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Société - Interview

« L'affaire Dima Sadek constitue un précédent dangereux »

Ayman Mhanna, directeur exécutif de la Fondation Samir Kassir, répond aux questions de L'Orient Today sur la condamnation de la journaliste qui constitue un "précédent". 

« L'affaire Dima Sadek constitue un précédent dangereux »

La journaliste libanaise Dima Sadek. Photo Facebook/Dima Sadek

La justice libanaise a condamné lundi la journaliste Dima Sadek à un an de prison ferme, dans le cadre d'un procès intenté il y a trois ans par le chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil, selon des documents juridiques consultés par L'Orient Today. 

Le chef du CPL avait accusé la journaliste de "diffamation, calomnie et incitation aux conflits sectaires".

Mme Sadek a communiqué les détails du verdict dans une vidéo publiée sur Twitter, dans laquelle elle explique qu'en plus de l''incarcération, elle doit verser 110 millions de livres libanaises au CPL.

En 2020, l'année où la plainte a été déposée, Dima Sadek et le blogueur Gino Raidy avaient annoncé avoir été convoqués par la police judiciaire pour être interrogés sur la base d'une plainte déposée le 14 février par le CPL.

"En février 2020, deux jeunes hommes de Tripoli ont été agressés par le CPL", a rappelé Mme Sadek dans sa vidéo sur Twitter. "L'un a été attaqué par les gardes du corps de [l'ancien député et membre du CPL] Ziad Assouad, et l'autre, Zakaria el-Masri, a été battu et forcé de répéter "Aoun est votre Dieu et le Dieu de Tripoli", comme il l'a affirmé dans son témoignage écrit", a-t-elle ajouté.

"Gebran Bassil me poursuit dans l'affaire Zakaria el-Masri", a poursuivi la journaliste. "Dans les deux cas, j'ai dit qu'il s'agissait d'actes racistes et nazis".


Dans un autre tweet, Dima Sadek a révélé que Gebran Bassil l'avait poursuivie en justice il y a trois ans, l'accusant de "diffamation et de calomnie ainsi que d'incitation aux conflits sectaires".

"Lorsqu'ils ont battu cet homme, il ne s'agissait pas d'une incitation au conflit sectaire, a ironisé Mme Sadek. Ils n'ont pas été jugés, ni arrêtés et personne ne leur a dit un seul mot. Sauf qu'ils m'ont condamnée à une peine de prison, moi qui ai dénoncé cet acte".

Ayman Mhanna, directeur exécutif de la Fondation Samir Kassir (SKeyes), qui milite pour la liberté des médias, a répondu aux questions de L'Orient Today sur la condamnation de Mme Sadek à un an de prison ferme, qui constitue un "précédent". M. Mhanna a déclaré qu'il suivait de près le cas de la journaliste.

Le verdict prononcé à l'encontre de la journaliste Dima Sadek constitue-t-il un précédent ?

Il y a déjà eu des condamnations à des peines de prison, par contumace, mais elles n'ont pas été appliquées. (Le cas de Dima Sadek) constitue un précédent dangereux à plusieurs niveaux. Nous rejetons fermement de telles décisions qui vont à l'encontre de tous les principes de la liberté d'expression et qui montrent clairement le degré de politisation du système judiciaire. Il s'agit d'un système judiciaire de vengeance.

Mme Sadek a affirmé mardi que le verdict prononcé à son encontre - à savoir une peine d'emprisonnement sans sursis pour diffamation et calomnie - crée "un précédent très dangereux pour la liberté du journalisme, des médias et de l'expression au Liban".

Elle a expliqué que le système judiciaire peut l'incarcérer à tout moment si elle ne fait pas appel du verdict.

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Le verdict prononcé à l'encontre de Dima Sadek est-il injuste et sévère, alors qu'elle avait accusé le CPL de commettre des "actes racistes et nazis" ?

