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Nos Lecteurs ont la Parole

L’obstruction empêche l’élection d’un président

Mohammad Hassanein Haykal a répété, dans son livre Kalam fil siyassa, ce que l’ancien roi d’Espagne Juan Carlos lui avait dit à propos d’un entretien qu’il avait eu avec le roi Hussein.

Le regretté roi de Jordanie assistait avec le souverain espagnol à un spectacle de tauromachie à Séville. Le roi Juan Carlos avait alors expliqué, en fin de match, à son invité la méthode utilisée par le torero face à un taureau enragé : l’un ou l’autre devait obligatoirement tuer son adversaire. Le roi d’Espagne fut stupéfait d’entendre son invité lui répondre : « Je sais de quoi vous parlez, et je l’endure moi-même tous les jours. Ma situation est encore plus dangereuse que celle du lutteur dont vous parlez. Lui ne fait face qu’à un seul taureau, alors que je fais face à non moins que dix taureaux, et ils sont tous enragés et attaquent dans tous les sens. Toutes les confrontations peuvent mener à la mort. Votre lutteur a, d’autre part, des assistants armés de lances en grand nombre, alors que votre serviteur est seul sur le ring et ne fait que fuir les lances brandies dans son dos. »

L’image du torero est très proche de celle présentée par le roi Hussein pour décrire la politique des pays arabes !

Le Liban, qui meurt mille fois tous les jours depuis 1975 et qui ne peut toujours pas quitter le ring de boxe, vit la même situation que celle du lutteur espagnol. Il est tueur ou tué. La décision du Tribunal spécial pour le Liban du 18 août 2020 accusant Salim Ayache, membre du Hezbollah, a été rejetée par la direction de ce parti. De même qu’après l’assassinat du président Bachir Gemayel, le jugement rendu par la justice libanaise accusant Habib Chartouni et Nabil el-Alam n’a jamais été appliqué.

De plus, quelques années plus tard, Saad Hariri a même soutenu la candidature de Michel Aoun, appuyée par le Hezbollah, et lui et son bloc ont été une force prépondérante dans son élection à la présidence. Cette élection avait été reportée et suspendue pendant deux ans et demi, jusqu’au jour où Saad Hariri et son bloc acceptèrent de coopérer avec le Hezbollah. Saad Hariri était alors en désaccord avec Fouad Siniora qui tenait à ce que le Futur de Hariri demeure en conflit avec le Hezbollah.

Par cet acquiescement et son retrait de la politique quelque temps plus tard, Saad Hariri a été exactement à l’image de la corrida dont parlait le roi d’Espagne pour définir la situation du torero et de la victime, situation que le roi Hussein de Jordanie avait jugée similaire à la sienne. Mais il faut dire que le roi Hussein a bien gagné la partie, alors que la lignée de Bachir Gemayel et de Saad Hariri a échoué !

Ainsi le roi Hussein a-t-il gagné en politique, alors que les souverainistes ont perdu au Liban, aussi bien le camp de Bachir Gemayel que celui de Saad Hariri. Le camp des souverainistes défendait une politique proche de celle du roi Hussein. Comment alors et pourquoi le roi Hussein a-t-il gagné, et Bachir Gemayel et Saad Hariri ont-ils perdu au Liban ?

Pour ces simples raisons :

1- Le roi Hussein a réussi sa bataille contre Abdel Nasser qui a abouti à la sécession de la Syrie.

2- Lors de la guerre de 1967, il était en désaccord avec Abdel Nasser, mais lorsqu’il apprit par ses contacts que la guerre aurait bien lieu, il se rendit au Caire et retourna à Amman accompagné du lieutenant-général Abdel Monhem Riyad.

3- Abdel Monhem Riyad revint à la fin de la guerre au Caire, ployant sous les obsessions, rongé d’inquiétude. Peu lui plaisait l’idée de se retrouver à la tête de forces qu’il ne connaissait pas et qui ne le connaissaient pas. Il déclara à Abdel Nasser que ses rapports avec les forces sur le terrain n’étaient pas fluides, que l’armée jordanienne avait perdu 16 martyrs et que la Cisjordanie, alors jordanienne, avait été détruite.

Le roi Hussein, muni de procès-verbaux et de documents, se rendit le 25 septembre 1973 à Tel-Aviv pour un entretien secret avec la Première ministre israélienne quelques jours avant le déclenchement de la guerre. Il avertit Golda Meir du fait que l’Égypte et la Syrie envisageaient de lancer une bataille par une opération surprise menée contre les forces israéliennes dans le Sinaï et les hauteurs du Golan, mais Golda Meir ne prit pas cet avertissement au sérieux. La nouvelle se répandit vite dans les pays arabes après la perte de la guerre, mais elle n’eut aucun effet, et le roi Hussein demeura sur le ring en ayant bien appris comment être un tueur et non un tué !

Chez nous, l’effondrement libanais se poursuit avec succès. Une tentative de sauvetage a été bien tentée avec la dernière session parlementaire pour l’élection d’un président. Mais dans l’arène de la lutte, le Hezbollah a renversé la tendance d’un grand nombre de Libanais tout en usant de l’obstruction.

Toujours dans son même ouvrage Kalam fil siyassa, Mohammad Hassanein Haykal dit à propos du roi Hussein qu’il a déclaré lors de la réunion au sommet tenue après l’affrontement l’ayant opposé aux Palestiniens en Jordanie : « Ceux qui sont hostiles aux autres – et les autres leur sont également hostiles – sont pour la plupart des hypocrites. Ils disent en public le contraire de ce qu’ils font en secret (…) Qu’est-ce que ces gens veulent de moi ? Mon pays est dans le besoin et ils ne lui donnent rien, et s’ils le font, c’est au compte-gouttes. Mon pays est en danger et personne d’entre eux n’est capable d’envoyer un soldat dans une tranchée ou de tirer une seule balle dans un affrontement (…) S’il y a quelqu’un qui pense que j’agis dans la politique jordanienne à partir d’une position qui a le privilège de choisir, c’est qu’il se ment. Je sais que certains attendent de moi une réaction non responsable dont ils se serviraient comme motif pour avaler le pays en entier. J’entendrai alors et je lirai alors des déclarations de condamnation successives, et la Jordanie ira là où la Palestine est allée avant elle. Est-ce là ce qu’ils veulent de moi ? »

Au Liban, ce dont nous avons besoin, c’est d’un « roi Hussein », d’un « Bachir Gemayel », d’un « Fouad Siniora » pour gagner dans l’arène, sinon, l’effondrement et l’anéantissement suivront, et ils arrivent déjà à grands pas ! Sinon, nous serons tous tués ! Sinon…

Abdel Hamid EL-AHDAB

Avocat

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Mohammad Hassanein Haykal a répété, dans son livre Kalam fil siyassa, ce que l’ancien roi d’Espagne Juan Carlos lui avait dit à propos d’un entretien qu’il avait eu avec le roi Hussein.Le regretté roi de Jordanie assistait avec le souverain espagnol à un spectacle de tauromachie à Séville. Le roi Juan Carlos avait alors expliqué, en fin de match, à son invité la méthode...

commentaires (1)

Abdel Nasser a détruit les pays arabes , il ne savait pas à qui il avait à faire

Eleni Caridopoulou

08 h 51, le 22 juin 2023

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Commentaires (1)

  • Abdel Nasser a détruit les pays arabes , il ne savait pas à qui il avait à faire

    Eleni Caridopoulou

    08 h 51, le 22 juin 2023

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