernière fois, le diplomate souhaitant la tenue d’un dialogue interlibanais qui aille au-delà de l’élection présidentielle pour évoquer la formule de gouvernance. Si des informations, démenties par le Hezbollah, affirment que le tandem chiite conditionne tout compromis autour d’une figure autre que Sleiman Frangié à des « garanties constitutionnelles » concernant son rôle et ses armes, le CPL pourrait bien jouer cette carte : Sleiman Frangié contre la décentralisation.
GHAYAR KAMEN ABOU-AYOUB YIALLI KEN LEBESS TYEBOU BEL MA2LOUB OU REJE3 YECHRAB MEN ZET EL KOUB....
11 h 54, le 14 juillet 2023