Rechercher
Rechercher

Société - Liban

De Georges Naccache à Dima Sadek : retour sur les journalistes condamnés à la prison

Le fait de condamner un journaliste à la prison est loin d'être une première au Liban.


De Georges Naccache à Dima Sadek : retour sur les journalistes condamnés à la prison

Des manifestants lors d'une sit-in de soutien à la journaliste Lara Bitar devant le Bureau de lutte contre la cybercriminalité à Hazmieh, le 6 avril 2023. Photo d'archives Mohammad Yassine

La justice libanaise a condamné lundi la journaliste Dima Sadek à un an de prison ferme, selon des documents judiciaires consultés par LOrient-Le Jour.

Bien que les cas soient rares, ce nest pas la première fois qu’un journaliste est incarcéré ou condamné à une peine de prison dans le pays. Dautres ont également été assassinés au fil des ans, mais c’est une autre histoire.

Voici une liste non exhaustive des journalistes libanais qui ont été condamnés à la prison au cours des six dernières années, y compris Dima Sadek.

Dima Sadek, actuellement journaliste à la chaîne MTV

Dima Sadek a été condamnée en juillet à un an de prison à la suite d’une plainte déposée contre elle il y a trois ans par le chef du Courant patriotique libre (CPL) Gebran Bassil, qui l’avait accusée de diffamation et de calomnie, selon des documents judiciaires consultés par L’OLJ.

Lire aussi

« L'affaire Dima Sadek constitue un précédent dangereux »

Mme Sadek a communiqué les détails du verdict dans une vidéo postée sur Twitter mardi, dans laquelle elle explique qu’elle doit verser une indemnité de 110 millions de livres libanaises au CPL.

La plainte a été déposée en février 2020, accusant la journaliste et l’activiste Gino Raidy de « diffuser de fausses nouvelles » et de « publier une vidéo, faussement attribuée au CPL, incluant une incitation à la haine et au racisme, qui pourraient donner lieu à un conflit sectaire ». Les deux prévenus avaient accusé des membres du CPL davoir agressé deux jeunes de Tripoli quelques mois après le soulèvement du 17 octobre 2019.

Radwan Mortada, journaliste à « al-Akhbar »

Radwan Mortada a été condamné en novembre 2021 par le tribunal militaire à une peine de 13 mois de prison par contumace pour « outrage » à l'armée libanaise. Cette instance a pour mission de juger les militaires et agents de sécurité qui commettent des crimes dans l’exercice de leurs fonctions.

Entretien

Liberté de la presse : « Au Liban, nous restons très loin des standards auxquels nous pouvons aspirer »

Dans une interview accordée à la chaîne al-Jadeed, M. Mortada avait déclaré que les soldats de l’armée sétaient comportés comme des « crétins » en ne parvenant pas à empêcher la double explosion, le 4 août 2020, du nitrate d’ammonium entreposé dans le port de Beyrouth.

Selon un rapport de Human Rights Watch publié en 2017, les peines prononcées par le tribunal militaire libanais sont « incohérentes » et « arbitraires », et les personnes condamnées disposent d’un « droit d’appel limité ».

Adam Chamseddine, correspondant d’al-Jadeed

Adam Chamseddine a été condamné par contumace, en mars 2019, à trois mois de prison par le tribunal militaire pour avoir publié sur Facebook un message critiquant le département de la Sûreté de lÉtat. Le post Facebook en question reprochait à ce service davoir arrêté un Syrien, prétendument parce qu’il était atteint du sida, et davoir divulgué le nom du suspect dans une déclaration officielle.

Michel Kanbour, propriétaire et directeur éditorial du site web Lebanon Debate

Michel Kanbour a été condamné à six mois de prison et à payer une amende de 10 millions de LL (environ 7000 dollars à l’époque) en mars 2018 à la suite d’une plainte en diffamation intentée avec succès par le directeur général des douanes en ce temps Badri Daher.

Fida Itani, pigiste pour différents médias

Fida Itani a été condamné par contumace à quatre mois de prison et à une amende en juin 2018 après avoir publié en ligne des critiques à l’encontre du ministre des Affaires étrangères de l’époque Gebran Bassil concernant le traitement des réfugiés au Liban. Les critiques en question figuraient sur une publication Facebook datant du 30 juin 2017.

Hanine Ghaddar, ex-rédactrice en chef du site dinformation NOW Lebanon

Hanine Ghaddar a été condamnée en janvier 2018 par contumace à six mois de prison par le tribunal militaire pour avoir critiqué l’armée lors d’une conférence tenue aux États-Unis en 2014. Mme Ghaddar avait alors déclaré qu’au Liban, « les sunnites sont bridés par le Hezbollah et l’armée libanaise, tandis que les miliciens du Hezbollah sont intouchables ».

Ahmad el-Ayoubi, journaliste indépendant pour différents médias

Ahmad el-Ayoubi a été incarcéré en novembre 2017 pour diffamation à la suite d’un procès intenté par le bureau de lex-Premier ministre Saad Hariri. Dans un article qu’il avait publié sur le site al-Janoubia le 12 novembre de la même année, le journaliste accusait M. Hariri d’être à lorigine de la crise diplomatique qui avait lieu à l’époque entre le Liban et l’Arabie saoudite.