Dima Sadek et tout commentateur, journaliste et citoyen devraient pouvoir dire n'importe quoi sur n'importe quel parti. Il n'y a pas un seul mot qui puisse justifier une peine de prison, à moins qu'il ne s'agisse d'un appel explicite au meurtre ou à la violence. Le juge aurait pu choisir une amende financière comme dans les cas précédents. L'emprisonnement est déplacé, purement politique et montre l'étendue de la politisation du système judiciaire.

Quelles sont les conséquences d'un tel verdict sur le journalisme et la liberté d'expression au Liban ?

Ce verdict conduira à une polarisation accrue. Les opposants au CPL et aux autres partis politiques traditionnels les critiqueront encore plus durement. Les partisans et les dirigeants des formations politiques se sentiront encouragés à harceler davantage leurs opposants et à utiliser le système judiciaire pour faire taire les critiques.

Y a-t-il une motivation politique dans l'affaire Sadek ?

Cela sent la motivation politique, cela y ressemble et cela s'y apparente.

La justice libanaise a condamné lundi la journaliste Dima Sadek à un an de prison ferme, dans le cadre d'un procès intenté il y a trois ans par le chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil, selon des documents juridiques consultés par L'Orient Today. Le chef du CPL avait accusé la journaliste de "diffamation, calomnie et incitation aux conflits sectaires".Mme Sadek a...

commentaires (17)

Non. Les « jourbalistes” ne devraient pas se taire lorsqu’il s’agit de dénoncer une injustice ou une violence !

Citoyen Lambda

16 h 00, le 12 juillet 2023

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Commentaires (17)

  • Non. Les « jourbalistes” ne devraient pas se taire lorsqu’il s’agit de dénoncer une injustice ou une violence !

    Citoyen Lambda

    16 h 00, le 12 juillet 2023

  • Je ne peux qu’exprimer mon dégoût pour la justice politisée au Liban. Allez arrêter les auteurs de l’explosion du porc, les auteurs du vol de notre argent, les criminels qui continuent avec les meurtres politiques. Ceux-la ne sont jamais inquiétés! Mais madame Sadek sera jetée en prison pour avoir dit une vérité gênante!

    CW

    14 h 19, le 12 juillet 2023

  • C'est une honte cette peine de prison. Vous punissez la mauvaise personne et bien sur c’est de la vengeance de la part de Mr Bassil. C’est un brise-cœur de voir la dégradation des droits de l’homme dans ce pays.

    Martine harmouche

    12 h 37, le 12 juillet 2023

  • La définition minutieuse des termes n’a pas de valeur dans un pays où les gens sont assassinés, les yeux crevés etc sans que jamais un meurtre ou un délit ne soit éclairci. Par contre la presse jetée en prison.

    Khazzaka May

    10 h 48, le 12 juillet 2023

  • Vu de loin, il n'est pas possible d'apprécier en détail le fond de la dernière affaire qui vaut à Dima SADEK une condamnation à de la prison ferme. Parler d'actes racistes est une chose, et ajouter "nazis" pose réellement le problème de la preuve des affirmations. Car qui affirme doit prouver, et si elle ne peut pas prouver, sa condamnation était prévisible. Reste la peine choisie: la prison ferme. Cette peine-là pose question. Car depuis longtemps et sur d'autres sujets cette journaliste Chiite fait l'objet de menaces violentes pour la faire taire. Menaces de viol, menaces d'agression physique; menaces même de démembrement puis de crucifixion. En passant, cette menace-là manquait de cohérence. Crucifier une démembrée est sinon impossible, du moins fort difficile. Ce déferlement de haine débouche maintenant sur une condamnation judiciaire en première instance qui pose clairement les limites de la liberté d'expression au Liban. Je n'écris pas que la condamnation n'est pas motivée, j'écris qu'elle me semble bien trop lourde pour les faits, et qu'elle a une portée qui dépasse de très loin la personne de la condamnée. Elle peut toujours faire appel. Affaire à suivre. Pour tous les journalistes au Liban et au Moyen-Orient.

