
Le discours du chef du Hezbollah retansmis le 14 avril 2023 dans la banlieue sud de Beyrouth, à l'occasion de la Journée mondiale d'al-Qods. Photo João Sousa
Une semaine après l'échange de tirs de roquettes entre le Liban-Sud et Israël, le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah a mis en garde vendredi contre "une grande guerre" dans la région, à cause des "actions irréfléchies" du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu "à Jérusalem, en Cisjordanie, à Gaza, au Liban ou en Syrie".
Le leader chiite, qui a qualifié cet accès de tensions d'"événement important et de taille" depuis la guerre entre sa formation et l'Etat hébreu en 2006, a affirmé que "la politique du silence" concernant ces événements était "la meilleure". Le dirigeant chiite s'était abstenu le 7 avril de commenter cet embrasement soudain du front. Il a également accusé le Premier ministre israélien de "mensonges", démentant que "des infrastructures du Hezbollah ou du Hamas" aient été touchées par les frappes de l'armée israélienne au Liban-sud.
Le chef du Hezbollah a tenu ces propos dans un discours prononcé à l'occasion de la "Journée mondiale d'al-Qods" (Jérusalem), décrétée par l'ayatollah Khomeiny, fondateur de la République islamique d'Iran et célébrée tous les ans le dernier vendredi du ramadan, en signe de solidarité avec les Palestiniens.
Des militants du Hezbollah en treillis, le 14 avril 2023 dans la banlieue sud de Beyrouth, lords d'une retransmission en direct d'un discours du chef du parti, Hassan Nasrallah. Photo João Sousa
Des dizaines de roquettes ont été tirées le 6 avril du Liban en direction du territoire israélien, en réponse à l'irruption violente de la police israélienne dans la mosquée al-Aqsa à Jérusalem pour en déloger des Palestiniens qui s'y étaient barricadés. Israël a riposté le 7 avril à l'aube en frappant à la fois le Liban-Sud et la bande de Gaza, après des tirs de roquettes lancées depuis cette région palestinienne sous blocus.
L'incident à la frontière libanaise, non revendiqué jusque-là, a été imputé par Israël au mouvement islamiste palestinien Hamas, dont le chef du bureau politique Ismaïl Haniyé se trouvait alors à Beyrouth. Le 10 avril, Benjamin Netanyahu, en difficulté sur le plan politique, avait assuré qu'il ne "permettra pas au Hamas terroriste de s'établir au Liban", et promis de "restaurer la sécurité" dans son pays en agissant "sur tous les fronts". Plusieurs observateurs estiment que les tirs n'auraient pu avoir lieu sans l'aval du Hezbollah, omniprésent au Liban-Sud et qui a dernièrement prôné dans ses discours l'"unité des fronts".
Le 9 avril, le Hezbollah avait, en effet, publié un communiqué dans lequel il affirmait que le Hassan Nasrallah et Ismaïl Haniyé avaient discuté de "l'état de préparation de l'axe de la résistance" contre Israël. Cette "unité des fronts" a été critiquée par Gebran Bassil, chef du Courant patriotique libre (CPL, aouniste) et allié chrétien du Hezbollah, dans un discours le 13 avril.
Mises en garde contre une guerre
S'exprimant par écran interposé devant une foule de partisans et de militants rassemblé dans la banlieue sud de Beyrouth, le chef du Hezbollah a estimé dans son discours que "le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est trop peureux pour mener une guerre contre l’Iran". "Mais nous devons mettre en garde l’ennemi : certaines de vos actions irréfléchies à Jérusalem, en Cisjordanie, à Gaza, au Liban ou en Syrie risquent de mener la région vers une grande guerre", a-t-il mis en garde. Selon lui, "en ce moment, ni le Liban ni la Syrie ni Gaza ne veulent la guerre (...) mais les actes et les crimes de l'ennemi pourraient entraîner la région vers l'embrasement".
Les avertissements du chef Hezbollah ne se sont pas arrêtés là. "Aux Israéliens et aux Américains, nous disons : prenez garde, les éléments sacrés pour les musulmans et les chrétiens sont une ligne rouge, Hébron est une ligne rouge, la population palestinienne est une ligne rouge", a-t-il encore abondé. "Depuis Beyrouth et sa banlieue sud, nous disons que nous sommes engagés au côté du peuple Palestinien et nous ne laisserons pas tomber la Palestine", a promis Hassan Nasrallah.
