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Nos Lecteurs ont la Parole

La philosophie, effort vers la sagesse

Philosopher, c’est penser par soi-même. La philosophie n’est pas seulement une aventure, elle est aussi un travail qui ne va pas sans efforts, sans lectures, sans outils. Il s’agit toujours d’une initiation, disons une porte d’entrée, pour apprendre à constituer notre propre anthologie existentielle.

Vingt-cinq siècles de philosophie font un trésor inépuisable. Ayons l’envie d’aller y voir de plus près, tout en trouvant le plaisir de découvrir la splendeur des Lumières.

Nos jeunes adolescents ainsi que nos adultes ont besoin qu’on les y accompagne. C’est même notre devoir. Pourquoi, alors, ne pas mettre sur leur chemin des vécus, des choix philosophiques qui pourront bien les nourrir et les aider à construire un authentique raisonnement, pour savoir se définir à la recherche d’une vraie identité basée sur le questionnement, face à un siècle régi par tant de dérèglements, par tant de violences, par tant de peurs, et où il est amplement urgent de restructurer nos valeurs, nos priorités et nos convictions pour sauver, à la rigueur, notre humanité perdue ?

D’où la nécessité de la philosophie. Mais comment la définir? La philosophie n’est pas une science, ni même une connaissance. Ce n’est pas un savoir de plus : c’est une réflexion sur les savoirs disponibles. C’est pourquoi on ne peut pas apprendre la philosophie, disait Kant, on ne peut qu’apprendre à philosopher. Comment ? En philosophant soi-même : en s’interrogeant sur sa propre pensée, sur la pensée des autres, sur le monde, sur la société, sur ce que l’expérience nous apprend, sur ce qu’elle nous laisse ignorer.

Qu’on rencontre en chemin des œuvres de tel ou tel philosophe professionnel, c’est ce qu’il faut souhaiter. On pensera mieux, plus fort, plus profond. On ira plus loin et plus vite. Encore cet auteur, ajoutait Kant, « doit-il être considéré non pas comme le modèle de jugement, mais simplement comme une occasion de porter soi-même un jugement sur lui, voire contre lui ». Personne ne peut philosopher à notre place. Que la philosophie ait ses spécialistes, ses enseignants, c’est entendu. Mais elle n’est pas d’abord une spécialité, ni un métier ni une discipline universitaire. Elle est une dimension constitutive de l’existence humaine. Dès lors que nous sommes doués et de vie, et de raison, la question se pose pour nous tous, inévitablement, d’articuler l’une à l’autre ces deux facultés. Et certes, on peut raisonner sans philosopher (par exemple, dans les sciences), vivre sans philosophie (par exemple, dans la bêtise ou la passion). Mais point, sans philosopher, penser sa vie et vivre sa pensée : puisque c’est la philosophie même.

La biologie ne dira jamais à un biologiste comment il faut vivre, ni s’il le faut ni même s’il faut faire de la biologie. Les sciences humaines ne diront jamais ce que vaut l’humanité ni ce qu’elles valent. C’est pourquoi il faut philosopher : parce qu’il faut réfléchir sur ce que nous savons, sur ce que nous vivons, sur ce que nous voulons, et qu’aucun savoir n’y suffit ou n’en dispense. L’art? La religion ? La politique ? Ce sont de grandes choses, mais qui doivent elles aussi être interrogées. Or, dès qu’on les interroge ou dès qu’on s’interroge sur elles un peu profondément, on en sort, au moins en partie : on fait un pas, déjà, dans la philosophie. Que celle-ci doive à son tour être interrogée, aucun philosophe ne le contestera. Mais interroger la philosophie, ce n’est pas en sortir, c’est y entrer.

Philosopher, c’est vivre avec la raison ! Cela indique une direction, mais ne saurait en épuiser le contenu. La philosophie est questionnement radical, quête de la vérité globale ou ultime, création et utilisation de concepts, réflexivité, méditation sur sa propre histoire et sur celle de l’humanité, recherche de la plus grande rationalité possible, construction, parfois, de systèmes, élaboration, toujours, de thèses, d’arguments, de théories... Mais elle est aussi, et peut-être d’abord, critique des illusions, des préjugés, des idéologies.

Toute philosophie est un combat. Son arme ? La raison. Ses ennemis ?

La bêtise, le fanatisme, l’obscurantisme ou la philosophie des autres. Ses alliés? Les sciences. Son objet ?

Le tout, avec l’homme dedans. Ou l’homme, mais dans le tout. Son but ?

La sagesse : le bonheur, mais dans la vérité. Il y a du pain sur la planche, comme on dit, et c’est tant mieux : les philosophes ont bon appétit !

En pratique, les objets de la philosophie sont innombrables : rien de ce qui est humain ou vrai ne lui est étranger. Cela ne signifie pas qu’ils soient tous d’égale importance. Kant, dans un passage fameux de sa Logique, résumait le domaine de la philosophie en quatre questions : « Que puis-je savoir ? Que dois-je faire? Que m’est-il permis d’espérer ? Qu’est-ce que l’homme ? » Les trois premières questions se rapportent à la dernière, remarquait-il. Mais elles débouchent toutes les quatre, pourrait-on ajouter, sur une cinquième, qui est sans doute, philosophiquement et humainement, la question principale : comment vivre? Dès qu’on essaie de répondre intelligemment à cette question, on fait de la philosophie.

L’être humain est un animal philosophant : il ne peut renoncer à la philosophie qu’en renonçant à une part de son humanité. S’interroger sur le monde, sur le bonheur, sur la justice, sur la liberté, sur la mort, sur Dieu, sur la connaissance... Comment y renoncer ?

Il faut donc philosopher : penser aussi loin qu’on peut et plus loin qu’on ne sait. Dans quel but? Une vie plus humaine, plus lucide, plus sereine, plus raisonnable, plus heureuse, plus libre... C’est ce qu’on appelle traditionnellement la sagesse, qui serait un bonheur sans illusions ni mensonges. Peut-on l’atteindre? Jamais totalement, sans doute. Mais cela n’empêche pas d’y tendre ni de s’en rapprocher. « La philosophie, écrit Kant, est pour l’homme effort vers la sagesse, qui est toujours inaccompli. » Raison de plus pour s’y mettre sans tarder. Il s’agit de penser mieux, pour vivre mieux. La philosophie est ce travail. La sagesse, ce repos.

Qu’est-ce que la philosophie ? « Une activité qui nous procure la vie heureuse. » (Épicure). C’est sa plus grande réussite, et cela vaut mieux, même si la réussite n’est jamais totale, que de l’enfermer dans ses échecs. Le bonheur est le but, la philosophie, le chemin.

Bon voyage à tous !

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Philosopher, c’est penser par soi-même. La philosophie n’est pas seulement une aventure, elle est aussi un travail qui ne va pas sans efforts, sans lectures, sans outils. Il s’agit toujours d’une initiation, disons une porte d’entrée, pour apprendre à constituer notre propre anthologie existentielle.Vingt-cinq siècles de philosophie font un trésor inépuisable. Ayons l’envie...

commentaires (1)

Socrate et le Christe se ressemblent beaucoup, Socrate n’a rien écrit c’est Platon qui a écrit , le Christe n’a rien écrit ce sont le évangélistes qui ont écrit

Eleni Caridopoulou

21 h 33, le 20 mars 2023

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Commentaires (1)

  • Socrate et le Christe se ressemblent beaucoup, Socrate n’a rien écrit c’est Platon qui a écrit , le Christe n’a rien écrit ce sont le évangélistes qui ont écrit

    Eleni Caridopoulou

    21 h 33, le 20 mars 2023

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