    CODANI Didier

    10 h 26, le 12 juillet 2023

  • Par contre les journalistes du Hezbollah qui médisent à longueur de journée contre les FL et Samir Geagea ne sont jamais inquiétés et même approuvés par certains partisans du CPL dont deux ou trois lecteurs de l’OLJ. Le Hezbollah tient tous les rouages de ce pays, il a fait mainmise sur tous les services de l’Etat qui se comporte exactement comme le régime iranien. Seulement cet état de choses ne pourra pas durer, les régions libres se rebelleront un jour ou l’autre et on verra les membres et les proches du Hezbollah détaler comme des lapins.

    Lecteur excédé par la censure

    10 h 02, le 12 juillet 2023

  • Ce sont de nos jours nos grands hommes au Liban. Un coeur de pierre, une carapace de crocodile mais une âme sensible, vulnérable, pleurant, dénonçant, accusant, allant jusqu’au bout pour se protéger contre la moindre critique.

    Khazzaka May

    09 h 39, le 12 juillet 2023

  • Chers juges, ou en est l’enquête du port et pourquoi vous vous montrez aussi impotent lorsqu’il s’agit de rétablir la vérité sur ce drame sans nom alors que vous omnipotents lorsqu’il s’agit d’un simple fait divers qui, pour vous devient une raison d’état en abusant de votre pouvoir de justiciers vendus? Un an de prison ferme? Vous êtes vraiment des vendus nous n’avons plus aucun doute quant à votre crédibilité.

    Sissi zayyat

    09 h 32, le 12 juillet 2023

  • "Cela sent la motivation politique, cela y ressemble et cela s'y apparente.". Quel magnifique euphémisme! Une agression est commise, les auteurs ne sont pas inquiétés, mais la journaliste qui la dénonce est condamnée à un an de prison! La "justice" libanaise n'a pas fini de nous surprendre. On pourrait se croire , non pas au Liban, mais sous une dictature quelconque, en Iran, par exemple. Mais, au fait, peut-être y sommes-nous déjà!

    Yves Prevost

    07 h 25, le 12 juillet 2023

  • "… elle avait accusé le CPL de commettre des actes racistes et nazis …"- Qu’est-ce qui lui a pris? Cette accusation est un manque de respect total envers les nazis!

    Gros Gnon

    04 h 20, le 12 juillet 2023

  • Les jourbalistes devraient parfois se taire ! C'est le moins qu1on puisse dire ...sauf s'ils préfèrent se faire un peu de publicité qu'ils croient être gratuite , et ils se rendent compte á la fin que ça leur coûte bien plus cher que prévu .

    Chucri Abboud

    03 h 38, le 12 juillet 2023

  • Meurtres, explosions, détournements de fonts publique etc... Aucun jugement ! Mais gares aux defamations.

    Sarkis Dina

    02 h 53, le 12 juillet 2023

  • Bravo M. Bassil... Vous devez être drôlement fier... C'est bien là votre conception de la démocratie et de la liberté d'expression: qui ne dit mot consent... et qui n'est pas avec moi est donc contre moi? Regrettable moment de la république et pour la république!

    Christian Samman

    01 h 23, le 12 juillet 2023

  • Est ce une condamnation en votre âme et conscience. DIEU veille. Craignez Le.

    Mohamed Melhem

    22 h 49, le 11 juillet 2023

  • Ils veulent la faire taire… tout simplement Elle leur lance la vérité crûment à la figure et ca ne leur plait pas.

    LE FRANCOPHONE

    22 h 00, le 11 juillet 2023

  • «L'un a été attaqué par les gardes du corps bla bla bla et son témoignage écrit bla bla » dit-ELLE Soutenue par la censure que font certains journaux, et par certains miliciens pour la liberté des médias ( OH ! ) cette belle dame espère et pense être au-dessus de la loi ! Eh bien NON . Pour une fois ELLE est censurée comme très, très souvent NOUS , on est censuré pour nos commentaires bien moins agressifs ( n’est-ce pas OLJ ?)

    aliosha

    21 h 07, le 11 juillet 2023

  • No comment. Le dégoût de cet État pourri est suffisant

    Lecteur excédé par la censure

    20 h 22, le 11 juillet 2023

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