Ils sont quand même gonflés, les mecs qui ont torché il y a quelques jours le « Rapport sur le bonheur mondial ». Faire croire à la planète entière que les Libanais sont misérables et malheureux, alors même que leurs dirigeants bien-aimés ont réussi à la force du poignet à les hisser au-dessus de l’Afghanistan.
Diable, faire mieux que chez les Afghans, c’est déjà énorme ! Et que nos guignols d’en haut en soient chaudement remerciés ! Le Libanais milieu de gamme vit aujourd’hui à l’ère spatiale dans un pays de rêve : des routes transformées au fil des ans en ragoût lunaire où les crevasses et fondrières le disputent à l’asphalte et gagnent, un bled pratiquant l’écologie sans le savoir grâce au prix prohibitif de l’essence, sans gaz à effets de serre ou même de gaz domestique d’ailleurs. On ajoute à cela une classe politique arriérée comprenant entre autres : un barbu sec et aride comme un sarment de vigne, parachuté du néolithique, grincheux et au mental obtus ; un vieux gendre aigri et amaigri, n’ayant réussi dans sa vie qu’à un seul concours : le concours de circonstances ; un gouverneur de banque centrale converti en imprimeur et surfant sur la planche à billets ; un chef du législatif indéboulonnable, vissé sur son pot de Chambre monté sur derrick à l’avant-centre de l’hémicycle. Ouf !
Quant à la population, elle ne pouvait mieux espérer en termes de gouvernance. Partant du principe universel selon lequel la liberté commence dès lors qu’il y a deux chefs, elle savoure son bonheur avec pas moins de 17 ténors, chapeautant dix-sept communautés aux couleurs délavées, un fondouk ingouvernable et qu’il est de surcroît inutile de gouverner. Ajoutons à cela un État croupion métamorphosé en syndic de faillite et sans cesse occupé à organiser des réconciliations incompatibles, une armée qui s’essouffle à faire le ménage d’un point à l’autre du territoire, des politiciens se curetant le nombril devant des niaiseux qui leur passent la brosse à reluire et le plumeau… En somme, un pouvoir politique qui, s’il n’a ni le temps ni la compétence pour s’occuper des citoyens, leur fout en revanche une paix royale dans leurs occupations favorites d’arnaque, de corruption et de gabegie. N’est-elle pas belle la vie ?
Bon d’accord, il y a parfois quelques accrocs lorsque dans un sursaut d’autorité, les pitbulls d’un quelconque service sont lâchés et font passer quelques manifestants à la moulinette : aboiements, papiers, fouille corporelle avec touche-pipi, examen de sang, de selles et d’urine. Mais tout paradis a son purgatoire…
Entre un gouvernement insoluble et une économie qui se dissout, faut cependant rester zen. La livre est certes dans les abysses et la dette équivalente au prix d’un carton d’œufs de Fabergé, mais le spectre de la guerre s’est enfin évaporé, car même les pierres, bâtons et canifs sont devenus hors de prix. Voilà la véritable clé de 12 du bonheur. Et ça, même les Afghans ne sont pas près de l’avoir…
gabynasr@lorientlejour.com
Ils sont quand même gonflés, les mecs qui ont torché il y a quelques jours le « Rapport sur le bonheur mondial ». Faire croire à la planète entière que les Libanais sont misérables et malheureux, alors même que leurs dirigeants bien-aimés ont réussi à la force du poignet à les hisser au-dessus de l’Afghanistan.Diable, faire mieux que chez les Afghans, c’est déjà...
commentaires (9)
Riyad s’entend avec Damas, Riyad s’entend avec Téhéran, Riyad refuse tel ou tel Président, hmmm… Les partis Chrétiens n’arrivent même pas à s’entendre entre eux, et n’ont aucun appui international tangible sur lequel compter. Hmmm… Il me semble que j’ai déjà vu ce scénario, et, de mémoire, ça n’avait pas très bien fini. Il est déjà trop tard pour éviter le pire, mais s’il faut tenter le tout pour le tout, les Chrétiens du Liban ne peuvent plus attendre, c’est agir ou partir. Agir c’est la mort possible de centaines de personnes, partir c’est la mort certaine de la Chrétienté au Proche Orient. Beau choix que celui-là…
Charles Ghorayeb
18 h 26, le 24 mars 2023