Lire aussi

La liberté de la presse "noyée" sous la désinformation

Jad Shahrour, chargé de communication pour la Fondation Samir Kassir, explique à L’Orient Today que chaque cas de journaliste incarcéré au Liban était différent. « Certains n’ont pas été réellement détenus parce qu’ils avaient la possibilité de payer une amende au lieu de purger une peine de prison, tandis que d’autres avaient fait appel et leur affaire avait été reportée de quelques années avant d’être totalement oubliée. D’autres encore ont été sauvés par une intervention politique. »

Bien plus tôt dans lhistoire du Liban, deux autres cas peuvent également être cités lorsqu’il est question de peines de prison visant des journalistes :

Georges Naccache, journaliste et fondateur de « L’Orient »

Georges Naccache était un journaliste libanais, poète, politicien, diplomate et fondateur du journal L’Orient, l’un des précurseurs de l’actuel LOrient-Le Jour. Il est l’auteur d’un célèbre éditorial publié le 10 mars 1949 intitulé « Deux négations ne font pas une nation » qui lui valut trois mois de prison et six mois de suspension de L'Orient.

Dans cet éditorial, publié six ans après la fin du mandat français, M. Naccache critiquait le système libanais dans lequel les chrétiens tournaient le dos à l’Occident, tandis que leurs compatriotes musulmans renonçaient à leur revendication d’une grande nation arabe afin de former un Liban indépendant.

Ghassan Tuéni, rédacteur en chef d’« an-Nahar »

Ghassan Tuéni était un journaliste libanais, homme politique et diplomate, qui a dirigé le quotidien à grand tirage an-Nahar, l’un des principaux journaux du monde arabe. En 1949, il a protesté dans un article contre le procès qui avait condamné à mort le dirigeant du Parti populaire syrien (actuellement Parti syrien national social - PSNS) Antoun Saadé. L’article provoque un tollé, et le journaliste passe deux mois et 20 jours en prison en raison de cette prise de position. Jusque dans les années 1970, il a été emprisonné à plusieurs reprises pour avoir défendu la liberté d’expression.

La justice libanaise a condamné lundi la journaliste Dima Sadek à un an de prison ferme, selon des documents judiciaires consultés par LOrient-Le Jour.Bien que les cas soient rares, ce nest pas la première fois qu’un journaliste est incarcéré ou condamné à une peine de prison dans le pays. Dautres ont également été assassinés au fil des ans, mais c’est une autre histoire.Voici une...

commentaires (5)

Et que faisons nous pour empêcher que cette dictature prenne racine dans notre pays? Rien absolument rien. Une frêle générale et indéfinie devrait montrer à tous ces malotrus qui fait la richesse de notre pays ainsi qu’une désobéissance civile pour couper court à toutes leurs sources d’enrichissement. Je comprends qu’on ne veuille plus manifester pour éviter que cela ne se transforme en bains de sang, mais contre une grève unanime et générale et une désobéissance civile ils ne pourront rien à part subir les conséquences. Allez citoyens libanais, oubliez pour un temps vos profits et votre confort sommaire et manifester votre désaccord avec ces mafieux qui n’en finissent pas de vous martyriser en prenant le soin de bien vous humilier puisque vous vous montrez docile et obéissants. Peuple libanais ou sont passés votre dignité et votre orgueil? Pourquoi tant de sollicitudes envers vos assassins à petit feu.

Sissi zayyat

12 h 20, le 13 juillet 2023

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • Et que faisons nous pour empêcher que cette dictature prenne racine dans notre pays? Rien absolument rien. Une frêle générale et indéfinie devrait montrer à tous ces malotrus qui fait la richesse de notre pays ainsi qu’une désobéissance civile pour couper court à toutes leurs sources d’enrichissement. Je comprends qu’on ne veuille plus manifester pour éviter que cela ne se transforme en bains de sang, mais contre une grève unanime et générale et une désobéissance civile ils ne pourront rien à part subir les conséquences. Allez citoyens libanais, oubliez pour un temps vos profits et votre confort sommaire et manifester votre désaccord avec ces mafieux qui n’en finissent pas de vous martyriser en prenant le soin de bien vous humilier puisque vous vous montrez docile et obéissants. Peuple libanais ou sont passés votre dignité et votre orgueil? Pourquoi tant de sollicitudes envers vos assassins à petit feu.

    Sissi zayyat

    12 h 20, le 13 juillet 2023

  • Faute de frappe: larmée au lieu de l'armée.

    Céleste

    11 h 38, le 13 juillet 2023

  • Theatre de l’absurde, accuses et juges par un tribunal militaire, vive l’impartialité et la liberté d’expression! On condamne ceux qui osent dévoiler la vérité alors que les vrais criminels sont toujours au pouvoir! Quand sortirons-nous de ce cauchemar?

    CW

    09 h 40, le 13 juillet 2023

  • A remarquer que, dans les cas Mortada et Chamseddin, l'armée est, à la fois, juge et partie, ce qui est une hérésie juridique. D'ailleurs, l'auteur de l'article rappelle, fort justement, que le tribunal militaire "a pour mission de juger les militaires et agents de sécurité qui commettent des crimes dans l’exercice de leurs fonctions.".

    Yves Prevost

    07 h 33, le 13 juillet 2023

  • Jai tellement honte de dire que je suis libanais Aucun espoir

    Robert Moumdjian

    02 h 15, le 13 juillet 2023

Retour en haut