Infrastructures intactes
Le dirigeant chiite a par ailleurs justifié une nouvelle fois son abstention de commenter les incidents à la frontière. "La politique du silence que le Hezbollah et la Résistance adoptent est la meilleure dans la guerre contre l’ennemi. Pas besoin donc d'entrer dans les détails. La politique du silence inquiète l’ennemi, mais peut-être aussi les amis. Mais l’inquiétude des amis peut être traitée", a-t-il dit. Pour lui, "il faut que l’ennemi reste inquiet et effrayé. Personne ne doit lui apporter des assurances, car c’est lui l’agresseur qui attaque le peuple palestinien tous les jours, bombarde quasi-quotidiennement la Syrie et menace les Libanais".
Hassan Nasrallah a accusé Benjamin Netanyahu d'avoir "proféré des mensonges" au sujet des frappes israéliennes au Liban-Sud. "Le plus grand mensonge c’est lorsqu’il a dit qu’Israël a bombardé des infrastructures du Hezbollah et du Hamas. Tous les médias se sont rendus sur les lieux des frappes, il s’est avéré qu’il s’agit de champs de banane et d’irrigation. Aucune infrastructure du Hezbollah ou du Hamas n’a été touchée", a martelé le leader chiite.
Le leader chiite a ensuite réagi aux menaces que le Premier ministre israélien a dernièrement formulées à son adresse. "On m’a dit que M. Netanyahu m’a menacé nommément, en promettant que 'nous allons voir ce que nous allons voir'. Nous aussi, en tant que Résistance au Liban, nous lui disons : 'Vous allez voir ce que vous allez voir'", a promis le chef du parti. "L'ennemi doit savoir que les menaces contre le Liban et la Résistance sont inutiles. Elles nous rendent plus forts et déterminés à protéger le Liban et tous ceux qui peuvent le viser", a-t-il renchéri. "Nous riposterons à toute action ciblant quelqu'un au Liban de manière et d’intensité adéquate, sans aucune hésitation", a prévenu le chef du Hezbollah.
Iran, Arabie, Syrie
Le numéro un du parti chiite a par ailleurs commenté certaines questions régionales, notamment le rétablissement des relations diplomatiques entre l'Arabie saoudite et l'Iran. "L’accord irano-saoudien a commencé à avoir des conséquences plus vite que ce que certains pensaient, et nous espérons que cela touchera le Liban", a-t-il affirmé, estimant que cela aura un impact "positif" et "ralentira la normalisation" avec Israël. "Ce qu’ils ont appelé 'l'axe sunnite' est tombé. Le pari sur une guerre menée par les pays du Golfe contre l’Iran est tombé", a-t-il encore souligné.
Hassan Nasrallah a en outre commenté les efforts de normalisation arabes avec le régime du président syrien Bachar el-Assad, au lendemain d'une rencontre entre les chefs de la diplomatie d'Arabie saoudite et de Syrie à cette fin. "L’important c’est le retour des relations politiques normales entre la Syrie et les pays arabes. C’est ce qui compte", a-t-il estimé. Le ministère libanais des Affaires étrangères a salué vendredi "les efforts arabes déployés pour trouver une solution arabe à la crise syrienne".
Riyad et Téhéran avaient rompu leurs relations diplomatiques en 2016 après l'attaque de missions diplomatiques saoudiennes par des manifestants en Iran, à la suite de l'exécution par le royaume wahhabite d'un dignitaire chiite. Mais les deux capitales ont signé, le 10 mars dernier, un accord de normalisation sous l'égide de la Chine, annonçant le rétablissement de leurs relations et la réouverture leurs ambassades respectives. Beaucoup attendent de cet accord des retombées positives sur le Proche et le Moyen-Orient, où l'Iran et l'Arabie saoudite se disputent l'influence.
Le secrétaire général du Hezbollah n'a pas évoqué dans son discours des questions de politique locale, notamment la présidentielle, alors que le Liban est confronté à une double vacance à l'Exécutif depuis la fin du mandat de Michel Aoun en octobre 2022.
Je ne lis meme pas les articles sur cet homme, le titre a lui seul est suffisant. Netanyahu a besoin de lui et il a besoin de Netanyahu. Ces deux forment une "mutually beneficial, if not admiring, society". Point a la ligne.
21 h 44, le 15 avril 2023