Le chef du courant des Marada et leader maronite du Liban-Nord, Sleiman Frangié, a prononcé dimanche soir, à quelques jours d'une séance parlementaire mercredi 14 juin consacrée à l'élection d'un président, un discours dans lequel il a évoqué la possibilité d'un dialogue "exhaustif" avec les autres parties sur les noms d'autres candidats à la présidentielle. Dans son intervention, prononcée à l'issue d'une messe donnée à Ehden, au Liban-Nord, en mémoire des victimes du massacre du 13 juin 1978, M. Frangié s'en est par ailleurs pris à ses détracteurs, notamment le Courant patriotique libre (CPL, aouniste), qu'il a accusé de soutenir un candidat "issu du système au pouvoir" en la personne de Jihad Azour.
La candidature de M. Frangié à la présidentielle est soutenue par le Hezbollah et le mouvement Amal du président de la Chambre Nabih Berry. Il devrait obtenir au cours de la séance de mercredi les voix de ces deux formations et de leurs alliés, tandis qu'une bonne partie des députés opposés à sa candidature devraient voter pour l'ex-ministre Jihad Azour. Ce dernier fait, depuis le week-end dernier, l'objet d'une entente entre plusieurs partis d'opposition, dont les Forces libanaises, les Kataëb, le Courant patriotique libre, le Parti socialiste progressiste (joumblattiste) et plusieurs députés indépendants.
Voici les principaux points du discours de Sleiman Frangié :
- Cette année, le 13 juin a une connotation particulière, vu que cette date est liée à des circonstances politiques et à la présidentielle.
- Nous ne permettrons pas que le 13 juin soit attaqué le 14 juin (pendant la séance parlementaire). Le 13 juin, quand (les miliciens) sont venus, nous étions endormis. Mais aujourd'hui, nous sommes bien éveillés et ce qu'il s'est passé le 13 juin n'aura pas lieu le 14 juin.
- Personne ne peut faire de surenchère par rapport à notre identité chrétienne, nationale et arabe.
- Tous les députés ont le droit de soutenir le candidat à la présidentielle qu'ils souhaitent parmi les candidats proposés.
- Il est temps de rassurer les chrétiens et de leur dire que notre partenaire dans la nation n'a pas l'intention de les supprimer (en allusion au Hezbollah).
- Je n'ai pas honte de clamer mon appartenance à un projet politique. Si je deviens président, je serai le président de tous les Libanais et je serai ouvert à tous.
- Vous voulez un candidat hors du système politique traditionnel mais votre candidat est issu du système et il a été le ministre des Finances du “quitus impossible”.
Le quitus impossible est le titre d'un ouvrage publié en 2013 par le député Ibrahim Kanaan, membre du Courant patriotique libre fondé par l'ex-président Michel Aoun, dans lequel il accuse Fouad Siniora d’avoir manipulé les comptes et détourné des fonds publics, à hauteur de onze milliards de dollars. Entre 2005 et 2008, Jihad Azour a été ministre des Finances dans le gouvernement de M. Siniora.
- S'adressant aux députés issus de la contestation qui se sont entendus sur la candidature de Jihad Azour : Comment vous justifiez-vous auprès des jeunes après vous être entendus avec ceux contre qui vous avez mené une révolution ?
- Samir Geagea est contre le candidat de la Moumanaa, mais je voudrais rappeler que la Moumanaa a soutenu Michel Aoun (à la présidence) en 2016 et que le quorum a été torpillé lors des séances parlementaires plus de vingt fois, jusqu'à ce que les Forces libanaises (de M. Geagea) soutiennent le candidat du Hezbollah.
- Leur problème n'est pas avec le Hezbollah mais avec tout candidat qui rassure et est ouvert.
- Je ne veux m'imposer à personne et je n'ai pas de problème si un candidat national et fédérateur fait l'objet d'une entente.
- Mes relations avec le patriarche maronite Béchara Raï sont excellentes.
- Nous appelons aujourd'hui à un dialogue exhaustif, ou à un dialogue bipartisan qui mène à un dialogue avec toutes les parties.
- Mettons tous les noms sur une seule table de dialogue, et sans conditions préalables de la part des différentes parties.
- Quand ils ont dit qu'ils allaient nommer un candidat hors du système politique au pouvoir, nous pensions qu'ils allaient opter pour Ziyad Baroud (l'ancien ministre de l'Intérieur, évoqué lors de discussions entre les parties de l'opposition).
- La France connaît le Liban et essaie de trouver une solution. L'initiative française est une initiative pragmatique.
Paris a longtemps considéré que l’élection de Sleiman Frangié dans le cadre d’un troc avec l’opposition sur le poste de Premier ministre était la seule option viable pour débloquer l’élection présidentielle. Un changement de cap semble toutefois en cours et le président français Emmanuel Macron a récemment nommé son ancien ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, comme "envoyé spécial pour le Liban".
- En allusion au mandat de Michel Aoun : Dans mon dictionnaire présidentiel, l'expression "on ne nous a pas laissés faire" n'existe pas.
- Je m'engage à mener les réformes, respecter l'accord de Taëf et appliquer la décentralisation administrative.
- Si je deviens président, je serai le président de tout le Liban, de ceux qui sont avec moi comme contre moi.
commentaires (14)
Un discours pareil adressé aux Libanais c'est les prendre pour des galoches. Je ne dirais pas que "plus personne n'est dupe" puisqu'il y a encore des gens qui votent pour ces criminels, mais la majorité du peuple a exprimé sa volonté de changement et changement il doit y avoir. Franjieh peut promettre ce qu'il veut, il ne peut convaincre surtout qu'il est soutenu par ceux la même, le Hezbollah et le PSNS, qui n'ont aucune allégeance a l’état. En fait ce qu'il demande aux députés c'est d'offrir le pays a l'axe Irano-Syrien légalement. J’espère que les députés dit de la contestation vont se réveiller et laisser, pour l'instant, Baroud de coté. La survie du pays en dépends.
Pierre Christo Hadjigeorgiou
09 h 11, le 12 juin 2023