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Nos Lecteurs ont la Parole

Le Liban, paradis de tous les vices

Retrouvons le Liban de Gebran Khalil Gebran : « Vous avez votre Liban et j’ai le mien, vous avez votre Liban avec ses dilemmes et j’ai le mien avec sa beauté, vous avez votre Liban avec tous ses intérêts et toutes ses tendances et j’ai le mien avec tous ses rêves et toutes ses attentes. »

Dans un abîme où nous nous trouvons et avec tant de vices, la sortie est possible. Si nous en sommes arrivés là, voyons les choses en face. Dans une région tourmentée et instable qu’est le Moyen-Orient, le Liban pourrait-il espérer rester en paix. À croire que les responsables des pays de la région continuent à perpétuer une tromperie dans leur gestion de leurs gouvernements. Ils s’agrippent à leurs privilèges, à l’exploitation des ressources des pays, à écraser les opposants et à jouir des démocraties illibérales. Ce sont en général des incompétents couronnés par un suffrage universel abusé. Dans le Liban, les disputes sont multiples, changer le régime démocratique, changer l’État, changer la Constitution, changer le système confessionnel, changer le système électoral. C’est en fait l’état d’esprit des responsables qu’il est nécessaire de changer ou bien de changer les responsables. En réalité, ce n’est pas le régime ou la Constitution qui fonctionnent mal, mais ce sont les personnes qui pervertissent la Constitution et la détournent à leur profit. Ces personnes sont comme les pirates sur les côtes de la Somalie il y a quelques années qui tentaient la chance pour faire fortune, des hors-la-loi.

Que reste-t-il de la structure harmonieuse du pays, de la stabilité du pays ? Après des centaines de milliers de morts et autant de blessés, que font les responsables ?

Après l’explosion meurtrière du port, qu’ont fait les responsables ?

Avec l’invasion des réfugiés syriens et celle des réfugiés palestiniens, qu’ont fait les responsables ?

Après la décadence et la décomposition de l’État et le blocage de l’administration, qu’ont fait les responsables ? Devant l’éclosion de la production et du trafic de drogues, qu’ont fait les responsables ? Et enfin, devant le trafic de tout genre à travers les frontières toutes ouvertes, qu’ont fait les responsables ? La liste peut continuer. Un président de la République introuvable. Un gouvernement et son président qui tournent en rond et ne trouvent pas les moyens de bien gouverner. Des ministres qui viennent par une étiquette communautaire continuent à jouer les entremetteurs et les souteneurs pour favoriser leur clientèle. En fait, le ministre doit travailler à des plans intéressant tout le pays et non sa communauté. La majorité des responsables vivent une déviance identitaire qui perturbe leur action nationale. Ils sont loin de l’intérêt national (grands projets, vision d’avenir, améliorer la condition des travailleurs, l’avenir des jeunes…). Ils soutiennent des hors-la-loi, la mainmise sur les biens d’autrui, une politique du fait accompli. Le Parlement supposé être le lieu de dialogue et d’échanges, son président décrète la fermeture des portes tout le temps tout en clamant l’appel au dialogue. On est dans l’équation suivante : tout parle de tout, tout parle de plus en plus, mais en fait on se parle de moins en moins.

Le pouvoir judiciaire semble s’éloigner de tout sens de pouvoir au désespoir de tout le peuple. Quant au quatrième pouvoir (médias de tout genre), il est aussi désorienté et éclaté faute d’un projet rassembleur en vue d’un État unificateur. Notre pays est à la recherche d’hommes ou de femmes d’État qui ont le sens de la bonne gouvernance tandis que nos responsables agissent comme des soignants aveuglés par un acharnement thérapeutique, face à un patient en phase critique avec des remèdes toxiques.

Ils continuent à agir de la même manière qui nous a entraînés à ce niveau de dégradation ; corruption, exploitation du pouvoir, clientélisme et blocage de tous les rouages de l’État ce qui a entraîné la faillite de cet État et la dégradation du produit intérieur brut. Il n’y a aucun responsable, dit-on, mais c’est tout le réseau politique, économique, et les institutions avec les personnes en charge qui sont responsables.

Ils nous entraînent au monde souterrain à travers les différents niveaux de l’enfer tels que décrits par Dante. Mais en voyageant à travers l’enfer et le purgatoire nous pouvons atteindre le paradis et émerger pour voir la clarté du jour et les étoiles de la nuit. Nous vivons une période où le vernis civilisationnel s’est fendillé, où la sacralisation du moi aboutit à l’ébranlement de notre psyché collective. Chacun doit réagir et se considérer comme un acteur engagé et bien concerné à tous les niveaux à demander des comptes à tous les élus et tous les responsables. Face à l’effondrement de toute une civilisation, de toute une culture, agissons pour restituer les relations interpersonnelles, les codes étatiques et arrêter la brutalisation des codes sociaux et leur barbarisation.

Notre pays doit être apaisé et doit être gouverné par les armes du droit, avec une justice honorable qui donnera l’espoir à notre jeunesse. Un diagnostic de notre situation partagé par des responsables honnêtes loin des virus communautaires aidera à l’éveil de nos capacités positives.

Le Liban est viable malgré l’obstination déraisonnable des différents groupes armés dominants qui empêchent toute possibilité de relève. Il faut un gouvernement qui rétablisse le lien national, un gouvernement où le ministre vient apaiser les fantasmes de son clan, et s’élever vers les grands principes de droit, d’honnêteté, du bien commun et d’une culture globale. Un gouvernement qui évite les confrontations culturelles malgré certains illuminés. Ces derniers inspirés de Pol Pot au Cambodge, bunkérisés dans leurs visions, se risquent à une jouissance dans les confrontations passionnelles. Il faut tendre vers un enseignement d’accueil, de tolérance et d’ouverture à l’autre dans toutes les religions, les politiques et les philosophies. Évitons les déviants, les passionnés, les personnes à pensée unique qui entraînent les crises et les confrontations.

On peut s’acharner à bâtir et pas à s’entretuer, à voir l’avenir ensemble au lieu de diverger. Une démocratie positive loin des hégémonies, guidée par un gouvernement d’hommes honnêtes et capables ramènera la paix et l’avenir souhaité pour notre pays imaginé par Gebran Khalil Gebran.

Adel AKL

Psychiatre, psychanalyste

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Retrouvons le Liban de Gebran Khalil Gebran : « Vous avez votre Liban et j’ai le mien, vous avez votre Liban avec ses dilemmes et j’ai le mien avec sa beauté, vous avez votre Liban avec tous ses intérêts et toutes ses tendances et j’ai le mien avec tous ses rêves et toutes ses attentes. » Dans un abîme où nous nous trouvons et avec tant de vices, la sortie est...

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