Lorsque ta terre expire
Et s’enfonce, ô mon Dieu ;
Lorsque émerge le pire
Pour engloutir nos lieux ;
Lorsque la croûte s’ouvre
Et de corps se remplit ;
Lorsque l’on y découvre
Un peuple enseveli ;
Lorsque ton œuvre enterre
Des rêves dans leur lit,
Des familles entières
Au tréfonds de l’oubli ;
Lorsque ta terre tremble
Et fait trembler les cœurs ;
Lorsque ta bonté semble
Sujette à tes humeurs ;
Lorsque se fend le ventre
Qui nous a enfantés ;
Lorsqu’on râle en son antre
De mirages hantés ;
Lorsque ta terre inspire
Et nous fait expirer ;
Lorsqu’on est dans sa mire
Pour se faire emmurer ;
Lorsqu’elle se fait goule,
Dévoreuse d’enfants,
Emportant dans sa houle
Des berceaux innocents ;
Lorsque l’ancienne Antioche
Voit son passé vivant
Raclé de coups de pioche
Au cri des survivants ;
Lorsque ses sanctuaires
S’ouvrent sur le néant,
Sur un front mortuaire
Ténébreux et béant...
Ô mon Dieu, je m’élève
Vers Toi pour Te prier
De prévenir la grève
De danser sous nos pieds ;
D’établir sous ton aile,
Dans ta chère Cité,
Une autre loi que celle
De la nécessité ;
De lever ton énigme
Sur le bien et le mal ;
Changer de paradigme
Et de dessein fatal ;
De nous offrir ton ère
De paix et de bonheur
Par un autre salaire
Que celui des douleurs !
Seigneur, je Te conjure,
Ô Toi le Père aimant,
De bien vouloir exclure
Les bons du châtiment ;
D’éviter l’amalgame
Des boucs et des brebis,
Bien que tous aient une âme
Portant le même habit ;
D’arrêter les désastres
De Tes mains : naturels ;
De tracer de Ton astre
Le chemin vers ton Ciel ;
De nous conduire à dire
Que, vraiment, tout est bien !
Que sous Ton libre empire,
On se plaît, ô combien !
Ô Dieu de l’impossible !
Fais donc que le meilleur
De ces mondes possibles
Soit ici, non ailleurs !
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